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Michel Barry ou la sagesse d’un vieux pilote

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Bruno Rivière

Les chroniques de Michel Barry consacrées à la sécurité de l’aviation générale et publiées chaque mois dans « Info-Pilote », viennent d’être éditées en livre. L’occasion pour Aerobuzz.fr de parler sécurité avec Michel Barry Michel Barry, 70 ans, pilote d’essais, vole toujours sur différents types d’avions, du monomoteur au biréacteur d’affaires. Son carnet de vol indique plus de 10 500 heures de vol. , dont l’obsession est de convaincre les jeunes pilotes que le pilotage d’un avion, ce n’est pas la même chose que la conduite d’une voiture…


Selon vous, quels sont aujourd’hui les points faibles de l’aviation générale, en matière de sécurité ?
Le plus gros point faible, que je constate chaque jour davantage, c’est que dans les aéroclubs, les jeunes pilotes ont une certaine tendance à piloter comme s’ils conduisaient leur voiture. En accidentologie aérienne, la majorité écrasante des crashs sont le résultat d’une mauvaise prise en main de l’avion. Il faut absolument que les pilotes s’imprègnent de leur avion, qu’ils en connaissent les systèmes, les mécanismes, les moindres détails, les comportements… Le rôle des instructeurs, mais aussi de l’ensemble de l’encadrement des aéroclubs, c’est de « déconditionner » les jeunes de la voiture. Non, un avion, ce n’est pas une voiture ! Sur le plan du droit, un pilote qui vient d’être breveté (disons qu’il a une quarantaine d’heure de vol) peut tout-à-fait entreprendre un long voyage qui lui fera traverser la France avec trois passagers dès sa licence en poche. En pratique, il lui manque tout de même un minimum d’expérience, de bon sens… Il suffirait parfois d’un échange avec un « ancien » pour éviter qu’un vol débouche sur un accident !

Quelles solutions préconisez-vous pour améliorer la sécurité de l’aviation générale ?
En regardant de près les accidents aériens, je constate que les pilotes, évidemment surtout les jeunes pilotes, ne sont pas assez encadrés. Pourquoi par exemple ne pas instaurer une forme de « parrainage » des jeunes pilotes par un instructeur qui effectuerait une sorte de « suivi » du jeune breveté ? Et quand je pense aux jeunes pilotes, j’inclus les personnes plus âgées qui arrivent plus tard à l’aviation générale. Je n’ai pas peur d’affirmer qu’il manque parfois un peu d’humanité et de paternalisme au sein des aéroclubs. Pire, j’ai peur que certains aéroclubs se comportent davantage comme de simples loueurs d’avions, plutôt que comme des écoles de formation à la passion du pilotage. Bien sûr, je connais des aéroclubs qui intègrent cette notion d’accompagnement des jeunes pilotes.
J’ajoute que les progrès technologiques (GPS, Glass Cockpit, PA…) sont de merveilleux vecteurs d’amélioration de la sécurité aérienne. Mais à la condition formelle que ces technologies ne changent pas le comportement ni les conditions d’exploitation du vol. En clair, ce n’est pas parce que le pilote VFR maitrise parfaitement son Garmin et son PA qu’il peut se permettre de voler en IMC.
Quant à légiférer, je n’y suis pas forcément favorable. Il y a déjà suffisamment de règles dans le transport aérien et l’aviation générale pour en ajouter une autre. Je le répète, si chaque pilote était mieux encadré tout au long de sa progression – et dans ce domaine, on progresse toujours – le nombre d’accidents serait bien réduit.

Comment choisissez-vous le thème, chaque mois, de votre rubrique ?
Essentiellement en fonction de l’actualité. Quand je dis actualité, c’est surtout par exemple l’actualité des saisons. En hiver, je mets l’accent sur les vols en conditions givrantes. En été, sur les démarrages moteurs chauds. Et aussi bien sûr en fonction des événements : incidents, accidents, changement de réglementation…

Pensez-vous que vos rubriques contribuent à améliorer la sécurité des vols ?
Si mes chroniques permettent de faire mieux prendre conscience aux jeunes pilotes que l’aviation générale est un loisir qui doit respecter des règles strictes, alors que demander de plus ? Mais je n’ai pas la prétention de pouvoir « chiffrer » ce phénomène. Pour autant, on me rapporte que ces chroniques sont toujours bien accueillies en aéroclub et auprès des lecteurs d’Info-Pilote.

Propos recueillis par Bruno Rivière

Pour Michel Barry, ce n’est pas parce que le pilote VFR maitrise parfaitement son Garmin et son PA qu’il peut se permettre de voler en IMC.
Michel Barry déplore le manque d'encadrement des jeunes pilotes brevetés
La transmission de la culture de la sécurité serait-elle en panne ?
Parlons sécurité
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Bruno Rivière

Reporter photographe par passion, Bruno Rivière a assuré la rédaction en chef d’Aéroports Magazine pendant près de 25 ans. Il a également enseigné le journalisme en faculté. Spécialiste du transport aérien, il a rejoint Aerobuzz en janvier 2011. Bruno Rivière réalise des reportages et des recensions de livres.

View Comments

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    Je suis d'accord avec azerty, le suivi systématique d'un jeune pilote par un ancien est une contrainte de plus . Il y avait avant le REC qui sous une forme de retour d'expérience racontait les mésaventures survenus à des pilotes. C'est dommage qu'on ait laissé tomber cette bonne idée. Je suggérerai qu'Info pilote réserve une page aux pilotes , d'une manière anonyme, qui ont eu des mésaventures. Ce serait enrichissant.

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    M. Barry était mon chef de projet à l'IUT Ville d'Avray en 1999, pour obtenir mon diplome Ingénieur Technique merci à un stage Erasmus. Je me rappelle de lui comme un grand professionnel de l'aviation. Je suis très contente de savoir qu'il continue à montrer aux jeunes la beauté et les risques du pilotage. Si je peux en Espagne, j'achèterai son livre! Bravo Michel!

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    Jeune pilote (60 heures) de 48 ans, j'ai l'avantage d'avoir perdu la fougue et l'absence de peur du danger que l'on peut avoir à 20 ans ; les responsabilités familiales et professionnelles aidant.
    Les chroniques de Michel Barry sont mes pages préférées, avec celles des récits de voyage : le rêve oui, mais en sécurité.
    Quand à traverser la France avec 3 pax dès le brevet obtenu...c'est sans doute aller vite en besogne.
    Mr Barry a 100 fois raisons de dire que le compagnonnage entre les FI et les jeunes brevetés doit aller au-delà du PPL. A cet égard, certains clubs pratiquent les heures de vols avec instructeur au même tarif que les HDV solo, pour les brevetés, ce qui permet de maintenir les compétences à un tarif intéressant.

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    Ma réaction a du passer à la trappe faute d'avoir rempli l'anti-spam.
    Je la repose ici : perso, les articles de Michel Barry m'auront servi tant dans mon apprentissage dans ma jeunesse que pour mes élèves en en tirant des illustrations concrètes pour mes cours.
    Un grand merci à Michel Barry donc.

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    On ne peut pas donner tort a Michel Barry. La jeunesse a ses qualites et de l audace mais egalement ses inconvenients. Lors d une conversation anodine, je confesse que les conseils prodigues par un ancien pilote m ont peut etre un jour sauve la mise et plus encore.

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    "Sur le plan du droit, un pilote qui vient d’être breveté (disons qu’il a une quarantaine d’heure de vol) peut tout-à-fait entreprendre un long voyage qui lui fera traverser la France avec trois passagers dès sa licence en poche. En pratique, il lui manque tout de même un minimum d’expérience, de bon sens… Il suffirait parfois d’un échange avec un « ancien » pour éviter qu’un vol débouche sur un accident !"

    En voilà de la bien-pensance. Non Monsieur. Il y en a marre, dans ce pays, de tirer vers le bas, de dé-responsabiliser sans arrêt les gens.
    C'est à cause de ce genre de pensée que nous perdons en compétence.

    Nos anciens y arrivaient très bien, nous ne sommes pas plus cons qu'eux, encore faut-il écouter ce qu'ils ont à raconter. Si aujourd'hui il y a tant (sic!) d'accidents, c'est avant tout parce qu'il y a une décadence incroyable du niveau de base. Et avec ce genre d'arguments "y'a qu'à , faut qu'on" de faire voler un ancien avec un jeune breveté, vous amplifiez cette décadence.

    Aéronautiquement

    A.

    • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
      Pour résumer, un grand merci a Mr Barry ses conseils paternalistes en espérant pouvoir en recevoir encore beacoup plus.

    • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
      Je suis d'accord avec vous Mr Azerty sur le manque de formation à la base et je pense que l'article cité essais de trouver une solution raisonnable.
      Puisque vous citez nos anciens il me semble que justement eux ont eu la chance d'être accompagnés alors que leur formation de base n'était pas si évoluée.
      "Les échanges paternalistes" ne consistent pas à prendre les commandes à la place des jeunes mais sont surtout ce commentaire au sol ou au bar de l'aéroclub sur cette météo, sur la configuration de ce voyage qui peut parfois tout changer.
      Face à un commentaire d'un ancien il y aura le jeune pilote qui apprendra et celui qui n'en fera qu'a sa tête mais si au moins cela peut servir à l'aviateur intelligent ce ne sera que du bénéfice.
      Si on sait écouter et qu'on a la chance que celui qui vous parle a la sagesse d'un vieux pilote on met toutes les chances de son côté pour être sois même un jour un vieux pilote...

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    Pour l'aviation générale, Michel Barry a parfaitement raison. Est-ce que les pilotes de ligne pourraient s'en inspirer ? ... Savoir comment réagir quand un tube pitot débloque, par exemple...

    • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
      Si votre commentaire est une blague, elle est de mauvais goût; sinon il s'agit d'une méconnaissance du métier de pilote de ligne.

  • Michel Barry ou la sagesse d'un vieux pilote
    Voilà un article qui donne envie de lire ! Et la couverture est excellente ^^.

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Bruno Rivière

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