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Le plus grand dispositif d’Europe

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Martin R.

En France, Aéroports de Paris fait figure de pionniers en matière de surveillance des bruits des avions et du contrôle de leurs trajectoires. Plus de dix ans avant que la loi oblige les aéroports français à prendre en compte cette tâche, Orly et Roissy-CDG ont été placés sous contrôle. Le dispositif s’est développé au fil des années pour devenir aujourd’hui le plus étendu et le plus pointu d’Europe.


Année après année, dans ses rapports d’activité successifs, l’Acnusa a régulièrement déploré que les riverains des deux plus grands aéroports français n’aient pas accès à un système complet de suivi des trajectoires et de mise en évidence des niveaux de bruit. L’autorité en appelait régulièrement à l’Etat pour mettre fin à cette situation parce qu’elle avait conscience que la clé du problème était, non pas, entre les mains de l’autorité aéroportuaire, mais entre celles des pouvoirs publics, et plus particulièrement du Secrétariat Général de la Défense Nationale (SGDN) qui imposait des contraintes sévères de sùreté. De son côté, en effet, Aéroports de Paris était prêt et n’attendait plus que le feu vert des autorités. Après avoir intégré les exigences du SGDN, il l’a reçu en juin dernier. Dans la foulée, le nouveau système Vitrail est entré en service dans les Maisons de l’environnement d’Orly et de Roissy-CDG.

En dépit des regrets exprimés par l’Acnusa, au cours des années passées, les riverains parisiens avaient néanmoins à leur disposition, dans les Maisons de l’environnement, le système Sonate de visualisation du suivi des trajectoires. Il était antérieur au cahier des charges de l’autorité administrative et ne répondait pas entièrement aux prescriptions de cette dernière. Néanmoins, il avait le mérite d’exister et d’apporter un commencement de réponse aux interrogations légitimes des riverains. Le nouveau système Vitrail qui s’est substitué, en juin dernier, à Sonate, associe non seulement les niveaux de bruit aux trajectoires, mais en plus, il fournit, en temps quasi réel, une foule d’informations sur les vols et permet de se focaliser sur une commune ou une autre. Et c’est à ce niveau que réside l’innovation.

Vitrail constitue la dernière évolution en date d’un dispositif qui a commencé à être déployé, à partir de 1993, avec l’implantation de la première station fixe de mesure du bruit, à Orly. L’année suivante, le réseau s’étendait à Roissy-CDG. Diverses expériences d’implantation de stations de mesure de bruit des avions, avaient été réalisées avec plus ou moins de succès au cours des années 80. Elles avaient permis d’acquérir une expérience unique en la matière.  » Nous avons fait partie, avec Düsseldorf et Copenhague, des premiers grands aéroports européens à s’équiper « , souligne Jean-Marie Machet, ingénieur en chef du Laboratoire d’ADP.

Il est important de replacer cette démarche dans son contexte et dans une logique nouvelle d’information du public.  » Jusque dans les années soixante, l’aviation incarnait le progrès et les premiers avions à réaction étaient magnifiés. Les riverains des aéroports du Bourget et d’Orly, assistaient au développement du transport aérien. Les avions faisaient partie de leur environnement. Ce qui ne fut pas le cas pour ceux du nouvel aéroport Roissy-CDG, implanté en zone rurale « .

La prise de conscience environnementale apparaît progressivement dans les années soixante-dix. En réponse, la loi institue, en 1975, les Plans d’exposition au bruit (PEB) puis, en 1977, apparaît la notion de certification acoustique des avions et avec elle le Chapitre 2 et le projet de Chapitre 3.  » Dans les années soixante-dix, les riverains ont commencé à demander de plus en plus d’informations, notamment sur le bruit « , rappelle le directeur du Laboratoire d’ADP. Après donc une série de tâtonnements, le principe d’un système opérationnel de mesure du bruit prend forme et va se développer pour devenir aujourd’hui le plus performant d’Europe, tant par l’ampleur du réseau de stations que par ses fonctionnalités.

Il se compose 35 stations fixes et 3 stations temporaires. Le réseau s’est étendu en réponse aux besoins nouveaux qui se sont fait jour. C’est ainsi, par exemple, que la création de nouvelles pistes à Roissy-CDG a entraîné la nécessité d’implanter de nouvelles stations de mesure à chacune de leurs extrémités. La décision de plafonner le trafic à Roissy-CDG, non pas en termes de mouvements d’avions ou de nombre de passagers, mais en niveau de bruit a exigé la mise en place, en 2003, de 9 stations dites d’  » indicateur global pondéré  » qui ne se contentent pas de mesurer le bruit à un instant donné, mais qui au contraire additionne tout au long de l’année les bruits successifs générés par les avions qui passent à la verticale, au décollage, comme à l’atterrissage.

Pour faire fonctionner ensemble ce réseau dense et surtout pour traiter les informations recueillies chaque seconde par chaque station, un système informatique complexe a été imaginé et développé au fur et à mesure que de nouveaux besoins sont apparus. L’une des plus importantes étapes du développement a été franchie en 2002 avec la connexion du radar secondaire.  » Jusque-là, nous ne pouvions qu’entendre, mais pas voir. D’une certaine manière, nous avons ajouté des yeux à notre dispositif qui était aveugle « , résumé Jean-Marie Machet.

Le radar secondaire permet d’identifier le vol et donc, par recoupement avec d’autres bases de données, de connaître le type d’avion, de moteur, etc et surtout de le suivre.  » Il nous offre la possibilité d’intégrer tout ce qui se passe dans le ciel d’Ile de France. C’est une évolution considérable qui nous permet de rejouer un événement et de l’expliquer « .

Dès l’année suivante, ADP a mis au point un logiciel susceptible d’afficher sur un écran vidéo toutes les trajectoires des avions au départ et à l’arrivée des aéroports parisiens, mais aussi celles des appareils en transit. Il aura fallu deux ans pour que le grand public puisse enfin en bénéficier, le temps que le SGDN lève toutes les réserves en matière de sùreté.  » Pendant cette période, chaque semaine, nous avons livré, à l’Acnusa et aux services de l’Etat, un DVD sur lequel étaient enregistrés tous les vols. Ils avaient ainsi la possibilité de rejouer les vols et de gérer les plaintes « .

Gil Roy. Entre Voisins N°5 / Automne 2005

BONUS 1 – Le dispositif

La fiabilité du système repose sur la qualité des mesures de bruit réalisées par les 35 stations fixes de mesures implantées à l’intérieur et à la périphérie des aéroports. Les emplacements sont précisément définis par rapport aux seuils des pistes ce qui contraint parfois à installer une station au milieu de nulle part. Il faut alors enfouir des centaines de mètres de câbles électrique et téléphonique pour alimenter l’équipement et le relier au réseau internet.
Schématiquement, une station de mesure de bruit se présente sous la forme d’un petit enclos, à l’intérieur duquel est fixé un mât de 5 mètres de haut au sommet duquel se trouve un micro. Au pied, dans une armoire se trouve un ordinateur sur lequel sont enregistrés les bruits. A intervalle régulier, par le biais d’un modem, les informations sont rapatriées vers l’ordinateur central du laboratoire, situé dans la zone technique de l’aéroport d’Orly.

Gil Roy. Entre Voisins N°5 / Automne 2005

BONUS 2 – Station temporaire

En complément des stations fixes, le laboratoire met en œuvre trois stations temporaires. Elles sont utilisées pour des campagnes de mesures ciblées, le plus souvent, à la demande d’un maire. Pour être significatives, les mesures doivent être réalisées sur une durée de trois à quatre mois. A l’issue, le laboratoire établit un rapport et présente les résultats au conseil municipal. Les données recueillies sont intégrées à la base de données avec celles obtenues au niveau des stations permanentes.  » Nous réalisons ainsi cinq à six campagnes par an. Elles nous permettent aussi d’affiner notre connaissance du bruit perçu à la périphérie des aéroports « , explique Bertrand Barbo, du Laboratoire d’ADP.  » En accord avec l’Acnusa, nous souhaitons pouvoir revenir sur des sites où nous avons déjà opéré pour mesurer l’évolution « .

Gil Roy. Entre Voisins N°5 / Automne 2005

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Martin R.

Martin R. est le développeur et webmaster d’Aerobuzz depuis sa création en 2009. Développeur de formation, il a fait ses classes chez France Telecom. Il lui arrive d’oublier ses codes le temps de rédiger un article sur un nouveau produit multimedia ou sur un jeu.

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