Air Formation négocie le tournant de l’e-learning

En 2012, Air Formation devrait se rapprocher de la barre des 1.400 stages à distance (e-learning). La révolution numérique enclenchée il y a deux ans est un défi que le spécialiste toulousain de la formation aéronautique est condamné à réussir.

Laurent Vallier, le fondateur et dirigeant d’Air Formation, est en plein paradoxe, mais il l’assume. Il lui aura fallu une dizaine d’années pour implanter son centre de formation dans un environnement aéronautique. « Je ne pouvais pas concevoir un centre de formation aéronautique sans vrais avions », reconnaît-il. En 2010, il a saisi l’opportunité de s’installer à Cornebarrieu, en bout des pistes de Toulouse-Blagnac. A cette époque, Air Formation venait de mettre en place ses premiers modules de formation à distance. Et c’est dans cette coïncidence que réside le paradoxe : ancrer physiquement le centre dans le tissu aéronautique local au moment d’amorcer la transition vers la formation à distance.

Dans un secteur d’activité où la formation est continue et l’entretien des compétences un passage obligé, les entreprises cherchent par tous les moyens à alléger le poste formation. « A l’origine », explique Laurent Vallier, « le e-learning a été un moyen pour nous de conquérir une nouvelle clientèle. Les compagnies aériennes et l’intérim ont été les premiers à être intéressés. Les industriels sont encore attachés au présentiel comme un mode de transfert du savoir important ». Il n’en demeure pas moins qu’aujourd’hui, Airbus, ATR ou encore Safran sont des clients importants pour Air Formation. « Nous assurons la formation récurrente des mécaniciens du support clients de ces entreprises. Les équipes étant déployées dans le monde entier, le e-learning offre en plus d’une réduction de coût, une grande souplesse ».

Pour le centre de formation, le passage au e-learning est un exercice d’une complexité insoupçonnée. Et paradoxalement (mais là non plus, il n’avait pas le choix), Laurent Vallier a débuté cette transition avec les sujets les plus complexes à transposer, comme les facteurs humains et la réglementation. Le stagiaire est livré à lui-même. Il n’est plus guidé par un formateur qui peut s’assurer, au fur et à mesure de la progression, que les notions sont acquises avant de passer au chapitre suivant. D’où la nécessité de recourir à de nouveaux outils pédagogiques qu’il faut souvent inventer.

« Les formations sont chapitrées. Nous ne passons pas plus d’une douzaine d’idées importantes sans proposer un test. C’est une parade qui n’est pas encore parfaite, mais qui répond le mieux à notre besoin. Pour compléter, nous allons aussi mettre en place des rendez-vous sur internet entre les formateurs et les stagiaires. C’est d’une certaine manière, le retour au présentiel ».

Le e-learning impose également la nécessité de repenser le contenu des cours et leur présentation. La disparition du médiateur qu’est le formateur oblige à proposer au stagiaire des outils nouveaux. « Le décodage d’un schéma ou d’un dessin n’étant plus donné par le formateur, il doit être inclus dans l’image elle-même. D’où le recours à la vidéo. Mais cela ne peut pas être systématique ». Air Formation fait appel à des spécialistes pour transposer ses cours. A marche forcée, le catalogue s’enrichit de plus en plus de modules e-learning. « A ce jour, nous en avons 182 ».

La formation a distance pose également le problème de la validation du cursus. Pour des formations aussi complètes que celle de mécanicien (Licence 66), les stagiaires doivent se déplacer. En revanche pour les certificats professionnels et les agréments, le coup de tampon de l’administration est désormais dématérialisé. Le e-learning est un passage obligé pour tous. Il implique de ce fait une remise en question de la chaîne dans son intégralité, jusqu’à cette ultime étape de la validation…

Gil Roy