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Aviation Générale

La FFPLUM, 40 ans déjà…

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Gabriel Gavard

La fédération français d’ULM a été créée le 4 février 1981. Comment une poignée d’hommes volants, de surcroît rêveurs, a pu inventer une nouvelle aviation. L’époque était heureusement fertile aux utopies… Souvenirs.

Étonnante création de Francis Rogallo, ingénieur spatial passionné de cerfs-volants, l’aile delta a provoqué il y a un demi-siècle la naissance du vol libre, et la passion de milliers de nouveaux visiteurs du ciel, sous de simplissimes planeurs simplement tributaires d’une forte déclivité. Certes, Barry Palmer avait réussi dès 1967 à voler avec un delta motorisé, et le Moltodelta de Jean-Marc Geiser était opérationnel dès 1975, mais ce sont d’autres solutions, bien plus bricolées et simplement accrochées sous les deltas, qui ont commencé à se répandre à la fin des années 1970, sous l’impulsion de « libéristes des plaines » désireux de solutions d’envol épargnant de longs trajets vers les reliefs.

À ces pétaradences initiales a vite succédé la stridence des premiers pendulaires, les bien-nommés Mosquito, commercialisés à partir de 1979. Les médias l’ont très bien entendue, la maréchaussée aussi, qui commençait à distribuer les PV.

Établi le 26 juin 1980, le premier relevé d’infraction par l’Aviation civile d’un « vol sans titre aéronautique à bord d’un aéronef dépourvu de documents réglementaires » ne provoque heureusement qu’une exigence pour les pilotes d’ULM du brevet théorique de pilote planeur.

Les 1er et 2 novembre suivants, une rencontre de libéristes à Blois se double d’une présentation d’ULM galvanisante pour de nombreux intéressés. Mais les pouvoirs publics s’inquiètent. Il est plus que temps aux premiers ulmistes de s’organiser.

Questionnements fédérateurs

Le 16 novembre 1980, les Assises ULM organisées à Lyon réunissent une soixantaine de professionnels et amateurs, en présence de deux entités concernées, la FFVL et le RSA. Est tout d’abord établie une longue liste, non limitative, des problèmes posés par le développement et la pratique de l’ULM : enseignement, brevet, assurances, réglementation, homologation, domaine de vol, nuisances, terrains, ambitions…

Et vient la question cruciale, « si tous acceptent, voire désirent, une représentation officielle, faut-il une fédération ou une intégration à la FFVL ou au RSA » ? Les deux écartent l’option, mais la FFVL propose de calquer le statut ULM sur le sien : « la FF(ULM) a pour objet d’organiser, de diriger et de promouvoir la pratique du vol ultraléger motorisé, notamment par la création d’associations et d’écoles, la mise au point d’un enseignement spécifique, le développement d’une meilleure sécurité, l’étude de programmes et règlements sportifs et l’étude de tous les problèmes concernant l’ULM« .

Dans le sillage des Assises, un premier Comité directeur est organisé 18 janvier 1981 au CREPS de Mâcon.

Et là, « dans les hurlements d’une assistance libertaire complètement déjantée« , Alain Dreyer est porté à la présidence de la fédération française de planeur ultraléger motorisé, qui est officiellement créée le 4 février 1981.

Basée en Avignon, à Montfavet, la fédération s’active. Rapidement des solutions d’assurance sont mises en place (dont la RC obligatoire pour voler en ULM), les brevets minimums établis (théoriques planeurs, avion ou hélicoptères, même périmés), tout comme le cadre des « laisser-passer » pour les machines (de moins de 150 kg, monoplaces ou biplaces, d’une charge alaire inférieure à 15 kg/m2 et « pouvant voler à 40 km/h sur un aller-retour d’une centaine de mètres« ). Une « réunion fédératrice » est organisée à Blois. Le public comme les constructeurs y adhérant, elle s’installera sur un rythme annuel.

Une horde en mutation

La première année de la FFPLUM est aussi celle d’une évolution majeure, l’arrivée en force des multiaxes Weedhopper, Vector 600, Quicksilver, Rotec ou Goldwing pour la plupart importés par des pilotes d’avions ravis la nouvelle liberté motorisée, mais peu enclins à penduler.

En juin 1981, on se presse au Salon du Bourget autour de quelques-unes de ces machines exotiques prometteuses d’envols faciles. Au fil des mois, le dollar fort et de talentueux créateurs génèrent des productions plus proches : Libellule, Baroudeur, Pipistrelle, Microstar ou Pathfinder.

La FFPLUM milite déjà pour le silence avec un prix de 1.000 F pour l’appareil le moins bruyant du rassemblement de Blois 1981.

L’innovation ultralégère, hors de toute certification, se distingue aussi avec les premiers parachutes globaux (ULM et occupants) commercialisés dès 1982.

L’exception française

Au fil des mois de 1982 et des colonnes des magazines, a été annoncée pour septembre une grande course d’ULM de Londres à Paris. Des 76 concurrents inscrits pour ce Londres-Paris (quasi tous pilotes d’avion expérimentés), 68 prennent le départ et 59 terminent glorieusement à Bagatelle devant 80.000 spectateurs. Très bien mené et très suivi par l’ensemble des médias, l’évènement porte l’ULM en vedette du moment.

Peu après, le premier Salon européen de l’aviation ultralégère à Lyon-Bron témoigne à son tour de l’engouement pour le nouveau sport aérien. Mais hélas, il se clôt sur un accident mortel. C’est là une première douche froide médiatique pour l’ULM français.

Autour de nous, les autorités peuvent appliquer des politiques d’ignorance (restrictive en Espagne, positive en Italie), de surveillance (Belgique), ou bientôt de rejet en Suisse. Les ULM britanniques et ouest-allemands n’échapperont pas à des certifications, heureusement allégées et déléguées en GB une association (BMAA) proche de l’activité, et en RFA à une structure (DULV) proche des producteurs.

Dans un monde où l’ULM est globalement loin d’être admis, la France brille par l’intelligence de sa réglementation basée sur l’auto-responsabilité des pratiquants, portée par sa fédération forte de 1.650 adhérents fin 1982.

Le 20 mars 1983, l’assemblée générale annuelle de la FFPLUM s’ouvre à Satolas sur le constat d’une profonde mutation : c’en est fini de l’ambiguïté initiale confondant pratiquants, constructeurs et professionnels, avec une bonne majorité de ces derniers au conseil d’administration. Car, face à la FNA qui récupèrerait bien l’ULM, il est devenu indispensable pour la FFPLUM d’obtenir la reconnaissance officielle du ministère de la Jeunesse et des Sports. La formation s’est aussi élevée en préoccupation majeure, car la première cause identifiée d’accidents reste l’inexpérience des pilotes.

Ces année-là sont propices à l’utopie, et l’ULM est dans l’air du temps. Au point que le gouvernement l’adoube « en moyen d’ouverture de l’aviation au plus grand nombre » lors du conseil des ministre du 1er juin 1983. L’excellent président Dreyer fait ainsi voler Edwige Avice, ministre de la Jeunesse et des Sports.

L’esprit perdure

Mais l’insouciance n’est plus de mise après les décès de trois pilotes au cours du Grand Prix de France ULM. À l’automne, la triste addition de 1983 s’élève à 10 morts et 40 blessés pour 173 accidents avec un parc estimé à 3.000 appareils.

L’administration présente un nouveau cadre, qui restera en vigueur jusqu’en 1998, portant la masse à vide des biplaces à 175 kg max. La licence de pilote d’ULM peut être acquise dès 15 ans après la délivrance du brevet liée à un examen théorique et à l’autorisation de vol seul à bord délivrée par un instructeur habilité.

Alain Dreyer terminera sa présidence en 1989 : « Notre agrément Jeunesse et Sport a été obtenu de justesse, petit à petit la fédération est devenue mature et son fonctionnement démocratique. Alors j’ai trouvé qu’il était temps de partir... » François le Mouton lui succédera jusqu’en 1994, suivi par Jean-Paul Dutoit.

En 1998, la FFPLUM compte près de 7.500 adhérents quand Dominique Méreuze accède à sa présidence. L’emblématique président portera « l’esprit ULM » fédérant passion, responsabilité et liberté jusqu’à sa disparition en 2015. La FFPLUM compte alors de plus de 15.000 adhérents. L’ascendance s’est prolongée durant toute la mandature actuelle avec l’équipe présidée par Sébastien Perrot, en place jusqu’à l’assemblée générale en mars prochain.

Gabriel Gavard

 

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Gabriel Gavard

Pilote avion et ULM depuis 1984, c’est par la construction amateur et les revues techniques (Fox-Echos, qu’il a créée, puis Experimental dont il sera rédacteur en chef) que Gabriel Gavard a abordé la presse aéronautique en 1994. Rédacteur en chef d’Aviasport de 2005 à 2011 et d’ULM-Info de 2017 à 2020, collaborateur à Aerobuzz.fr depuis 2012.

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  • Bonjour,
    Corrigez moi si je me trompe, mais j'ai trouvé la FFPLUM beaucoup plus proactive que la FFA et le RSA pour refaire voler les ULM après le confinement.
    Quand d'autres déjà citées surinterprétaient les communiqués de la DGAC qui elle-même restreignait avec retard les décrets officiels, la FFPULM collait à la loi et dissipait avec ses avocats les craintes qu'agitaient certains inquiets de ne pas être assurés en volant après le deconfinement...
    Bref, elle faisait valoir les intérêts de ses membres dans le respect des décrets gouvernementaux.
    👍

    • Le RSA est la fédération des constructeurs et collectionneurs d'avions. Il a fait auprès de ses membres ce qu'il fallait dans son domaine de compétences.

  • @Arminius, qui a écrit :
    "Ainsi, quand l’état concevait l’avion école sous la forme du Norecrin,"
    Où avez-vous vu de tels avions école dans les années 50 lorsque le Norécrin est sorti ? Un avion-école tout métallique à train tricycle, rétractable et hélice à pas variable, triplace issu comme son grand-frère le Noralpha des cartons de Willy Messerschmitt avec le même démarreur à inertie que le Me109

  • Pas un seul mot sur le " Pou du Ciel " , conçu en Charente-Maritime, à St Romain de Benet par Henri Mignet en 1932 ! Il fu vraiment le premier ULM reconnu, et il vole encore, avec des performances remarquables !

    • Le Pou du Ciel dont je suis fan a mis en lumière un mouvement commencé un peu partout à cette époque (fin des années 20), qui allait devenir l'aviation populaire de 1936.
      Avant le HM-14 était déjà le HM-8, et une quantité très importante de petites avionnettes monoplaces en tout genres utilisant des moteurs de 25 à 40 chevaux. Même les grands avionneurs tel Messerschmitt et Klemm en allemagne ont sortis des avionnettes. Les constructeurs amateurs étaient nombreux partout en europe à travailler en parallèle sur ces petits avions donnant le ciel à tous. On peut en voir de nombreuses un peu partout, à Bruxelles, à Angers, et même en état de vol à la Shuttleworth Collection en angleterre.
      Mais oui, vous avez raison, Henri Mignet avec son bouquin ont mis le Pou du Ciel dans toutes les maisons de France et de Navarre ! (en 1934-35)

  • @Arminius
    "Le seul intérêt de l’ulm des débuts est d’avoir imposé une nouvelle catégorie administrative d’aéronefs à une administration arqueboutée sur une règlementation dépassée par les évènements. "

    ? vous ne retenez que cela ?

    Ouvrir le vol a de citoyens peu argentés, innovants et passionnés...
    Faire decouvrir le vol a basse vitesse, economique, et la liberté de creer sa piste, se poser dans un champ, c'etait cela l'ULM des debuts, une machine volante LEGERE, SIMPLE et FACILE a piloter et entretenir.

    • Oui et personnellement pour moi ayant un œil à 2 dixième, cela m'a permis de mettre en œuvre mon rêve inaccessible de voler et ainsi de connaître cette troisième dimension qui nous ouvre l’esprit. Mon premier vol ( tout confondu ) fut mon premier cours sur pendulaire, 4h20 de cours et j’ai été lâché seul...Record mondial je pense lié à ce rêve en grande parti comblé ( je désirais être pilote de chasse et avait les aptitudes pour atterrir sur le Foch puis le Charles...)
      Bon vol à tous.

      • "... et avait les aptitudes pour atterrir sur le Foch puis le Charles…)"
        Et l'avion pouvait revoler après ? :-)

    • Vous dites finalement la même chose qu'Arminius... A mon idée, ce que vous dites sont les conséquences assez directes de ce que Arminius parle.
      En gros, Arminius cible la "cause", et vous les "conséquences" heureuses (recherchées !).
      Pour voler pas cher, partout, voire chez soi, il faut que la réglementation le permette. Faire sauter les coûts dus aux réglementations débordantes fut la meilleure chose obtenue par ces pionniers. L'aviation qu'on aime, simple. T'as envie de voler ? Vole !

      • L'ulm d’aujourd’hui suit la même évolution que la petite aviation certifiée,avec des périodes de complexification puis une simplification salutaire. Ainsi, quand l'état concevait l'avion école sous la forme du Norecrin, les usagers inventaient le D9, le D11, le CP 30, etc. qui eux ont duré, duré... et fait des petits de plus en plus pondéreux. Aujourd'hui, combien y-t-il d’écoles utilisant des avions de moins de 100 cv ? La faute n'en n'est pas qu'aux utilisateurs, la règlementation gérant l'espace aérien, la formation, le suivi de navigabilité induisent des contraintes qu'un brave D112 aurait bien du mal à remplir s'il devait être certifié aujourd'hui. Les boulevards de bitume construits dans les années 70, les espaces de classe A, B etc imposant radio, chaine ATC, démarreur électrique ont un cout en masse et en prix qui fait boule de neige au final. Pour les ULM, chaque équipement "indispensable" (même si la technologie l'a allégé) par le nombre nécessaire règlementairement la masse ne peut redevenir ce qu'elle était jadis. Le postulat de base du vol "libre" qui a enfanté de l'ulm peut encore exister, à condition d'accepter de mettre en place des infrastructures adaptées (que le contribuable ne financera pas) et que les avions légers redeviennent prioritaires dans le partage des bases couches de l'atmosphère... Il ne me parait pas suffisant aujourd'hui de s'en tenir à la seule classification des machines pour pouvoir parler d'avenir, il faut aussi voir du coté des infrastructures (voyez comme la précarité des AOT nous rend vulnérables), et aussi revendiquer notre espace aérien. L'usure est aussi ce ce coté là.

      • Oui, c'est une dérive regrettable, mais je vois aussi cette dérive comme un signe que les avions certifiés ne répondent plus aux besoins de leurs utilisateurs. Ou plutôt que l'utilisation d'un avion certifié est devenue trop complexe pour rester un loisir.
        Et si on me rétorque accidentologie, je réponds que je ne vois pas vraiment plus ou moins d’accidents en ULM "modernes" qu'en "certifiés".
        Alors il y en a pour tous les goûts. Des ULM aussi cher qu'un certifié mais au coût d'utilisation bien moindre. Des ULM légers et économique, pour se promener, des pendulaires... Je pense même aux avions "Part 103" aux USA qui ne demandent même pas de brevet de pilote si j'ai bien compris ! Des ultra-ultra léger qui font un peu rêver quand même...

      • Là où ça c'est gâté c'est que les ULM actuels sont fabriqués comme les avions traditionnels par des industriels et leur coût a explosé. Il ne reste plus aux pilotes de ces aéronefs que l'avantage de ne pas avoir de visite médicale à passer tous les ans. Ils sont aussi lourds que les avions certifiés. Ils ont gagné d'avoir des moteurs conçus plus récemment

  • Le seul intérêt de l'ulm des débuts est d'avoir imposé une nouvelle catégorie administrative d'aéronefs à une administration arqueboutée sur une règlementation dépassée par les évènements. Pour le reste, bien des pionniers n'ont fait que redécouvrir l'aérodynamique et la construction aéronautique comme l'ont fait les pionniers, les vrais, ceux du début du XX° siècle. Bien des "découvreurs" se sont heurtés aux réalités physiques, décrétant que leurs faiblesses étaient des particularités et que les lois de la nature pouvaient aisément être maitrisées plus par leur "intelligence" que par de solides connaissances en technologie et en aérodynamique. C'était une période ou la communication, portée par d'enthousiaste "journalistes" permettait au "mouvement" d'exister, bien plus que la fiabilité et les performances des machines plus ou moins volantes menées par des rêveurs plus ou moins pilotes. Le tri s'est fait tout seul pour les unes comme pour les autres...

  • Ils ne le savaient pas mais ces "pionniers rêveurs" ont contribué à "faire" l'aviation du futur, que l'on connait aujourd'hui, motorisations comprises.
    J'évoque ce sujet d'actualité, pour les enjeux de frugalité de la consommation et de l'atténuation du bruit (en passant https://www.bva-group.com/sondages/ville-ideale-millenials/) dont le Rotax est l'enfant.
    Pour mémoire, le Rotax famille 91xxx est retenue pour être le "bouilleur" des nouvelles générations de machines certifiées...
    Merci et respect aux pionniers et "flute" aux Cassandre qui critiquent plus facilement qu'ils ne produisent.

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