Certifié CS-VLA en 2017, le Sonaca 200 est le premier avion léger à être construit en Belgique depuis le début des années 1960. Aerobuzz a testé en vol la version glass cockpit, le Sonaca 200 Trainer Pro.
Deux ans après sa création en 2015, Sonaca Aircraft fait voler le 19 juin 2017 le Sonaca 200. Sur la base d’un kit de Sling 2, l’avion belge certifié CS-VLA (Very Light Aircraft, avions très légers, avec une masse maximale au décollage de 750 kg) par l’EASA en 2018, est le résultat de travaux qui ont modifié la structure de base de près de 80% pour en faire un avion école et de loisir.
En 2019, sept appareils ont déjà été livrés, en Grande-Bretagne pour des privés et en Belgique pour des écoles de pilotages. Sonaca Aircraft détient un carnet de commandes pour 45 avions dans leur version 200 et Trainer Pro, doté d’un glass cockpit. Le Sonaca 200, équipé d’instruments analogiques pour le VFR de jour et de nuit, est proposé à 177.500 euro, tandis que la nouvelle version, équipée quant à elle d’un Garmin G500 Txi, est proposée pour un prix de base à 208.500 euro.
C’est cette dernière version que Pierre Van Wetter, responsable commercial de Sonaca Aircraft et pilote de présentation du Sonaca 200, m’invite à tester en vol depuis les installations de l’entreprise à Namur.
Arrivé sur l’aérodrome de Namur, la première surprise est de constater que le taxiway et la piste en dur ont subi récemment un lifting : un investisseur privé a acquis le terrain il y a peu, avec l’objectif d’en faire un lieu de construction aéronautique. Autour de Sonaca Aircraft, viendront prochainement s’installer plusieurs entreprises. La plate-forme est vivante, qui héberge des écoles vol moteur, planeur, drone… un agent AFIS, et… un restaurant bar ouvert toute la journée (à ne pas négliger, mais avec modération!).
La météo est clémente, CAVOK avec 12 kts de vent venant du 050°et un QNH à 1038. Pierre vient d’atterrir, en provenance de Charleroi, et coupe le moteur. Le premier contact visuel me rappelle l’avion école de mes débuts : le PA38. Tout métal comme le Sonaca 200, ailes basse cantilever avec un dièdre positif de 5°, la tête des rivets apparente, on a le sentiment d’une robustesse générale, renforcé par le train tricycle.
La comparaison toutefois s’arrête ici entre le Piper de 1978 et le Sonaca 200 de 2019 : le dernier est équipé d’un Rotax 914F de 115cv, d’une hélice tripale à calage fixe Duc Flash-R et d’un Garmin G500 Txi, tactile. Le Sonaca 200 est gris métal de manière à rappeler la nature du matériau utilisé pour sa construction. Seules les extrémités d’ailes, dont les winglets, le haut de la dérive et les extrémités du stabilisateur sont colorées : une option proposée au client pour la personnalisation de son avion.
Une fois installé à bord, en place droite, j’ai le sentiment d’être à l’aise, même avec la verrière fermée : la cabine est suffisamment spacieuse pour deux personnes de 80 kg, le siège est confortable, équipé d’une ceinture de sécurité trois points, le bras gauche vient se poser sur la colonne centrale, dotée d’un petit coussin, qui permet d’avoir le trim et la manette des gaz directement à portée de main.
Depuis la place droite, je remarque que chaque breaker dispose d’un code couleur en accord avec les interrupteurs des différents systèmes électriques du tableau de bord, de manière à simplifier la recherche de pannes. Les interrupteurs d’éclairages sont tous sur le même niveau. On ferme la verrière en la tirant vers l’avant, elle offre une bonne visibilité à 180 degrés. L
a mise en route est rapide : manette des gaz sur plein réduit, batterie sur on, magnetos sur on et ça démarre. On affiche 2.000 tours en contrôlant le système de monitoring du moteur, placé au-dessus de la colonne centrale. Depuis la place droite, les afficheurs moteur sont parfaitement lisibles tout comme le G500 Txi. L’environnement sonore de la cabine est tout à fait correct sans casque.
Les freins lâchés, je laisse rouler l’avion quelques mètres avant de tester les les freins, efficaces et symétriques. Le roulage sur le taxiway est aisé, la roulette de nez directionnelle a un bon débattement et les virages mêmes serrés se négocient bien. Arrivés au point d’attente de la piste 06, il est temps de tester le débattement des commandes et de procéder aux essais moteur.
Au seuil de piste, je pousse la manette des gaz jusqu’à 5.500 tours (puissance maximale continue) et la butée qui prévient une mauvaise manipulation : il faut lever une petite palette sous les doigts pour dépasser cette butée et donner la puissance maximale à 5.800 tours, en veillant à ne pas dépasser les cinq minutes à pleine puissance.
Je m’attendais à un roulage plus long et finalement, à une masse inférieure à la masse maximale (750 kg), avec 12 kts de vent majoritairement dans l’axe (50° pour une piste orientée à 060°), il suffit de soulager la roulette de nez pour que le Sonaca décolle sur 200 mètres à peine. Intéressant pour une piste courte et, avec la vitesse et le vario pour la pente max (63 kts avec 10° de volets en position décollage), le franchissement d’obstacles en bout de piste est assuré.
On met cap à l’Est avec le régime de croisière. Les paramètres moteurs affichent 4.810 tours et une consommation instantanée de 18 litres à l’heure, pour une vitesse indiquée de 100 kts et une température extérieure de 13°. A peine besoin de trimer l’avion légèrement à piquer, le Sonaca est d’emblée stable et la bille demeure centrée. En croisière rapide, à la puissance maximale continue, 5.500 tours, on atteint 115 kts pour une consommation qui frôle les 35 litres par heure.
Le sentiment que me donne le Sonaca, dès le décollage est d’être très stable. Sentiment renforcé lors d’un premier virage à 45 degrés d’inclinaison puis à 60 degrés pour un 360 degrés à gauche puis à droite. L’avion tourne littéralement sur l’aile et si je lâche les commandes, il conserve son inclinaison et son assiette : il ne part pas en virage engagé et reste stable, à peine besoin de l’accompagner au palonnier. Le taux de roulis est aussi bluffant : les commandes répondent aussitôt et sont précises et souples, pas besoin de grands mouvements au manche ni de mettre les muscles à contribution pour mettre l’avion en virage.
Après ces quelques manœuvres en virages, place maintenant aux décrochages sous différentes configurations. A 3.000 pieds sol, tout réduit, on tire progressivement sur le manche pour arriver en butée arrière, contre le siège. L’avertisseur de décrochage, une palette traditionnelle placée sur le bord d’attaque de l’aile droite, retentit 5 kt avant que l’avion ne décroche, à 50 kts.
L’avion décroche de manière franche, mais les ailes restent à plat, sans roulis, la bille reste en place. Je rends la main pour reprendre de la vitesse et on passe cette fois à un décrochage avec les volets à 20° en position approche. L’avion décroche à 43 kts avec les mêmes effets qu’en configuration lisse.
Établis en vent arrière pour la piste 06, la verrière offre une vue panoramique qui n’est ni gênée par les arceaux du cockpit ni par le tableau de bord vers l’avant. On conserve ainsi une bonne visibilité sur la piste. A 85 kts, je sors le premier cran de volet en abaissant la palette au-dessus de la commande des gaz. La sortie des volets à fente, à commande électrique, freine l’avion sans lui conférer d’effet « parachute » : pas besoin de trop pousser sur le manche pour conserver son altitude. Avec les volets en position atterrissage, à 30°, l’effet aérofrein se fait cette fois bien ressentir.
En finale, à 60 kts, le vent est désormais légèrement de travers : un peu de manche dans le vent et du pied à l’opposé puis, au seuil de la piste 6, avec le troisième cran de volets et une vitesse indiquée à 55 kts, un creux avant la piste me fait creuser un peu trop ma trajectoire, je remets du moteur, qui répond aussitôt sans inertie, pour toucher peu après le numéro de la piste 06 après avoir décrabé. Trajectoire au sol stabilisée, volets en position décollage, on repart pour un nouveau tour de piste.
Cette fois, je laisse la manette des gaz sur la butée de la puissance maximale continue et on décolle juste un peu plus long que la première fois. En dessous de 600 ft sol, le circuit basse hauteur nous amène rapidement à nous présenter en base puis en finale. Cette fois, la surprise de la première approche passée, la trajectoire est stable et on tient un vario de 300 ft par minute pour un toucher des roues du train principal juste après que l’avertisseur de décrochage a retenti.
Une fois le moteur coupé, mon sentiment général est que le Sonaca 200 est plutôt sain dans son comportement général en vol et qu’il est rassurant de lâcher un élève sur cet appareil. Stable, sans surprises, il semble pardonner beaucoup. Associer au glass cockpit, il paraît un bon outil de formation pour le PPL, puis le CPL-IR-SE pour la future version IFR. Le Garmin 500 Txi, associé à l’indicateur d’assiette Bendix King AeroFlight KI300 en place droite, est une aide précieuse, non seulement pour la formation des élèves pilotes qui vont avoir à gérer des avions complexes équipés eux aussi de glass cockpit dans la suite de leur formation, mais également pour le privé désireux de faire du voyage avec le Sonaca 200.
Confortable, j’imagine sans peine voyager quelques heures à son bord. Avec une autonomie de sept heures (deux fois 65 litres utilisables, pour une consommation de 18 litres par heure), le Sonaca 200 permet non seulement de franchir 1.500 km mais aussi de ne pas avoir à refueler après chaque vol d’instruction : un plein par jour peut suffire.
Après une version glass cockpit, une autre IFR à venir, Sonaca Aircraft semble déborder de projets. Pourtant, la PME reste prudente. « Nous ne prévoyons pour le moment pas de développer de quadriplace », explique Pierre Van Wetter : « il aura fallu cinq millions d’euros pour développer le biplace, jusqu’à son industrialisation, et il nous faudrait quinze millions d’euros pour un quadriplace. Nous nous concentrons donc actuellement sur l’industrialisation des deux versions du Sonaca 200 et travaillons sur d’autres versions, actuellement à l’étude : une version IFR notamment, basée sur le Trainer Pro. Nous réfléchissons également à une motorisation alternative, toujours chez Rotax, avec le 915iS, et nous évaluons l’opportunité d’électrifier le Sonaca 200 pour des tours de piste et de l’acrobatie. »
Des tests de pas d’hélice sont prévus prochainement : actuellement réglé sur un calage pour la croisière, un pas plus fin va être testé. D’autre part, Sonaca Aircraft devrait entamer prochainement une nouvelle campagne de tests sur le Sonaca 200, cette fois pour les vrilles intentionnelles : « Nous avons à présent réalisé une centaine de vrilles afin de couvrir les exercices de décrochage et sécuriser le départ en vrille non intentionnel. La structure étant calculée pour les vrilles intentionnelles, nous programmons de poursuivre la campagne courant 2020. »
Fabrice Morlon
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