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Dépose minute

Attendre ou foncer ?

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Gil Roy
© Vincent / Aerobuzz.fr

Début février, le salon des formations organisé par Aviation et Pilote, a renoué avec l’affluence de ses plus belles années. La file d’attente à l’entrée du musée du Bourget était impressionnante. De quoi réjouir les écoles de pilotage. A l’échelle internationale, la filière a bien labouré le terrain.

Depuis des mois, les cabinets spécialisés multiplient les études pour alerter sur la pénurie de pilotes de ligne qui menacerait. Aerobuzz.fr se fait l’écho des enquêtes qui nous paraissent les plus pertinentes. Même si elles sont globales. Même si nous ne sommes pas dupes des arrière-pensées des commanditaires. Même si elles ne traitent pas spécifiquement du marché français. Même si elles s’intéressent surtout aux USA et à la région Asie-Pacifique, là où les besoins apparaissent colossaux. Libre ensuite à chacun de tenter d’extrapoler et d’essayer de se faire son avis.

Anne-Marie est la mère d’un jeune garçon de 23 ans à la recherche de son premier emploi en compagnie. Une lectrice occasionnelle d’Aerobuzz.fr. De toute évidence, pour elle, nos articles ne reflètent pas la réalité que vit son fils. C’est en substance le commentaire qu’elle a déposé, en milieu de semaine. Elle déplore que la seule réponse que son fils obtienne des recruteurs porte sur son manque d’expérience.

Tant que le vivier déborde, la pirouette est facile. Tant que les piles de CV se régénèrent naturellement, les compagnies les moins scrupuleuses peuvent faire monter les enchères en exigeant, pourquoi pas, une qualification de type. Plusieurs dizaines de milliers d’euros qu’il faut encore trouver pour espérer décrocher un premier emploi de copilote dans une low cost européenne, assorti d’un contrat de courte durée et d’un salaire au raz des pâquerettes. Si près du but, la tentation de rallonger l’addition est grande. Anne-Marie n’a pas précisé si elle était en mesure de faire ce nouvel effort financier, ni si elle y était prête.

Même si à en croire une autre enquête récente, les jeunes français rêveraient plus de devenir avocats que pilotes de ligne, ils sont encore nombreux à galérer pour espérer décrocher leurs premiers gallons. Pourtant, il y a des voix pour les mettre en garde. L’APNA par exemple, l’Association des professionnels navigants de l’aviation. Face aux promesses des uns, il est facile de passer pour le rabat-joie de service.

Il y a une dizaine de jours, l’invité de l’émission JumpSeat d’Aerobuzz.fr était Yves Derrien, commandant de bord de 747 d’Air France, aujourd’hui à la retraite. Sur le plateau, il y avait Antoine, le plus jeunes des chroniqueurs de JumpSeat. En attente de trouver une place en compagnie. Yves l’a encouragé à ne pas perdre de temps. Il l’a prévenu que la fenêtre se refermerait vite, et sans préavis. Yves a une longue carrière derrière lui et il sait que tous les dix à douze ans, le scénario est invariablement le même.

Pendant des années, les compagnies affichent complet. Et puis, elles recommencent à recruter. Elles tapent dans la pile de CV avant de commencer à débaucher chez les concurrents. C’est le signal. La machine s’emballe. Les écoles qui vivotaient se remettent à former tout en essayant de retenir leurs instructeurs aspirés par les compagnies. Quand la machine tourne, à nouveau, à plein régime, il est souvent trop tard. Les compagnies sont proches de l’effectif complet. Encore quelques mois, et les portes se referment pour plusieurs années.

Toute la difficulté est de savoir à l’instant présent, à quel stade du cycle infernal, se trouve le marché de l’emploi des pilotes de ligne. Tous les dix ou douze ans, la même question angoissante revient.

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Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

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  • L'Aviation civile ressemble à l'accordéon: un coup j'aspire, un coup je refoule ... Le tout est d'être prêt lors de l'aspiration !
    Le meilleur conseil que l'on puisse donner à nos jeunes est de se débarrasser au plus vite des épreuves théoriques qui demandent un long travail de préparation et risquent de leur faire rater le train car malheureusement l'aspiration ne dure jamais longtemps.
    Bonne chance jeunes gens, nous sommes nombreux à être passés par là et nous nous en sommes sortis, alors pourquoi pas vous ?

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