Solar Impulse construit son second avion solaire

Solar Impulse fait porter ses efforts sur la gestion de l’énergie à bord et l’allègement… mais aussi sur la façon d’aider le pilote à affronter des vols de plusieurs jours. La présentation officielle de l’avion solaire Solar Impulse HB-SIB est prévue pour avril 2014, avant le tour du monde par étapes en 2015.

Dans un hangar de la base aérienne de Dübendorf, près de Zurich, la construction du HB-SIB a bien avancé. Au cours d’une visite organisée par Altran, partenaire « ingénierie » de Solar Impulse, nous avons pu voir l’extraordinaire voilure de 72 m… et son longeron redessiné suite à la rupture du premier. Malgré la plus grande envergure, le surpoids est contenu, notamment grâce à des fibres de carbone de dernière génération (un pli pèse 25 g/m2, résine comprise) et à l’abandon des saumons, jugés inutiles sur le HB-SIA.

L’extrados est en train d’être couvert de ses cellules photovoltaïques. Leur épaisseur a été limitée à 135 microns. Avec leur rendement élevé, 22 %, ces cellules alimenteront des batteries dont la densité énergétique a été poussée à 260 Wh/kg.

Le fuselage avant sera bientôt achevé. Sa structure sera recouverte d’une mousse, mise au point par Bayer, capable de jouer le rôle d’isolant thermique et d’adopter la forme aérodynamique souhaitée. Plus spacieux (4,5 m3), le cockpit doit permettre aux pilotes du tour du monde – successivement Bertrand Piccard et André Borschberg – d’affronter les vols transocéaniques. A la vitesse modeste du Solar Impulse, ils prendront trois à cinq jours. « Nous avons un siège classe affaires et des toilettes à bord », sourit Bertrand Piccard en montrant le dossier inclinable à 180° puis en soulevant une partie de l’assise. La colonne reliée au volant a été repoussée vers le nez de l’avion, libérant ainsi de la place pour les jambes. Le pilote pourra donc mieux bouger pour éviter l’engourdissement. En cas d’urgence, il pourra évacuer le cockpit en enlevant un panneau latéral.

Les commandes des quatre moteurs électriques restent du côté gauche. L’instrumentation est plus complète que dans le HB-SIA avec, en particulier, plus de place dévolue à l’affichage de la navigation. En outre, les ingénieurs ont introduit des redondances.

Un système SAS d’augmentation de la stabilité (une sorte de pilote automatique simplifié) pourra commander l’avion sur ses trois axes. Un niveau au dessus, un système MAS de surveillance et d’alerte supervise le pilote, l’avion… et le SAS, indique Christian Le Liepvre, responsable du partenariat Solar Impulse chez Altran. En cas de déviation importante par rapport aux paramètres nominaux, le MAS alertera le pilote suffisamment tôt, même si ce dernier se repose.

Côté réserves, l’alimentation prend plus de place que dans le HB-SIA. L’eau sera recyclée. Les pilotes mangeront les mets de leur choix à condition qu’ils aient été approuvés, du point de vue nutritif et digestif, par le médecin de l’équipe. Le HB-SIB emporte aussi des équipements de survie en cas d’accident. Pour les phases de vol à haute altitude sont prévus un générateur Obogs d’oxygène et des bouteilles du même gaz. Le générateur est conçu par Air Liquide. Il s’inspire de ceux présents dans les avions de combat mais utilise un compresseur électrique.

La gestion du sommeil est bien sûr un des plus grands défis auxquels est confrontée l’équipe de Solar Impulse. L’idée est de faire une dizaine de siestes de 20 minutes chacune sur une période de 24 heures. Il s’agit alors de favoriser les « entrées » et « sorties » de ces périodes. Bertrand Piccard compte se servir de ses connaissances en hypnose. Prendre des pilules ? « L’inconvénient, c’est que les pilules d’éveil vous empêcheront de dormir plus tard et vice-versa », répond le pilote et psychiatre. Des comprimés de caféine seront réservés aux cas d’urgence.

Du 17 au 20 décembre, Bertrand Piccard pourra tester ces techniques lors d’un vol virtuel de 72 heures dans un simulateur de mission installé à Dübendorf. Il sera bardé de capteurs : des électro-cardiogrammes et électro-encéphalogrammes seront réalisés en continu.

Thierry Dubois