Le transport aérien d’organes s’organise en France

Depuis le 1er janvier 2013, le transport aérien de greffons et des équipes chirurgicales accompagnatrices est centralisé auprès du groupement solidaire de deux compagnies aériennes : Oyonnair basée à Lyon Bron et LAA Luxembourg Air Ambulance. Objectif : optimiser les temps d’acheminement entre les centres hospitaliers préleveurs d’organes, et les établissements greffeurs.

Révolution en France sur le marché des transports d’organes. « Jusqu’à présent, explique Sandrine Denjean, coordinatrice d’UniHA Le Groupement de Coopération Sanitaire UniHA est un réseau coopératif d’achats groupés de 56 établissements hospitaliers publics français, dont 32 CHU-CHR et 24 centres hospitaliers. Sa vocation est d’optimiser les achats de ces établissements. UniHA est devenu le premier acheteur public français, achetant en 2012 pour 1,8 milliard d’euros au service de ses adhérents et générant près de 50 millions d’euros de gains. au Centre Régional Universitaire de Montpellier qui a passé ce marché avec Oyonnair et LAA, il revenait à chaque équipe chirurgicale d’organiser leur propre transport, de s’assurer de l’ouverture nocturne des aéroports et de la disponibilité d’avions auprès des compagnies. Car en France, c’est traditionnellement toujours la même équipe médicale qui prélève l’organe (cœur, poumon, foie, pancréas) et qui effectue la greffe. D’où l’importance de cette nouvelle organisation de transport aérien. En fait, avec Oyonnair et LAA, il existe désormais un véritable centre de régulation qui concerne 19 CHU en France Amiens, Besançon, Bordeaux, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, Lille, HC Lyon, AP-Hôpitaux de Marseille, Montpellier, Nancy, Nantes, Nice, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse, Tours.– ne sont pas concernés Limoges et Paris – autorisés à effectuer des greffes, soit environ 700 missions par an. »

Des missions effectuées généralement la nuit, entre 23h00 et 6h00, car c’est à ces moments là que les blocs opératoires sont le plus disponibles.
Le groupement solidaire constitué d’Oyonnair et de LAA (Luxembourg Air Ambulance) vient ainsi de créer ce centre de régulation nationale. Il est composé d’une dizaine de régulateurs associant des logisticiens et des infirmiers. Il devient l’interlocuteur unique des équipes chirurgicales des différents centres hospitaliers adhérents ainsi que des compagnies aériennes.

L’Agence de la biomédecine L’Agence de la biomédecine est une agence publique nationale de l’État créée par la loi de bioéthique de 2004. Elle exerce ses missions dans les domaines du prélèvement et de la greffe d’organes, de tissus et de cellules, ainsi que dans les domaines de la procréation, de l’embryologie et de la génétique humaines.
, qui a la responsabilité de l’attribution des greffons sur l’ensemble du territoire français, est évidemment en contact étroit avec le centre de régulation afin de fournir aux régulateurs de ce centre une vue d’ensemble des missions à venir. Selon Cyril Lopez, acheteur au CHU de Montpellier, « la formule française de régulation et de transport de greffons est assez en avance par rapport à ce qui se fait dans d’autres pays européens. Nous somme un peu pionniers en la matière ! »

Les deux transporteurs concernés sont particulièrement habitués aux missions médicales. Oyonnair, fondée à Lyon en 1989 par Michel Maradan, dispose d’une flotte de deux Cessna Citation, dont un Mustang mise en service en 2009, et de deux Beechcraft (B200 et C90A). Depuis sa création, Oyonnair a effectué environ un millier de missions sanitaires.

Quant à Luxembourg Air Ambulance, elle appartient au groupe LAR (Luxembourg Air Rescue) fondée en 1988 en tant qu’association humanitaire. Spécialisé dans le sauvetage aérien héliporté au Luxembourg, dans la grande région (Benelux, Nord-est de la France, Sud-ouest de l’Allemagne) et dans le rapatriement sanitaire dans le monde entier, LAR exploite cinq hélicoptères de sauvetage (ainsi que la gestion de l’hélicoptère de Police Grand Ducal) et quatre avions sanitaires de type Learjet 45XR et 35A. Depuis ses débuts opérationnels en 2007, LAA a assuré plus de 500 missions de transport de greffons.

Pour le docteur Olivier de Pesquidoux, directeur Recherche et Innovation au CHU de Nancy, et membre du groupe expert UniHA, « Les points forts de ce marché sont l’attribution d’un lot national, ce qui va dans le sens des préconisations de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) et du ministère des Transports, et l’intégration d’une régulation centralisée. Jusqu’à présent chaque établissement travaillait certes très bien dans son coin, mais sans coordination nationale et donc sans vision globale. C’est ce qu’apporte désormais la nouvelle organisation. »

Tout repose en effet sur la vitesse et les délais d’ischémie (diminution de l’apport sanguin artériel dans un greffon) c’est-à-dire le temps entre le prélèvement et la greffe. Pour un cœur, ce délai est de 4 heures. Il est de 6 heures pour un pancréas et pour un poumon. Il est compris entre 9 et 12 heures pour un foie. C’est ainsi que les greffes du rein ne sont pas concernées par cette organisation car le délai d’ischémie de cet organe est de 24 heures, ce qui laisse la possibilité de mettre en place d’autres moyens de transport.

Avec les appareils d’Oyonnair et de LAA, les délais d’acheminement en France se réduisent considérablement. Par exemple, il ne faut pas plus de 55 minutes en Learjet pour relier Montpellier et Rennes ou Marseille et Nantes et au maximum 2h50 en Beech pour couvrir la distance entre Strasbourg et Brest ou entre Biarritz et Strasbourg.

Bruno Rivière