Antoine de Saint-Exupéry entre à l’Université

Alors que la France célèbre cette année le soixante-dixième anniversaire de sa libération, mais commémore également la disparition d’Antoine de Saint-Exupéry, l’Université Jean Moulin Lyon 3, fait devoir de mémoire en révélant l’action de cet autre Lyonnais célèbre, dont l’engagement pendant la seconde guerre mondiale reste méconnu et controversé. L’Université organise à cette occasion plusieurs manifestations qui rendent hommage au pilote écrivain. Une exposition à la scénographie originale montre son combat depuis les Etats Unis.

Si on connait l’engagement de Saint-Exupéry à partir de novembre 1939, au tout début du conflit, puis 3 années plus tard lorsque, à force de lobbying auprès des autorités militaires américaines, il réintègre son escadrille au sein du Groupe de Reconnaissance II/33 jusqu’à ce 31 Juillet 1944 où il fut porté disparu, on connait moins son épopée New Yorkaise et son engagement singulier pour la liberté depuis les Etats Unis.

C’est cette période que l’exposition, qui se tient depuis le 3 Novembre (jusqu’au 10 janvier 2015) au sein même de la Bibliothèque Universitaire de l’ancienne Manufacture des Tabacs de Lyon, met en lumière.

Arrivé à New York en décembre 1940, St Ex, qui souhaite profiter de la notoriété acquise grâce au succès de « Wind Sand and Stars » (Terre des Hommes) « Du vent du sable et des étoiles » obtiendra The National book Award en janvier 1941 pour persuader le gouvernement des Etats Unis d’entrer en guerre contre le nazisme, va mener presque 3 années durant un « combat singulier ».

C’est aux Etats Unis, qu’il écrira « Flight to Arras » (Pilote de Guerre – 1942), « Lettre à un Otage » (juin 1943) qu’il consacrera à son ami Léon Werth et son conte universel « Le Petit Prince ». Pendant 28 mois, il écrit, il donne des conférences, il reçoit des journalistes mais cette expression publique de sa volonté de fédérer tous les Français hors de France, l’isole peu à peu de la communauté Française de New York. C’est au mois de mars 1943 qu’il décidera d’embarquer pour Alger et reprendra le combat.

« Saint Exupéry n’était ni Gaulliste, ni Pétainiste, ni Giraudiste, ni communiste… » explique Jacques Comby, Président de l’Université Jean Moulin, «… il était Antoine de Saint Exupéry, un homme attaché à son pays, un homme qui ne supportait pas que les enfants de France aient faim, que les Juifs soient persécutés, un homme avant tout épris de liberté, pour lui, pour les hommes …» précise t’il «… c’est pour raconter cette histoire que nous avons voulu cette exposition. »

Cette exposition est l’œuvre de scénographes de talent, Jean Christophe Piffaut, ‎réalisateur, muséographe, acquis depuis toujours à la philosophie Exupérienne et de Clara Sigalevitch, qui a pris le parti d’imprimer au sol un plan géant de Manhattan sur lequel se déplace le public. Depuis les adresses localisées sur le plan partent des lignes de couleurs vives, conduisant chacune à une histoire illustrée de photos contemporaines et de reproductions d’archives.

Ainsi, les visiteurs peuvent découvrir des images qui balisent son combat et des photos actuelles des lieux où St Ex avait coutume de se rendre : les cafés et restaurants où il avait ses habitudes et y écrivait jusque tard dans la nuit, chez les amis à qui il aimait lire le fruit de sont travail, dans le « bocal », l’atelier de son ami peintre Bernard Lamotte, où il côtoya le « tout New York » mais aussi dans l’appartement de Greta Garbo ou de Silvia Hamilton où fut achevé « Le Petit Prince ».

On le retrouve aussi dans une image des colonnes du New York Time magazine ou encore dans les studios de la NBC, d’où il lancera un appel pour l’union des Français, les invitant à rejoindre les forces Américaines dans la guerre pour la libération de l’Europe.

Une copie de la table de Bernard Lamotte réalisée par le Musée Air France, sur laquelle est gravée la signature de Saint Exupéry et un personnage qui préfigure les illustrations du Petit Prince est une des pièces maitresse de l’exposition. Objet de tous les regards, la gourmette, retrouvée au large des calanques Marseillaises un beau jour de 1998 par le patron pêcheur Jean Claude Bianco, figure aussi en bonne place dans l’exposition, voisinant avec une édition clandestine de « Pilote de guerre », publiée en décembre 1943 à Lyon par une coopérative ouvrière.

Mais l’hommage rendu par l’Université Jean Moulin Lyon 3 au pilote écrivain ne se résume pas à cette exposition. Le Lundi 1er décembre prochain, (19 h 30 – Auditorium Malraux) une rencontre-débat animée par Emmanuel Laurentin, producteur de « La fabrique de l’Histoire » (France Culture) avec la participation de Laurent Douzou, Professeur des Universités en histoire contemporaine à Science-Po Lyon, d’Alban Cerisier Secrétaire des Editions Gallimard et de Delphine Lacroix, responsable culturelle pour la Succession Saint Exupéry-d’Agay, traitera de l’engagement de Saint Exupéry sur le thème « Un combattant singulier pour la liberté ».

Quinze jours plus tard, (Lundi 15 décembre à 19 h 30 à l’auditorium Malraux) une soirée littéraire au cours de laquelle témoignera François d’Agay, neveu et filleul d’Antoine de Saint Exupéry, traitera du thème «Le vide et l’absence omniprésent ; Saint Exupéry, l’éternel enfant de Saint Maurice de Rémens »
Puis, le 18 décembre (20 h 30 – à l’Institut Lumière, 25 rue du 1er film – Lyon 8ème) aura lieu une projection – débat du film « Courrier Sud », réalisé par Pierre Billon d’après un scénario de Hans G. Lustig et Robert Bresson d’après le roman d’Antoine de Saint Exupéry, (janvier 1937).

La Fête des Lumières de Lyon, grâce une réalisation de Jean Christophe Piffaut et une scénographie de Clara Sigalevitch, honore également à sa manière Antoine de Saint-Exupéry, place Bellecour, tout près de sa maison natale, (du vendredi 5 au Lundi 8 décembre -spectacle de 15 minutes toutes les demi-heures de 17 h 30 à minuit) par une évocation des aventures imaginaires du petit Tonio à travers une grande fresque mêlant musique, grandes images, effets spéciaux et décors géants. Juché sur sa bicyclette ailée, le héros nous emmènera dans ses rêves d’échappées vers le ciel en quête de lointains horizons. Un spectacle à ne pas manquer !

Philippe Chetail

Pratique

• Exposition «1939-1944 : Antoine de Saint-Exupéry combattant – Un engagement singulier pour la liberté»
• Exposition ouverte à tous. Entrée libre.
• Du 3 novembre au 10 janvier 2015
• Salle d’exposition de la bibliothèque universitaire
• Manufacture des Tabacs – 6 rue Rollet – Lyon 8e
• Lundi au vendredi | 8h30 à 21h – Samedi | 9h30 à 17h
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