De glace et de lumière ou le merveilleux voyage de l’avion solaire

A l’heure où Solar Impulse multiplie ses vols d’essai, notamment dans les chaleurs du Maroc, il y a un petit hydravion solaire qui part conquérir le nord du monde, vers la calotte glaciaire… Mais c’est un roman, juste un roman ! « De glace et de lumière », d’Anne Reale et de Thierry Vigoureux vient de sortir…

« Il était une fois l’histoire de l’Oiseau solaire, un petit avion capable de traverser le monde à l’énergie solaire. Le pilote est pris dans une terrible tempête arctique et doit se crasher sur un iceberg… Et la belle fiancée groenlandaise court chercher son téméraire de pilote… » L’histoire racontée par Anne Reale et Thierry Vigoureux dans leur dernier roman « De glace et de lumière » (Pascal Galodé éditeurs) aurait pu commencer ainsi. Mais les auteurs, tous deux grands connaisseurs des choses de l’air et des froideurs glaciales des sommets alpins et du Groenland sont allés beaucoup loin que le conte de fée.

Même si, dans le fond, il y a du « merveilleux voyage de Nils Holgersson » dans ce roman. Au départ, une réalité : l’avion solaire existe déjà. Solar Impulse est en train de prouver qu’il est possible de capter la lumière du soleil pour la transformer en énergie, elle-même capable de propulser un avion. Et puis il y a la connaissance – et la passion – des milieux enneigés des Alpes et des glaciers du Groenland que les auteurs partagent ici avec une plume remarquable, à la fois légère et précise. Le mélange des deux, technologie solaire et monde polaire, donne la trame du roman.

Roman au cours duquel le petit prototype solaire décolle de Megève pour l’aventure du Groenland avec à son bord Stephan, son concepteur, et Estelle l’intruse, celle qui tente de prendre la place d’Anya dans le cœur du jeune héros. Mais Anya est aussi à l’origine de l’Oiseau solaire et elle connaît le Groenland et ses icebergs secrets mieux que quiconque. Intrigues !

Assurément, il y a du Frison-Roche dans cette histoire. Comment ne pas se souvenir du fameux « Rendez-vous d’Essendilène » où l’auteur de « Premier de cordée » emmène ses lecteurs dans les chaleurs torrides du Sahara. Comme Frison-Roche, Anne Réale et Thierry Vigoureux connaissent et aiment les milieux hostiles des glaciers. Et l’odyssée de l’Oiseau solaire – comme celles des livres de Frison-Roche – est tout-à-fait réaliste. Les auteurs précisent même que « toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé… a donc parfaitement lieu d’être. »

Le roman se lit d’un trait, et il faut accepter d’entrer dans la peau du personnage principal, l’avion lui-même, véritable icône vivante dont le destin et ceux d’Anya et de Stephan fusionnent. D’ailleurs, notre pilote Stephan lui parle sans cesse : « embrasse la montagne, mon avion, c’est un mirage ! » (page 46), « allez, mon oiseau, tu ne vas pas me lâcher maintenant ! » (page 53), etc. Celui qui a déjà tâté du manche à balai se souviendra… et comprendra ! Le pilote appréciera aussi les descriptions détaillées de l’avion, ses performances, ses limites. Il aimera le réalisme avec lequel sont racontées les différentes phases des vols. Il partagera les émotions intimes de Stephan à bord : comment ne pas mentionner la fabuleuse et majestueuse séquence « vertige » (pages 282 et suivantes) dans laquelle Stephan – le « gars-qui-a-peur-du-vide » – raconte sa première appréhension du trou noir béant ? Chaque pilote se reconnaîtra ici.

Bruno Rivière