L’escadron de chasse La Fayette, du Nieuport au Mirage 2000N

Des Nieuport biplans monomoteurs en bois et toile de la Première guerre mondiale aux puissants Mirage 2000N, en passant par les Dewoitine, Spitfire, Ouragan et Mirage IIIE, Alain Vezin raconte l’histoire de l’escadron de chasse Lafayette aux éditions ETAI.

Voilà un très beau livre qui satisfera non seulement les passionnés de l’Armée de l’Air française, mais plus largement tous les passionnés d’Histoire en général. Avec « L’escadron de chasse La Fayette » (Editions E-T-A-I) Alain Vezin, son auteur, entraine les lecteurs dans les coulisses de la fameuse escadrille 2/4, créée en avril 1916 à Luxeuil et composée au départ de six Américains, volontaires pour s’engager dans l’Aviation française dès la Grande Guerre. D’abord appelée « Escadrille américaine », elle prend le nom d’ « Escadrille La Fayette » en décembre 1916 puis « Escadron de chasse 2/4 La Fayette » Référence au marquis Gilbert du Mortier de La Fayette qui, de 1775 à 1781 combattit les Anglais aux côtés de Georges Washington pour la guerre d’indépendance
en novembre 1949. Des dizaines de types d’avions ont été utilisés par l’escadron : Nieuport, Spad, Nieuport-Delage, Loire-Gourdou-Leseurre, Dewoitine, Curtiss, Spitfire, Vampire, Ouragan, Mirage IIIE et 2000N…

Alain Vezin, historien et ancien pilote de chasse, est un spécialiste reconnu des grandes épopées militaires. Il a déjà publié un superbe livre sur l’avion de chasse français Jaguar « Jaguar, le félin en action » et un autre beau livre également consacré au « Régiment de chasse Normandie-Niemen » (Editions E-T-A-I). C’est dire que l’auteur dispose de sérieux réseaux d’information et que ses ouvrages font désormais référence.

« L’escadron de chasse La Fayette » est un monument : pas moins de 320 pages grand format (23,5 x 31 cm), près de 500 photos en couleurs et en noir et blanc, dont certaines inédites – par exemple (page 311) cette image assez rare de deux Mirage 2000N en vol, dont l’un est en cours de ravitaillement par un Tristar de la RAF – et des centaines de citations d’anciens de l’escadron.

Contrairement à la plupart des livres d’histoires dans lesquels on ne trouve finalement qu’une longue énumération de faits plus ou moins bien racontés, quand ce n’est pas une prise de position de l’auteur qui entraîne le lecteur dans son interprétation de l’Histoire, l’ouvrage d’Alain Vezin a su trouver le ton juste entre traité d’histoire et anecdotes. Bien sûr, on ne lit pas tout-à-fait « L’escadron de chasse La Fayette » comme on lit un roman, mais, suivant ou pas le découpage chronologique qu’a choisi l’auteur pour présenter l’escadron, on plonge dans l’univers de la Grande Guerre, de l’entre-deux-guerres, de la Bataille de France, des campagnes de Tunisie ou d’Indochine, de l’installation des pilotes et des avions du 2/4 à Friedrichshafen, à Bremgarten ou a Luxeuil…

Le livre, s’il permet aux « anciens » les plus âgés de revivre des moments terribles doit aussi être mis entre les mains des plus jeunes. Qui de la génération « Y » peut seulement imaginer les gestes héroïques des pilotes d’il y a 20, 40 ou 100 ans ? Encore un exemple (page 33) : « … Je commençai ma fuite éperdue. Le vol de rapace (des chasseurs allemands) s’acharna un peu au-dessous et en arrière de moi, tandis que je m’efforçais de battre mon propre record d’altitude. L’aiguille de l’altimètre passa 6 200 mètres et ne bougea plus : c’était le plafond, supérieur d’environ 200 mètres à celui des appareils ennemis. Ils s’efforcèrent de me mitrailler, mais pour cela il leur fallait tirer sur le manche pour me viser. A une telle hauteur, l’avion se mettait immédiatement en vrille. Enfin, je dépassai les tranchées. Les Allemands abandonnèrent la chasse. Alors, par suite de l’altitude, je perdis connaissance pendant quelques tours de vrille. Toutefois, je repris mes sens grâce aux courant d’air et arrivai sans encombre à Dunkerque… »

Bruno Riviere