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Six aéroports régionaux en quête de fret

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Martin R.

Les plates-formes de province affichent leur volonté d’exister sur un marché hyper centralisé.


Neuf dixièmes du fret aérien transitant en France sont traités sur les plates-formes parisiennes, principalement à Roissy-CDG. A l’échelle de l’Europe, le trafic des marchandises est concentré sur une poignée de hubs vers lesquels convergent par la route, quotidiennement des centaines de tonnes palettisées et enregistrées sous numéro de vol. C’est ainsi que les trois quarts du fret transitant par l’aéroport Lyon-Saint Exupéry, soit un peu plus de 100 000 tonnes annuellement, sont embarqués à bord de camions à destination de Roissy-CDG, mais aussi d’Amsterdam, de Luxembourg ou de Francfort.

La conséquence de cette hyper centralisation est l’absence totale de lignes régulières cargo sur les aéroports régionaux. Le seul à faire exception à cette situation est Marseille avec trois lignes régulières hebdomadaires sur l’Algérie, la Libye et la Mauritanie gérées par un broker spécialiste du transport de fret pétrolier hors gabarit. Un peu moins de 5 000 tonnes ont été chargées, l’année dernière, à bord d’Antonov An12.

French airports –

Dans leur ensemble, les gestionnaires des aéroports régionaux français ne cachent pas qu’ils préféreraient voir plus d’avions cargos et moins de camions sur leurs sites. C’est l’une des raisons qui ont poussé six d’entre eux à enclencher une démarche collective face aux opérateurs de fret. Leur première action commune a pris la forme d’une participation au salon Air Cargo Europe, à Munich, en juin dernier. Nice Côte d’Azur, Lyon-Saint Exupéry, Marseille Provence, Toulouse Blagnac, Nantes Atlantique et Lille Lesquin se sont donc retrouvés sous la bannière French Airports, au rendez-vous de référence du fret aérien.  » Nous avons l’habitude de nous rencontrer au sein de la commission fret de l’ALFA-ACI, l’association des aéroports francophones, pour échanger sur des sujets relatifs au marketing, à l’environnement ou aux contraintes opérationnelles. Nous avons eu l’idée d’aller plus loin « , résume Eric Burdin, responsable de Cargoport à Lyon-Saint Exupéry.  » Seuls, nous serions passés inaperçus sur ce salon qui en 3 jours accueille 45 000 visiteurs « , explique Martine Moison, en charge du fret à Nantes-Atlantique.

L’objectif était de mettre en avant leur activité fret et de faire connaître leurs caractéristiques et leurs atouts, une manière pour eux de se positionner comme une alternative, tout en mutualisant les coùts de représentation. Si pour la plupart d’entre eux, la participation au salon Air Cargo Europe a constitué une première, ce n’était pas le cas pour Lille, déjà présent à Munich, mais aussi à Dubaï, l’autre grand salon spécialisé.  » Nous nous positionnons en plate-forme de services logistiques « , explique Nicolas Leclercq, responsable du département fret de l’aéroport de Lille.  » Nous possédons la capacité technique, un parking cargo capable d’accueillir des gros-porteurs de type Antonov An124, une équipe de handling et nous sommes ouverts H24. Nous développons des services à toutes les étapes. C’est en fait le message que nous voulons envoyer « . Pour l’heure, la part du fret avionné n’est pas significative.  » Nous traitons entre 50 et 100 cargos par an « . Le fret camionné que les responsables de l’aéroport préfèrent pudiquement appeler  » fret acheminé  » représente 63 000 tonnes.  » La plupart des plus grands aéroports européens sont situés à moins de 2 heures de route de nous, ce qui fait que notre positionnement naturel a toujours été sur le fret acheminé « . Le tonnage traité a doublé entre 1999 et 2005 du fait, notamment, du dynamisme des grandes centrales d’achats nordistes.

Fret express –

Situé à une heure de route de Bruxelles et à deux heures de Roissy-CDG, Lille est aussi l’un des rares aéroports à ne pas être relié par avion aux réseaux des expressistes. Pour les autres, exception faite de Marseille, les seules lignes régulières dont ils peuvent se prévaloir sont effectivement les liaisons de fret express.  » L’année dernière, le fret express a représenté 77% du tonnage avionné « , précise Martine Moison. A Lyon-Saint Exupéry où tous les intégrateurs sont présents, ce créneau représente près de 90% du tonnage annuel traité, soit un peu plus de 32 400 t.  » Dans leur ensemble, les opérateurs, UPS, DHL, TNT et FedEx, exploitent majoritairement des avions de grande capacité : B767, B757 et A300 « , précise Eric Burdin.  » Avec 4. 609 mouvements en 2006, les intégrateurs ont réalisé 96 % du total des vols cargo « .

A Marseille, le tonnage cumulé des différents opérateurs de fret express est comparable à celui de Lyon. Il devrait toutefois connaître une forte croissance en 2007, suite à la mise en service, en mars dernier, par UPS d’un Boeing 767-200 cargo qui double la capacité offerte au départ de la plate-forme phocéenne. Toutefois, les marseillaises voient plus loin.  » Les échanges entre Marseille et l’Afrique du Nord sont conséquents. La région produit un volume important de fret sur cet axe. Nous encourageons les compagnies de fret express à créer à Marseille un hub « , explique Jean Marc Boutigny, responsable du développement du fret à l’aéroport Marseille-Provence.  » L’intérêt existe de la part des intégrateurs. Le fait d’être les seuls à avoir des lignes fret régulières vers l’Afrique du Nord nous confère un atout. Ces liaisons démontrent notre savoir-faire et nous confèrent une certaine notoriété « . Le choix de participer au salon de Munich sous la bannière des aéroports français a été dicté, en partie, par cet objectif.

Pour Nice, un autre des six, le salon Air Cargo Europe a été l’occasion d’aller à la rencontre de compagnies aériennes généralistes, et pas seulement cargo.  » Pour l’aéroport de la Côte d’Azur, le fret est aussi un moyen d’élargir l’offre long-courrier « , explique Michel Tohane, chef du département développement passagers et fret à la direction marketing de l’aéroport niçois.  » Nous n’avons pas vocation à nous renforcer dans le fret, mais nous voulons garder un aspect pluridisciplinaire afin d’attirer tout type de passagers « .

Cargo mixte –

Nice ne possède pas les 900 hectares de réserves foncières de Lyon pour développer une zone destinée spécifiquement au traitement des marchandises. C’est au contraire une plate-forme contrainte, coincée entre la mer et la ville, privée de toute possibilité d’extension. Néanmoins, elle s’attache à conserver une gare de fret et à maintenir sur place la chaîne logistique complète. C’est une condition jugée indispensable pour cet aéroport qui est le seul en région à avoir, d’un bout à l’autre de l’année, des lignes régulières sur l’Amérique du Nord et le Moyen Orient desservies par des Boeing 777 et 767.  » La partie fret est importante dans la structure des coùts et de revenus de ces liaisons. L’offre fret de l’aéroport est impérative pour attirer les compagnies américaines et asiatiques notamment « .

Le cargo mixte (fret embarqué à bord d’avions de passagers) représente 70 % des 10 560 tonnes traitées en 2006 à Nice ; les 30% restants sont réalisées par les expressistes. Si, environ 1 500 tonnes ont été chargées l’année dernière à bord des Boeing 777 d’Emirates à destination de Dubaï, et 900 tonnes dans les soutes des 767 de Delta Airlines à destination de New York, la première destination demeure néanmoins Paris avec 3 500 tonnes transportées dans les soutes des avions d’Air France.  » Les produits embarqués sont des fleurs et des arômes de parfum, mais également des composants pour l’industrie de haute technologie, essentiellement dans le spatial et le pharmaceutique « .

Le trafic fret des plates-formes régionales est en effet fortement influencé par les spécificités locales. Outre Nice, l’exemple le plus significatif est donné par Toulouse avec Airbus qui a représenté l’année dernière 31 000 t sur un total de 58 600 t. Grâce à ce client, l’aéroport toulousain est le numéro deux en France, derrière Paris. Lyon en joue également en orchestrant, chaque automne, son opération Beaujolais Nouveau. Eric Burdin doit se montrer persuasif pour convaincre des compagnies régulières de venir charger à Lyon plutôt que de remonter logiquement le fret vers leurs hubs par la route. Chaque année, une dizaine de cargos sont ainsi traités à Lyon-Saint Exupéry… mais aussi 800 camions.  » C’est pour nous l’occasion de montrer les capacités opérationnelles de la plate-forme et le savoir-faire des opérateurs de fret présents sur le site « . Pour les aéroports régionaux, il est impératif de convaincre aussi bien les transporteurs aériens que les transitaires et les chargeurs.

Gil Roy. Air & Cosmos N°2086 / 13 Juillet 2007

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Martin R.

Martin R. est le développeur et webmaster d’Aerobuzz depuis sa création en 2009. Développeur de formation, il a fait ses classes chez France Telecom. Il lui arrive d’oublier ses codes le temps de rédiger un article sur un nouveau produit multimedia ou sur un jeu.

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