Et Berlin succomba à son tour au F-35…

Troisième vente de F-35A en Europe pour Lockheed Martin en moins d’un an : après la Suisse en juin 2021 et la Finlande en décembre 2021, l’Allemagne opte pour le chasseur bombardier furtif américain. C’est un choix industriel et politique majeur.

C’est officiel et c’est la ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht, accompagnée du chef d’état-major de la Luftwaffe, le général Ingo Gerhartz, qui en ont fait l’annonce : l’Allemagne va acheter des F-35. On parle de 35 appareils, pour remplacer ses Tornado qui seront retirés du service à partir de 2025. Une décision qui met un terme à un feuilleton qui dure depuis des années.

L’intérêt de l’Allemagne pour l’avion de Lockheed Martin n’est pas nouveau, mais ces derniers mois le Super Hornet du concurrent Boeing paraissait tenir la corde.

Berlin semblait même prêt à acheter 30 F/A-18 Super Hornet et 15 EA-18G Growler de guerre électronique. C’était sans compter sans l’extraordinaire capacité du F-35 à s’imposer dans les cercles politiques et militaires.

Au coeur de la décision allemande, la bombe atomique « tactique » B-61 mise en oeuvre par certains pays européens de l’OTAN mais dont l’utilisation est soumise à l’approbation américaine.

Peu de monde imagine aujourd’hui l’utilisation sur le sol européen de cette arme, très ancienne dans sa conception : son impact est essentiellement politique, la B-61 servant avant tout à cimenter la participation des pays dans l’OTAN à la mission nucléaire. Les avions américains remplaceront donc à l’horizon 2030 les Tornado dans cette mission particulière mais cruciale d’un point de vue politique.

Le Super Hornet aurait pu tenir ce rôle, à condition de le certifier pour l’emport de la bombe. Il a suffit au Pentagone de décider que l’avion ne serait finalement pas qualifié pour cet emploi pour laisser la voie libre au F-35. Trop facile !

Pour compléter l’acquisition des avions américains, Berlin devrait également recevoir 15 Eurofighter supplémentaires, en version guerre électronique/lutte anti-radar, pour remplacer cette fois les Tornado ECR spécialisés dans ce rôle.

Pour beaucoup d’observateurs, cette commande (et les développements qui y seront associés) est perçue comme un lot de consolation offert à Airbus. Reste la question du programme SCAF : selon la presse allemande, le gouvernement allemand affirme que l’achat des F-35A ne remettra pas en cause le programme d’avion du futur. Le chancelier allemand Olaf Scholz a également écarté ces craintes fin février, estimant qu’à long terme, le projet d’avion européen était une « priorité absolue ».

Malgré ces dénégations officielles, on voit mal ce qui pourrait pousser Berlin à financer un nouvel avion, pour une mise en service à l’horizon 2040, tout en achetant dans le même temps l’appareil le plus moderne de l’arsenal américain.

Frédéric Lert