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Des jets à la portée des privés

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Martin R.

Les premiers pocket jets vont entrer en service dans quelques mois aux USA. Ces petits biréacteurs vendus au prix des bimoteurs à piston vont révolutionner l’aviation générale. C’est désormais une certitude.


D’ici quelques mois, les premiers Eclipse 500 vont faire leur apparition dans le tour de piste des Cirrus SR22 et des Beech 58 Baron. Le jet se démocratise et se met à la portée des privés. C’est un tournant historique que l’aviation générale s’apprête à vivre à partir de mars 2006, date de la certification de l’appareil aux USA et dans la foulée des premières livraisons aux heureux propriétaires-pilotes. Depuis dix ans, cette perspective faisait rêver les pilotes privés. Dans quelques mois elle sera une réalité.

Sur les douze mois qui suivront l’entrée en service du premier biréacteur ultra léger de série, Eclipse Aviation prévoît de livrer la moitié des 260 premiers Eclipse 500 à des pilotes qui comptent les exploiter à titre privé, c’est-à-dire qui sont bien décidés à s’asseoir aux commandes de ces merveilleux petits biréacteurs de 1,3 million de dollars. Pas question pour eux de se laisser piloter, confortablement assis dans des sièges en cuir, emblématique de l’aviation d’affaires. Dès l’année suivante, cette proposition de privés par rapport aux professionnels est appelée à tomber entre 25 et 30 %. Mais le rythme de production sera alors de 880 unités par an, ce qui représente tout de même 220 à 260 appareils destinés à des privés.

2006, année 0 de l’ère du jet privé

A partir de la fin de l’année prochaine, Cessna commencera également à servir les premiers clients du Mustang, pour la majorité des propriétaires-pilotes. Au total, en l’espace de trois ans, ce sont plus de 1.000 biréacteurs légers qui devraient grossir la flotte des avions privés. Et ce ne sera qu’un début puisque les estimations de production portent sur plusieurs milliers de pocket jets sur les dix prochaines années. A l’évidence, les petits avions à réaction vont se multiplier de manière spectaculaire sur les aérodromes secondaires au détriment des turbopropulseurs et des bimoteurs.

L’arrivée de cette nouvelle génération constitue un saut technologique qui risque de rendre rapidement obsolète toute une série de modèles dont la conception remonte à plus de 40 ou 50 ans. En termes de taille et de poids, l’Eclipse 500 présente des caractéristiques comparables à celles du Beechcraft Baron. Mais l’Eclipse est pressurisé, il est plus rapide de 175 kts et coùte 100.000 $ de moins. Autant d’arguments qui ne peuvent pas laisser un pilote privé qui, il y a quelques années encore, n’aurait jamais pu imaginer, qu’un jour il puisse prendre les commandes d’un avion à réaction moderne. Et pourtant…

Certes, l’idée d’un avion à réaction à 500.000 dollars a fait long feu après avoir aiguisé les imaginations au début des années 90. Aujourd’hui, les deux seuls appareils qui n’ont pas encore franchi la barre symbolique du million de dollars sont deux monoréacteurs qui n’ont pas encore volé. Le premier, le D-Jet de Diamond Aircraft (850.000 $) en est en cours d’assemblage du prototype tout comme le second, le Sport jet d’Excel Jet (950.000 $). Ils ont tout à prouver et d’ici qu’ils aient obtenu leur certification, leur prix aura dépassé le million.

Une vingtaine de projets

Sur la vingtaine de projets qui ont vu le jour au cours des dix dernières années, neuf ont survécu et seulement quatre volent. Le premier est l’Eclipse 500 qui a même effectué deux fois son premier vol. Une première fois en aoùt 2002, propulsé par deux réacteurs Williams FJ-22, une seconde, le 31 décembre 2004, dans sa version actuelle, avec deux réacteurs Pratt & Whitney Canada PW610F. Entre temps, le constructeur d’Albuquerque a connu de sérieuses difficultés financières qui ont bien failli avoir raison du projet. Eclipse Aviation a senti le vent du boulet. Aujourd’hui, il fait la course en tête.

Chronologiquement, le deuxième prototype de biréacteur ultra léger à avoir pris l’air est l’Adam 700 d’Adam Aircraft. C’était en juillet 2003, quelques jours seulement avant le rassemblement annuel de l’EAA à Oskhosh. Le troisième est le Citation Mustang de Cessna avec un premier vol, cette année, en avril. Entre temps, en décembre 2003, Honda a fait voler le Honda Jet qui, en principe, n’est qu’un appareil expérimental. Ce démonstrateur n’est pas destiné à être commercialisé et dont, officiellement, l’une des fonctions est de permettre de tester en vol et de certifier le réacteur HF118 développé par le joint-venture créé par Honda et General Electric.

Après le foisonnement de la fin des années 90 et la multiplication de projet d’avions d’affaires ultra légers qui souvent n’ont pas dépassé le stade de l’annonce, l’offre sur ce créneau émergeant s’éclaircit progressivement. Un dernier entrant de renom a toutefois fait une arrivée remarquée au printemps dernier. Il s’agit du constructeur brésilien Embrarer.
Le nouveau venu n’hésite pas à affirmer qu’à terme, le marché se répartira entre trois avionneurs, Cessna, Eclipse et Embraer, et qu’il en revendique un tiers. Apparemment, Adam Aircraft n’aurait pas d’avenir vu du Brésil.

Des avions pour des privés

Quoi qu’il en soit, le marché visé par tous ces constructeurs est celui de l’aviation de loisir. Pour preuve leur présence sur les salons spécialisés. La grand messe d’Oshkosh est devenue le passage obligé. On a pu y voir la maquette du Mustang et celle de l’Eclipse. Adam Aircraft s’est arrangé pour faire voler pour la première fois l’Adam 700 juste avant le rendez-vous annuel de l’EAA, en 2003, ce qui lui a permis de créer l’événement en présentant un prototype convoyé en vol. Cette année, Honda a présenté son biréacteur. Une première mondiale. Les constructeurs qui commencent à s’intéresser au marché européen, Eclipse Aviation et Cessna, étaient présents cette année à Friedrichshafen. Autant de signes qui ne trompent pas. Ces avions sont destinés aux privés.

Exception faite de l’Eclipse 500, le prix des biréacteurs ultra légers est compris entre $ 2,1 millions pour l’Adam 700 et $ 2,75 millions pour le VLJ d’Embrarer. Le Citation Mustang est vendu $ 2,395 millions. Si ces tarifs se situent largement au-dessus des 500.000 dollars promis, ils correspondent à ceux des turbopropulseurs et bimoteurs à piston présents aux catalogues de Socata, Piper, Beechcraft et autres. Un TBM700 coùte $ 2,68 millions, un Piper Meridian $ 1,83 millions et un Beechcraft King Air C90 $ 2,76 millions.

Cela fait des jets de dangereux prédateurs pour ces appareils qui risquent de prendre un méchant coup de vieux quand les petits biréacteurs pointeront le bout de leur nez sur les tarmacs des aéroports américains. Seuls les délais de livraison peuvent encore leur offrir un sursis. Si vous commandez aujourd’hui un Eclipse 500 vous ne serez pas livré avant mai 2008. Pour un Mustang, il faut compter 2009. Mais une fois que les chaînes de production auront atteint leur régime de croisière (4 avions par jour ouvrable pour Eclipse Aviation !), ces délais devraient rapidement se réduire.

Un saut technologique

Cette révolution est la conséquence des progrès technologiques accomplis ces dernières années dans les domaines de la construction aéronautique et de l’avionique, mais aussi et surtout dans celui de la motorisation. Il fallait réduire la taille et le poids des réacteurs avant d’envisager d’en équiper des avions légers de quatre à six places. Trois motoristes ont pour le moment réussi sur le plan technique : Pratt & Whitney, Williams International et GE/Honda. Mais celui qui semble avoir raflé la mise est Pratt & Whitney qui a été retenu par les trois principaux programmes. On le retrouve en effet sur l’Eclipse 500, le Citation Mustang et le futur Embraer (qui n’a pas encore de nom). Ce moteur proposé en différente poussée, de 900 à 1600 livres est actuellement en cours de certification. Il devrait être certifié en 2007. Compte tenu de l’état actuel des carnets de commandes des avionneurs et surtout des prévisions de ventes, Pratt & Whitney prévoît, à terme, de produire un moteur toutes les huit heures. Outre ses performances, ce sont aussi sa fiabilité et sa facilité de gestion, notamment grâce au Fadec, qui font qu’aujourd’hui, un pilote non professionnel peut avoir accès au réacteur.

Trois sociétés se partagent l’équipement des planches de bord, Garmin, Avidyne et Avio, mais à ce niveau aussi, l’une se détache, en l’occurrence Garmin avec le système Garmin 1000. Avec la généralisation des écrans dans les cockpits, les petits jets sont à la pointe du progrès et creusent encore plus profondément l’écart avec les turbopropulseurs.
Cette avionique de dernière génération est destinée à faciliter la vie du pilote appelé à gérer seul, une machine véloce, dans un environnement qui peut rapidement devenir complexe.

Outre le fait que cette avionique de dernière génération offre une interface homme-machine qui va dans le sens d’une sécurité accrue, les avionneurs sont décidés à offrir aux pilotes l’assistance au pilotage la plus élaborée possible. Certains, comme Embraer, proposent notamment en série des avertisseurs de proximité du sol. En parallèle, ils font porter leurs efforts sur les qualités de vol. Ces machines doivent être saines et faciles à piloter. C’est un point sur lequel tous s’accordent. Il ne s’agit pas de livrer à des pilotes plus ou moins entraînés de véritables petits chasseurs. Au contraire, ces pocket jets doivent être des avions sages.

Sur ce point particulier, les constructeurs se sont employés à rassurer les autorités de l’aviation civile américaine en vue de la délivrance du sésame qui donne accès à l’espace aérien supérieur. Ils ont mis en place des programmes spécifiques et obligatoires de formation, à l’attention de leurs clients. Eclipse va jusqu’à affirmer qu’il refusera de livrer un avion à un client qui aurait échoué aux tests. Les constructeurs ont conscience de jouer une partie serrée.

L’Europe va devoir, à son tour, se positionner sur la question. Elle a encore quelques mois devant elle. Pour l’heure, en effet, la quasi totalité des premières commandes a été passée aux USA. Eclipse Aviation affirme toutefois en avoir enregistré 220 en Europe, dont la grande majorité avec un seul client suisse.

Gil Roy. Aviasport N°610 / Septembre 2005

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Martin R.

Martin R. est le développeur et webmaster d’Aerobuzz depuis sa création en 2009. Développeur de formation, il a fait ses classes chez France Telecom. Il lui arrive d’oublier ses codes le temps de rédiger un article sur un nouveau produit multimedia ou sur un jeu.

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