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Aviation Générale

Les Thrush 710P de l’Hérault, saison 2

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Frédéric Marsaly

La cellule aérienne de l’Hérault cultive sa particularité depuis plusieurs décennies. Pour attaquer les feux du département, les pompiers disposent de trois avions bombardiers d’eau pour leur usage propre quand les services incendies des autres départements louent préférentiellement des voilures tournantes. Depuis l’été 2022, c’est la société Aria Firefighting qui fournit ces appareils et à l’aube de la seconde saison, son créateur, Pierre Carlotti, a accepté de répondre à nos questions.

Lorsqu’on interroge Pierre Carlotti sur la saison 2022 la réponse fuse : « Elle fut courte mais dense ! » Les monoturbines Thrush 710P capables d’emporter un peu plus de 2800 litres de retardant ont été très sollicités de juillet à août « puis le calme s’est installé ! » Au total : « On a traité 35 feux allant de 1 à 800 ha » soit 175 largages effectués au cours de 117h25 de vols opérationnels. » En vertu d’accords existants, les avions sont aussi intervenus depuis l’aérodrome de Millau sur un feu situé dans l’Aveyron, ce qui a entraîné 32 largages avec trois avions. Le pélicandrome de Béziers a assuré 340 remplissages au cours de la saison, dont 160 en juillet. « la collaboration avec le SDIS 34 a été fructueuse, surtout pour une première saison qui s’est avérée exigeante ! »

Les choses ont même débuté sur les chapeaux de roue puisque l’ouverture de la saison devait avoir lieu en grande pompe le 7 juillet à 10 h avec une cérémonie et la présence de la presse, il a fallu modifier le programme puisqu’à 10h45 les avions ont dû s’envoler pour leur première intervention. Pas de round d’échauffement !

Le choix de ce département de faire appel à des appareils à voilure fixe alors que tous les autres moyens départementaux sont constitués d’Hélicoptères bombardiers d’eau légers interpelle :« Nous sommes clairement complémentaires de tous les autres moyens » et Pierre Carlotti d’ajouter : « nous sommes moins concurrent des HBE légers que des HBE lourds » et de le démontrer : « pour un coût identique à celui d’un Super Puma, je peux mettre en œuvre 18 000 litres immédiatement avec un « play time » 3 fois plus important. « 

Pour armer ces machines, il faut aussi des équipages, et la pénurie de pilotes consécutive à l’attractivité retrouvée des compagnies aérienne touche également ce secteur. « Il nous faut des équipages avec une base technique solide de façon à pouvoir subir la formation tactique des instructeurs d’Aria, anciens, eux aussi, de la Sécurité Civile. » D’où les profils atypiques des deux nouveaux pilotes d’Aria pour la saison 2023 : « Ils sont très expérimentés. Le premier a volé précédemment avec Midair (société qui assurait la mission anti-incendie jusqu’au milieu des années 2010 avant l’arrivée des AT-802F d’Avialsa/Titan puis Aria) et l’autre est un ancien pilote de Canadair de la Sécurité Civile.

Ce que va donner la saison 2023, personne ne le sait encore mais Aria est prête ! La date « officielle » du début de la saison n’est pas encore fixée mais devrait intervenir au début du mois de juin. En attendant, et pour garder un temps d’avance sur le feu, la société s’implique dans deux projets complémentaires.

Un des avions d’Aria passe au remplissage retardant sur un Pélicandrome. © Gwenaël Hagen

Le premier est de mettre en œuvre un appareil de reconnaissance permettant de fournir l’information sur le développement du feu à tous les intervenants :

A titre d’essais, un appareil va être instrumenté pour des essais de cartographie photographique dans le spectre visible et l’infra-rouge (l’IR permet de percer les fumées et de déceler les points chauds ainsi) « Il ne s’agit pas de balancer un flux permanent d’images, mais de fournir aux pompiers dans un format le plus pratique possible une cartographie exploitable et intéressante. Les hommes sur le terrain ont autre chose à faire que suivre du « fire-porn » ! il faut une information efficace. Un fichier KML affichable dans Google Maps comportant un calque et des datas ne fait que quelques ko, il est facilement transmissible par mail vers n’importe quel téléphone ou tablette…. simple, efficace ! » Et donc, dans la logique « simple et efficace » le vecteur équipé sera un ULM.

Aria travaille aussi avec un chercheur du CNRS de l’université de Corse sur un simulateur de propagation de feu prenant en compte l’ensemble des paramètres géographiques, topographiques, météorologiques et intégrant les caractéristiques de la végétation présente. « L’objectif est de tenir à jour une base de données qui permettra, en fonction du lieu et du moment de l’éclosion d’un feu, d’anticiper son développement et la rapidité de sa propagation mais aussi de définir les modalités des interventions et les routes d’évacuation sûres pour les populations locales. » L’idée d’Aria est de « sortir de l’empirique ». Cette solution informatique embarquant de l’Intelligence Artificielle pourrait être prête pour la saison 2024 et proposée dans le cadre du marché défini avec les services incendie du département qui comporte aussi un pan dédié à l’aide à l’intervention et à la prévention.

Les moyens départementaux, en location saisonnière, se montent à un total d’une vingtaine d’aéronefs, essentiellement positionnés sur le pourtour méditerranéen et composés, majoritairement, de HBE légers type Écureuil. Et c’est un dispositif qui fonctionne. Le département voisin, le Gard, où sont basés les Dash et Canadair de la Sécurité Civile, dispose quand même de deux HBE qui, en 2022, ont été extrêmement actifs et seuls quatre feux « ont dérapé » selon les termes du chef du SDIS concerné, en raison de leur démarrage fort. La complémentarité avec les moyens nationaux sur les secteurs très sensibles n’est aujourd’hui plus vraiment un débat. Les orientations choisies par l’Hérault ont aussi largement démontré leur bien fondé.

Frédéric Marsaly


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Frédéric Marsaly

Frédéric Marsaly, passionné par l'aviation et son histoire, a collaboré à de nombreux média, presse écrite, en ligne et même télévision. Il a également publié une douzaine d'ouvrages portant autant sur l'aviation militaire que civile. Frédéric Marsaly est aussi le cofondateur et le rédacteur en chef-adjoint du site L'Aérobibliothèque.

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