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Débat et opinion

Qui veut tuer l’aéromodélisme en France ?

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Louis Kulicka

Louis Kulicka a qui nous devons les pertinentes analyses sur les conséquences financières des déboires du Boeing 737MAX publiées dans Aerobuzz.fr, est aussi un aéromodéliste engagé. Il dénonce ici l’amalgame fait par les pouvoirs publics entre l’aéromodélisme et les drones. Un amalgame qui se traduit par une suite de contraintes sans précédent pour les pratiquants du plus anciens des sports aériens.

L’aéromodelisme ne fait plus beaucoup recette en France, comme l’illustre la figure 1. En 4 ans, ce loisir a perdu pas loin de 4 000 membres, soit 14% de ses pratiquants entre 2016 et 2019 une véritable saignée. Comme toute population, cette variation s’explique du point de vue des nouveaux recrutés (les flux entrants) et de ceux qui cessent l’activité (les flux sortants).

Pour les flux sortants : ce sont les personnes qui cessent l’activité. Je ne connais pas la moyenne d’âge officielle des pratiquants, mais elle est très élevée. Avoir 45 ans dans ce loisir, c’est être « un p’tit jeune ». Quand on regarde les revues d’aéromodélisme (elles ont presque toutes disparu) d’il y a 20 ans, 30 ans, 40 ans, on retrouve beaucoup des mêmes, mais avec moins de cheveux sur la tête et un tour de taille mieux arrondi….

Pour les flux entrants, la figure 2 ci-dessous est parlante : le réservoir de nouveaux pratiquants potentiels s’amenuise à un rythme plus élevé de -26% en 4 ans : une véritable dégringolade. Les « nouveaux pratiquants » sont de moins en moins nouveaux et de moins en moins pratiquants.

Le lecteur aura peut-être noté que ce déclin s’amorce en 2016 : c’est l’année où a été adoptée la très controversée loi drones du 24 octobre 2016 qui en amalgamant drones et modèles réduits impose aux aéromodélistes la possession d’une véritable carte grise pour chacun de leurs modèles (valable 3 ans), impose à tout vendeur de matériel d’occasion la fourniture à l’acheteur d’une notice spécifique (comme s’il était un professionnel),  l’emport d’un dispositif de signalement lumineux et de limitation de capacité et celui d’un transpondeur pour ceux qui volent avec un certain esprit de liberté tout en respectant les lois du vol à vue.

Et ce n’est pas tout : le pratiquant hier paisible deviendra un délinquant s’il ne s’acquitte pas de ces nouvelles obligations en payant des amendes de plusieurs centaines d’euros : fermez le ban !

Bien entendu, comme chacun le sait, lorsqu’on créé des nouvelles et nombreuses contraintes administratives pour la pratique d’une activité de loisir, cela n’a aucune conséquence sur celui-ci…

Une atteinte préventive aux libertés publiques

Dans une démocratie, la liberté est la règle, et la réglementation ou l’interdiction l’exception. Tout ce qui n’est pas interdit expressément par la loi est autorisé, et pour interdire une activité, on attend d’abord de constater qu’elle génère des troubles avérés à l’ordre public, avant d’envisager les mesures proportionnées qui permettront d’y mettre fin.

Dans le cas de l’aéromodélisme, on est exactement dans la situation inverse. L’aéromodélisme existe depuis les débuts de l’aviation, c’en est même une de ses branches les plus fécondes. C’est un loisir particulièrement sûr, pratiqué par des adeptes formés et avertis.

Les drones relèvent d’une activité nouvelle, qui si elle possède des points communs avec l’aéromodélisme, se caractérise par l’emport d’équipement distincts : positionnement GPS, caméras de prise de vue et de retransmission au sol, système embarqué de navigation, équipant le plus souvent des aéronefs particuliers : des quadri ou multicoptères…

Où est le problème ?

La loi n° 2016-1428 a fait l’amalgame entre l’aéromodélisme et les drones, en refusant de les distinguer, et en appliquant aux aéromodélistes les contraintes prévues pour l’usage de drones.

La question est alors : « pourquoi mettre les deux pratiques dans le même sac ? ». Il faut alors lire entre les lignes.

Quand on explique à la ministre des transports qu’un aéromodéle n’est pas un drone, que ce n’est pas la même population etc, elle répond que les aéromodélistes n’ont pas à se plaindre, car ils bénéficient d’exemptions et donc « tout va bien circulez il n’y a rien à voir ». Voilà pour la réponse « on the record ». La réponse « off the record » se lit dans la réponse aux parlementaires : au détour d’une phrase, on peut lire : « dans un contexte d’évolution de la menace… ».

Tout est là : un gentil aéromodèle peut se transformer en dangereux drone d’attaque. Bien que sur le territoire français, on n’ait jamais connu telle occurrence, c’est cette angoisse de dirigeants qui a valu à l’aéromodéliste une telle disgrâce…  Autrement dit, de trouble publics de la part d’aéromodélistes, il n’y en a jamais eu, mais « dès fois que on ne sait jamais », alors… l’Etat français a mis en place une atteinte préventive à la liberté jusqu’à présent jamais contestée de faire voler un aéromodèle conformément aux règles de vol à vue .

Au mauvais endroit au mauvais moment

Romans sur Isère 4 avril 2020. Ce jour-là, un homme se saisit d’un couteau de boucher, tue 2 personnes innocentes, et en blesse gravement 5 autres qui l’étaient tout autant. Les couteaux de boucher peuvent se révéler des armes dangereuses – la preuve- et les victimes de Romans ne sont pas les seules victimes malheureusement de ce genre d’ustensile. Suite à ces faits, a-t-il au moins été prévu d’équiper tous les couteaux de boucher vendus d’une puce électronique permettant d’identifier le propriétaire, de signaler tout vol, et d’enregistrer tous les propriétaires d’un couteau de boucher dans un fichier national ? Que fait le législateur pour éviter que cela se reproduise ?

14 juillet 2016, Nice : un camion fou dans ce qui constitue l’attentat terroriste le plus meurtrier en France ces dernières décennies  tue 86 personnes et en blesse 458 autres. Qu’a-t-il été fait pour que cela ne se produise plus ? A-t-on créé un fichier national des personnes louant un camion ? A-t-on restreint les conditions de location des camions ? A-t-on imposé aux camions de location l’emport d’une balise permettant de vérifier la conformité du trajet réalisé avec un trajet prévu et déclaré préalablement en préfecture ? Que fait le ministère de l’intérieur pour que cela ne se reproduise pas ?

Et quand des malfrats armés de mitraillettes  Kalachnikov montent dans une voiture, celle-ci ne se transforme-t-elle pas en automitrailleuse ?

L’aéromodélisme, inoffensif loisir n’a jamais tué personne en France, mais il a récolté la peine maximale : allez comprendre… Probablement qu’il était au mauvais endroit, au mauvais moment. Une balle perdue en somme.

Si on bat ton voisin, prépare tes reins (proverbe espagnol)

L’aéromodélisme ne représente pas grand-monde, et il est en train de disparaitre, alors ou est le problème ? Ce n’est pas celui qu’on enterre qui peut encore protester ! Mais voilà, l’aéromodélisme est un sport aérien et possède plein de petits cousins : le parapente, l’ULM, l’aviation de tourisme, le vol à voile…

Ces petits cousins sont des utilisateurs pareillement de l’espace aérien qui devient de plus en plus compliqué et de plus en plus réglementé et convoité. Ils utilisent aussi des terrains recherchés par des promoteurs. Les puissants lobbys économiques sont souvent des sources d’inspiration pour le législateur : si on gêne, ou même si on risque de gêner voyez l’aéromodélisme pour qui… le ciel est tombé sur la tête !

Paraphrasant Martin Niemöller, certes pour une question qui heureusement n’a rien à voir avec le drame qui s’y réfère,  j’aurais envie de dire : « quand ils ont entravé arbitrairement la pratique de l’aéromodélisme, je n’ai rien dit car je n’étais pas aéromodéliste ».

Louis Kulicka

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Louis Kulicka

Il a commencé sa carrière aéronautique comme vélivole. Depuis une vingtaine d'années, il est aéromodéliste : il conçoit ses propres planeurs ensuite construits en matériaux composites. Ayant une formation en gestion finance, il réalise pour Aérobuzz des chroniques financières sur les constructeurs aéronautiques.

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  • Ou donc est passée cette époque lorsque nous avions la liberté de concevoir, de se débrouiller avec le sous-main, la joie et satisfaction de s'amuser avec nos propres prototypes même sommaires ! On dirait que tout ce qui touche au jeux technoscientifiques n'a plus lieu d'être !
    J'ai découvert l'aéromodélisme au collège, avec la matière qui s’appelait EMT à l'époque ... aujourd’hui ils mettent ce qu'ils appellent la "Techno" et vraiment inadaptée pour les gamins ... pour en faire des préprogrammés de leurs finances ; qu'en ont-ils faits de leurs évasion saine et naturelle pour eux ?
    La plupart des politiques aiment toutes les complications et abaissements "artificiels" pour des stratégies économiques qui passent avant les libertés d'évolution de leur propre population ! D’où de désastreuses conséquences ...

  • Tout cela c'est parce que les "élites", la police, et les "rampants" confondent drones et modélisme.
    Le modélisme n'a rien à voir avec les drones.

    Aucun modéliste n'a envie de mettre volontairement en danger une réplique d'avion de légende qu'il a mis 600h à construire !

    Pas même un débutant en club qui a mis 400 € dans son avion en kit (qui ne demande qu'une ou 2 10 aines d'heures à construire)

    Et encore moins un gamin débutant.

    Parmi nos membres, nous avons des anciens, membres depuis 40, 50, 60 ans. Ayant obtenu plusieurs récompenses pour des constructions exceptionnelles (B17 de 40kg, Caravelle de 3m d'envergure, mini fusée Saturn V fonctionnelle, Navette spatiale, SR71 ...) Ces anciens sont toujours membres, mais ils ne captent rien à l'informatique ni à alpha tango donc ils se sentent mis à la porte comme des incompétents alors que ce sont des génies qui ont encore tant de choses à nous apprendre.

  • Le probleme de base vient de ces fédérations qui n'ont pas su faire de pédagogie au près de nos politiques incultes incapables de faire la différences entre un engin piloté à vue et un autre capable de s'autogérer . Dans leur grande majorité dans leur esprit un "Drône " est un multicoptere. Sans même savoir qu'un camion R/C radiocommandé est un DRONE qui peut être l'engin le plus meurtrier pour faire un attentat. Imaginez au ,14 juillet , une place bourrée de monde et un gros Truck RC transportant plusieurs kg de C4 , elle a bonne mine la loi drône..! Vu que ça ne vole pas et que ça amuse les gosses, personne n'ira contrôler s'il est équipé d'une balise.

  • Bonjour,

    Il est vrai qu'avec un abonnement à vie
    de 400 € on attire guère de jeunes ni leurs envies !

  • Bonjour
    Alors qu'après avoir pris connaissance de vos nombreux commentaires, je zyeutais un temps de m... au travers de ma baie vitrée.
    Alors que je me lamentais en me disant que ne pourrais sortir pour pédaler ou faire voler...
    Alors que malgré tout je rigolais en me disant que cette fichue "baliz" obligatoire était encore introuvable dans le commerce hexagonal...
    Alors que...

    M'est soudain venue cette question:

    Nous autres petits Français sommes-nous les seuls dans l'Union Européenne contraints d'utiliser ce bidule si on fait évoluer en dehors des "réserves aéromodélistiques?" (j'entends par-là les terrains dûment répertoriés où l'on cherche à nous parquer à la manière des Indiens Sioux, Iroquois ou autres?

    A vous lire

  • Les drones FPV sont un vrai problème dans un club d'aéromodelistes et j'ai beaucoup choqué lors de la réunion du bureau en affirmant qu'il existe une véritable incompatibilité entre ces deux activités : les drones ont besoin de surface
    au sol alors que nous, avons besoin de volume. Actuellement, de plus en plus de clubs interdisent les drones et ne s'en portent que mieux, pourquoi ne forment-t-ils pas leurs propres clubs? Peut-être que la FFAM se rendrait compte de son erreur

  • Bonjour
    Je suis aéromodéliste et pilote privé.
    Juste une remarque, je pense qu'un terroriste se contre fiche d'une loi drone. Si il veut faire une action aérienne il la fera. Le législateur se trompe de cible. Oui il faut réglementer un peu les vols des drones pour éviter des vols illicites ne respectant pas la règlemantation en vigueur (règles de l'air). Pas de survol des zones P etc.... Mais ça les aéromodélistes nous connaissons et aucun intérêt. Ce que l'on veut c'est montrer nos modèles et se faire plaisir en les pilotant à vue. Pas de les envoyer filmer une finale d'un liner.

    Mais qu'elle idée de mélanger les drones et les aéromodèles ... Depuis cette loi je ne peux plus faire voler mes petits avions électriques près de chez moi. Du coup depuis 4 ans je n'achète plus rien. Je les fait voler 2 fois par an à la campagne.
    Oui c'est facile de s'inscrire sur Alpha Tango, mais que d'énergie dépenser pour rien.
    Si ce n'est de se faire fliquer une fois de plus. Je dispose d'un Concorde de 820 grammes pas de bol je lui ai coller une petite étiquette. sous le fuselage avec son numéro DGAC. Je pense que si un jour je suis contrôlé je ne serais pas tendre. Il y a certainement mieux à faire dans nos cités... No comment.

    Merci M. Louis KULICKA pour votre article je me sens moins seul.

    • Bonjour
      Entièrement d'accord avec vous, n'importe quel modéliste est capable avec un peu de moyen de construire un avion de 20kg ou plus capable de transporter une grosse charge et ceci en un hiver. Si ce modèle est destiné à faire un attentat, je ne pense pas que son propriétaire fera des vols loisir avant et l'immatriculera..... Mais bon quand aux quadricopteres, c'est encore un autre problème qui ne nous concerne pas....

    • Entièrement d'accord ,je pilote des hélicoptères rc relativement gros,
      Maintenant il faut que je fasse 100 km a/r ,alors qu avant j avais un terrain de entraînement a 500 des chez moi, que je continue d'exploiter !!!!!
      C est sur ,c est plus facile de verbaliser un aeromodeliste,que d aller verbaliser la racaille des cités !!!!!!

  • Je ne suis pas d'accord avec l'analyse qui consiste à rejeter la faute à la LOI DRONE pour la chute du nombre d'aeromodélistes.
    1 : personne ne sait compter exactement le nombre de pratiquant sauvages ; on ne peut pas se contenter des 25000 licenciés FFAM
    2 : la procédure d'enregistrement sur Alfatango est très simple et gratuite. Elle est encore plus simple si on est dans un club ou on va trouver un ami qui va vous aider. Qui ne constate pas un abandon général de l'inscription dans un club toutes activités confondues
    3 : des grincheux tentent d'attribuer la faute à la FFAM pour l'association dans la loi des drones avec tous les autres modèles. Il est pourtant évident qu'un avion RC peut emporter une charge nuisible plein plus lourde qu'un drone. Les legislateurs n'avaient QUE cette crainte à résoudre. Je ne dis pas que la loi est LA solution contre les terroristes, mais il faut bien admettre que le loi avait vous seul but : faire une com Nationale qui prouve que le gouvernement a pris des mesures (certes discutable) sans se soucier des conséquences pour les 25000 licenciés officiels. Pour peser plus lourd dans la négociation, les non licenciés devraient se poser des questions. Les chasseurs eux ont compris...

    Enfin un message ci dessus m'a donné une solution qui pourrait faire évoluer les choses : il faut inonder ALFATANGO d'enregistrements pour des aeromodèles autres que drones... L4attitude contraire peut donner raison au legislateur d'avoir fait une LOI DRONE

    • Comme les chasseurs ? Mais il y a une grosse différence. Les deux tiers des députés sont chasseurs, que seulement 10% des chasseurs ont un permis national, que dans le 1.1 million de permis il y en a bon nombre qui sont là pour permettre à ds particuliers d'avoir une arme à la maison. Le fait que 80 % de la population soit opposée à la chasse ne rentre aucunement en ligne de compte... Combien de députés sont aussi aéromodélistes ? Nos activités aériennes sont dans le collimateur de l'administration policière, pour des raisons essentiellement idéologiques qui sont loin d'être récentes. Malheureusement si le tri n'est pas fait avant les élections, il n'y a aucune chance de voir les petits avions voleter tranquillement dans le ciel presque libre de notre beau pays, avec ou sans pilotes.

  • Si toutes les personnes qui interviennent ici, pouvaient contacter leurs députés et sénateurs, ce serait une bonne chose. A une époque 2016 FinessePlus avait prévenue, personne n'a bougé. Faite le maintenant, il y a eu changement de ministre des transports et c'est un pilote. Peut être une chance de faire évoluer les choses.

    • Bonjour Philippe,
      C’est une occasion à saisir, si les aéromodélismes ne se mouillent pas plus cette loi ne sera pas amendée.
      C’est pas sorcier d’expliquer q’un Planeur radio commandé piloté à vue n’est pas un drone !

  • L'aéromodélisme, que j'ai pratiqué pendant plus de quarante ans, aura été la grande passion de ma vie. Amateur de vol de pente et de jets électriques, j'ai commis quelques articles dans des revues aujourd'hui disparues, et j’ai même été pendant quelques années le rédacteur en chef de l'une d'elles. Mais j'ai fini par remiser définitivement ma radio, cessé mes activités, et pris le chemin des écuries. Car c'est finalement à cheval, en peine nature, que j'ai retrouvé la liberté que j'affectionne. Si je me conforme sans difficulté aux règles indispensables, je n'ai guère envie de m'emm... avec d'autres qui le seraient moins, et de composer avec une envahissante bureaucratie et la paperasserie qu'elle aime tant générer. Le monde professionnel me suffit amplement...
    Je ne suis pas tout à fait en accord avec le titre de cette tribune car je ne crois pas que l’on cherche à tuer l’aéromodélisme dans notre pays, mais plutôt qu’il est en train de mourir de sa belle mort ; tout simplement parce que l’évolution a fait du monde d’aujourd’hui un « biotope » qui n’est plus propice à sa survie et encore moins à son épanouissement. La loi drones -dernier avatar en date - n’étant finalement qu’une tentative de lui donner le coup de grâce. Qu’un clou de plus sur son cercueil, en quelque sorte.
    L’aéromodélisme n’a jamais été vraiment aussi bien traité dans notre pays qu’il a pu l’être, pour les raisons que l’on sait, en Allemagne. Sauf peut-être un peu au moment de l’Aviation Populaire. Par le monde de l’aéronautique tout d’abord, dont il est pourtant un peu le géniteur (qui se souvient, par exemple, des travaux d’Alfonse Penaud ?), mais qui fait montre d’une certaine condescendance à son égard. Pour ne pas dire de mépris. J’ai en mémoire la réaction d’un cadre de la SAGEM, à qui je faisais remarquer que les drones qu’il vendait à l’époque reprenaient beaucoup de matériels utilisés par les modélistes, et dont les marques étaient bien visibles… Édifiant ! Pourtant, au même moment, Dassault Aviation faisait appel à un fabriquant d’aéromodèles pour ses démonstrateurs Petit et Moyen Duc…
    Passons rapidement sur le grand public béotien, qui, pour faire court, considère souvent les modélistes comme des ados un peu attardés jouant avec leurs petits avions… pour balayer un peu devant notre porte. Car il faut bien reconnaître que le modéliste moyen, grand individualiste devant l’Éternel, n’est pas très actif au moment de défendre l’intérêt collectif. Les membres des bureaux des clubs comprendront. Car le modélisme n’est pas un Lobby comme celui de la chasse, et les modélistes dont l’effectif vieillit et se réduit ne sont pas aussi prompts à se mobiliser que les chasseurs (qui ne sont pourtant pas tous des perdreaux de l’année, tant s’en faut). Le terme de modéliste n’est d’ailleurs pas toujours adapté, car nombre de pratiquants ne sont plus que des consommateurs de modèles prêts à voler, qui ne veulent plus construire… même quand ils en sont capables !
    Internet n’a pas fait que du bien au modélisme. L’E-commerce a littéralement sinistré le secteur : le commerce de proximité a disparu et les grands fabricants européens, allemands pour la plupart, sont à la peine, souvent concurrencés par leurs anciens sous-traitants asiatiques, et peut-être aussi pour avoir misé à l’excès sur les drones. Quant à la presse spécialisée ; elle ne compte plus qu’une revue survivante (il y en eut jusqu’à sept…). On pourrait ajouter à cela que la visibilité de ce loisir est quasi-nulle dans les autres médias ; difficile dans ces conditions de drainer les foules vers les quelques meetings restants et les vocations vers les clubs…
    On pourrait continuer longtemps l’analyse avant de poser un diagnostic, mais le traitement risque de ne pas être simple à trouver. Pour conclure ce (trop) long propos, je serais tenté de dire que l’aéromodélisme déjà pas très bien portant n’avait pas besoin de cette loi drones qui n’est que l’application bête et méchante d’un concept stupide inscrit dans le marbre de notre Constitution : j’ai nommé le principe de précaution qui finira par étouffer bien des libertés sans apporter la sécurité promise…

    • Salut mon ami Philippe ! Heureux et ému de te lire ici, moins heureux que tu utilises désormais le titre de cocher pour de vrais canassons... Mais je comprends ton départ. Nos délires à la porte de Versailles (premier vol A380 simultané !) ou à Bordeaux (24h...) finissant tard le soir à Arcachon, sont de bons souvenirs. Maintenant tu me reconnais...
      Mince, je parle de souvenirs... Pas bon signe ! Je partage en partie ta vision, sur cette mort naturelle qui se profile. La ou je partage moins, c'est qu'entre mort naturelle et assassinat, il y a un pas, un peu grand.
      La mort naturelle n'est pas celle de l'aéromodélisme en lui-même mais d'une certaine forme de pratique. Le mode de fonctionnement d'un club évolue tout le temps. Ceux de nos grands pères n'étaient pas ceux de nos pères, qui ne sont plus les notre. L'organisation façon scout n'est plus à la mode... L'enseignement du modélisme à l'école, c'était nos parents. Aujourd'hui pour mettre dans les mains d'un écolier un cutter et un tube de colle, il faut un escadron de gendarmerie en protection et la présence des pompiers au cas ou il se colle un bout de papier sur le doigt. Comment créer des passions ?
      La technique évolue, les basiques restent, les connaissances à avoir restent. Tu l'as démontré avec le dépron remplaçant le balsa mais qui demande quand même à savoir construire, peut-être pas de la même manière, mais c'est quand même du modélisme pure souche, même si ça à fait crier nos anciens ! De nos jours, les jeunes modéliste font de l'impression 3D et moulent en composite ce qu'on faisait en bois ou en dépron. C'est la même évolution logique et naturelle...
      Les jeunes générations nées les doigts dans l'électronique se sont jetées vers le vol en immersion ou la passion était de créer les ensembles émetteur-récepteur caméra et télémétrie, puis de monter ça sur des avions-planeur adaptés (fait en impression 3D ?), donc de la création, puis ça a dérivé vers les drones et c'est devenu autre chose. Internet est une deuxième cause de mort naturelle de la pratique que l'on connait, donnant à disposer de tout pour rien partout dans le monde, sans magasins qui ont disparus. Les conseils n'étaient plus dans les clubs et les magasins, mais dans des tutos youtube. A coté de ça des artisans, des petits web-magasins, il y en a en France.
      L'assassinat, lui, vient des textes inadaptés, de lois contre-productives, de dirigeants mal orientés et mal conseillés (présidents de clubs et députés), d'une masse de pratiquant ne voulant pas plus d'emmerdes que toi avec les règlements qui n'ont pas su se défendre (dont je fais partie) ou n'ont pas voulu mettre le pied dans la porte du parlement... L'assassinat vient aussi d'internet et de gros distributeurs qui ont voulu tuer à leur profit les petits magasins. Voir Amazon... Maintenant de lobby qui voudraient bien récupérer l'espace aérien des basses couches pour faire du commerce (encore Amazon !), donc virer les modélistes, les ULM, l'aviation légère, les planeurs... Bref, tout ce qui gène les drones de livraison automatiques ! Même les militaires vont devoir abandonner leurs couloirs TBA, vous allez voir !
      Je te comprends mon ami Philippe, j'aime tellement mieux piloter mon avion parce que ce soir il fait doux sur cette pente, sans avoir à remplir 3 pages de plans de vol, déclaré ma présence à la GTA et à la tour locale (fermée à cette heure) ni avoir eu à vérifier tous mes certificats de santés, mes permis et accréditations... Bref, ce que je voulais, c'était juste aller faire un petit tour en avion, pour le plaisir... (pas devenir notaire)

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