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Transport Aérien

Qantas mise sur Airbus et l’A350-1000 pour son projet Sunrise

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Jérôme Bonnard

La compagnie aérienne australienne a annoncé préférer l’A350-1000 face au 777-8X de Boeing dans l’hypothèse où elle lancerait son projet Sunrise de vols très longs courriers (jusqu’à 21 heures). Qantas pourrait commander une douzaine d’avions adaptés à ses lignes hors normes.

Qantas avait lancé un appel d’offre en 2017 sur les avions ultra long-courriers capables de voler plus de 20 heures sans escale, et de relier n’importe quelle ville d’Australie, y compris celles situées sur la côte Est, à l’Europe. Si la compagnie australienne va jusqu’au bout de son projet Sunrise (elle doit rendre sa décision finale en mars 2020), elle pourrait commander au moins 12 Airbus A350-1000. Elle précise toutefois qu’à ce jour, il n’y a pas de commande ferme. Néanmoins, Airbus planche sur le sujet comme l’a confirmé Christian Scherer, le directeur commercial d’Airbus, lors d’un échange avec les journalistes de l’AJPAE (Association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace).

Boeing pour le moment perdant

Boeing estime que son 777-8X (350-375 sièges), en concurrence direct avec l’actuel A350-1000, « sera le plus grand et le plus performant des avions biréacteurs, avec une consommation de carburant réduite de 12 % et des coûts d’exploitation inférieurs de 10 % par rapport à la concurrence. » De son côté Alan Joyce le PDG de Qantas estime que « l’accord qui est sur la table avec Airbus lui donne la meilleure combinaison possible en termes d’efficacité énergétique, de coûts opérationnels, d’expérience client et en termes commerciaux ».

Le moteur Rolls Royce Trent XWB qui équipe l’A350-1000 aurait visiblement pesé dans ce choix : « Il a démontré sa forte fiabilité après sa mise en service il y a plus de deux ans », a justifié Qantas dans un communiqué. Alors que les problèmes rencontrés sur le moteur General Electric GEX du 777X ont impacté l’agenda du programme américain. Initialement prévu l’été 2019, la campagne d’essais en vol du 777-9X n’a toujours pas débuté.

L’A350-900 ULR de Singapore Airlines

Airbus propose déjà dans son catalogue l’A350-900ULR (Ultra Long Range) capable de franchir près de 18.000 km (9700 NM) et voler plus de 20 heures sans escale (selon le constructeur). Comparé à la version standard (15.000 km de rayon d’action), il présente les mêmes caractéristiques avec notamment 280 tonnes de MTOW (Max take-off weight).

En revanche certains changements nécessaires ont été intégrés, « notamment un système d’alimentation en carburant de plus grande capacité utilisant les réservoirs existants, qui permet d’accroître la capacité d’emport de carburant de 141.000 litres à 165.000 litres. «  précise Airbus. Certaines optimisations aérodynamique ont également été réalisées, comme l’extension des winglets.

Par ailleurs, Airbus impose des limitations de la charge utile en limitant le nombre de sièges proposés et en réduisant le nombre de conteneurs embarqués. Ainsi, ceux de Singapore Airlines se limitent à 161 passagers, dans une configuration deux classes (94 sièges en Premium Economy et 67 sièges en Business). L’avion opère actuellement la plus longue route de l’histoire de l’aviation commerciale entre New York et Singapore. 

Ces performances ne sont toutefois pas suffisantes pour réaliser un vol « Sunrise » de Londres (ou New York) vers Sydney ou Melbourne en emportant la charge marchande complète.

Un avion dédié à « Sunrise »

Qantas a donc annoncé avoir choisi (pour le moment) l’A350-1000 qui lui n’existe pas en version ULR. Le modèle de base peut franchir jusqu’à 16.100 KM avec 350 à 410 passagers en configuration 3 classes. La compagnie australienne a en fait confirmé avoir demandé à Airbus de fournir un avion adapté à « Sunrise » et non une variante ULR.

Christian Scherer, directeur commercial d’Airbus, précise que « l’A350-1000 avec des adaptations permet de répondre aux besoins de Qantas avec des coûts d’exploitation qui permettent de faire la différence avec le 777X ».  Airbus envisage l’ajout de réservoir additionnel, une masse maximale au décollage (MTOW) augmentée, un espace repos (crew rest) adapté à des vols de plus de 20 heures et un aménagement cabine spécifique rendu possible par la grande section du fuselage. Qantas s’est donné jusqu’en mars 2020 pour prendre sa décision. Les premiers vols Sunrise pourraient débuter dans la première moitié de 2023.

Les bénéfices (ou non) des vols « Sunrise »

Reste l’intérêt économique d’opérer de tels vols. Sur un direct de Londres à Sydney ou Melbourne, Qantas estime les vols sans escale à une durée de 20h20 sur une distance allant de 16.522 à 16.899 km (en fonction des conditions météorologiques) soit un gain de 3h45 sur un vol avec escale. De même, depuis New York (15.502 à 16.674 km), le vol serait de 18 heures soit 2h45 de gagnées.

En termes de consommation de carburant, un vol direct n’est pas intéressant. En revanche, le gain de temps peut être un argument économique qui permet de vendre le billet sensiblement plus cher. « Les compagnies nous disent que l’engagement du public pour des vols non stop est étonnement très fort », affirme Christian Scherer. « La majorité des passagers est prête à payer un bonus ». Et cela se vérifierait au sein de Singapore Airlines sur les vols en A350-900ULR.

Le CEO de Qantas a annoncé en novembre 2019 qu’il y a « une énorme demande » pour ces nouveaux services sans escale, et que la compagnie pourrait appliquer une majoration de prix de 30% sur les billets comparé aux autres compagnies aériennes (vols avec escale) pour offrir un service direct.

Alan Joyce a exprimé sa confiance sur la viabilité de telles routes. « Nous avons beaucoup appris ces deux derniers années avec les vols commerciaux Londres-Perth (en B787) ainsi qu’avec les vols tests de ces derniers mois. Nous sommes clairs depuis le début que ce projet ne verra jour que sur un modèle économique viable avec un retour sur investissement garanti pour nos actionnaires ».

 

L’aval des pilotes

Qantas a précisé que les négociations sont en cours avec les syndicats de pilotes (AIPA), ainsi que l’autorité australienne de sécurité aérienne qui « ne voit aucun obstacle règlementaire aux vols Sunrise ».

Lors des trois vols d’essais « Sunrise » réalisés au quatrième trimestre 2019 en Boeing 787 entre Londres, New York et la côte Est de l’Australie, une quarantaine de passagers « cobaye » étaient à bord pour évaluer les incidences de la durée du vol. Les quatre pilotes étaient équipés d’électrodes pour mesurer l’activité de leurs ondes cérébrales. Le niveau de mélatonine, l’hormone du sommeil, a également été surveillé.

Le comportement des passagers et la fatigue et les revendications des pilotes sont des paramètres importants qui entrent aussi en ligne de compte dans la décision de Qantas de lancer ses vols Sunrise et donc de commander 12 A350-1000 spéciaux.

Jérôme Bonnard

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Jérôme Bonnard

Journaliste polyvalent, à la fois rédacteur et vidéaste, Jérôme a couvert tous types d'actualités pour la télévision en France comme à l'étranger et a été co-finaliste du Prix Albert Londres en 2012 pour sa couverture du conflit Libyen. Il est passionné par tout ce qui vole depuis son plus jeune âge et pilote sur ULM 3 axes. Il écrit pour Aerobuzz.fr depuis 2018, et co-anime la nouvelle émission JumpSeat sur Twitch, il travaille sur des nouveaux médias et enseigne le reportage vidéo en écoles de journalisme.

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  • Si on se place uniquement sur le plan écologique, la question est :
    Le modèle de base peut franchir jusqu’à 16.100 KM (ou plus) avec 350 à 410 passagers en configuration 3 classes
    Sur ces 400 passagers combien ont vraiment besoin de faire 16 000 km pour satisfaire quelle envie ou nécessité ? C'est là que se situe le vrai changement dans notre façon de vivre si on veut économiser les sources d'énergie de la planète.
    Si on se place sur le plan financier on peut regarder si l'économie des taxes d'atterrissage et autres frais inhérents à une escale pour refaire le plein, ne se justifie pas car cette économie peut se répercuter sur le prix du billet. C'est aussi un cycle de moins dans la vie de l'avion

  • Quand on pense qu'un avion depense en moyenne 70% de carburant pour transporter son propre carburant, on peut legitimement se demander si sur le plan ecologique ca vaut le coup pour economiser 3H45 de temps de trajet.

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