Publicité
Categories: Culture Aéro

Un pilote d’Air France en toute simplicité

Published by
Gil Roy

Moments choisis. Dans « 6 minutes 23… », François Suchel évoque librement son métier de pilote au sein d’Air France. Il revient aussi sur l’accident du Rio-Paris qui a secoué la compagnie nationale bien plus qu’elle n’a voulu le laisser paraître.


« 6 minutes 23 séparent l’enfer du paradis ». Tel est le titre du nouveau livre que signe François Suchel, ce pilote d’Air France, qui s’est fait connaître du grand public en reliant Canton à Paris, en vélo, en suivant le tracé d’une ligne aérienne qu’il connaissait parfaitement. Il propose cette fois-ci une immersion passionnante et sans concession dans la vie quotidienne d’un pilote de ligne d’une grande compagnie.

Ce livre aurait pu ne jamais exister. 6 minutes et 23 secondes d’erreurs successives ont, en effet, failli faire entrer un vol Paris-Zurich d’Air France dans la rubrique des catastrophes aériennes. Personne n’en a évidemment jamais rien su puisque tout s’est bien fini, mais la carrière de François Suchel, pilote de ligne à Air France, aurait pu s’arrêter là, dans les débris d’un 737-200 éparpillés au cœur de la Forêt-Noire. Très simplement, dans son nouveau livre, il décrit la descente dans l’entonnoir, la traversée des plaques de Reason, l’une après l’autre, jusqu’à ce réflexe de survie. C’était au début des années 90, un an après son entrée dans la compagnie nationale.

On a connu François Suchet, cycliste, pédalant sous le trait de la ligne Canton-Paris. On l’a aussi découvert photographe, rapportant de ses escales à travers la planète, une collection de Polaroid saisissant d’humanité. « La photographie n’était peut-être qu’un prétexte pour découvrir les villes à ma manière, échapper au poison de l’habitude ». Avec « 6 minutes 23… », il revient pilote de ligne.

Il raconte le métier qu’il a choisi par passion et qu’il vit avec lucidité. Il reconnaît qu’il s’épanouissait plus sur le long courrier qu’il a pratiqué dans la première partie de sa carrière que dans l’enchevêtrement des zones contrôlées qui fragmentent le ciel européen qu’il sillonne désormais depuis qu’il a accédé au grade de commandant de bord. « Depuis huit ans, je monte et je descends, comme une bulle d’air coincée dans un ascenseur ». Moins « chauffeur de bus » que « veilleur de nuit », François Suchel évoque désormais le point Nemo Le point Nemo est situé dans le Pacifique Sud, par 48°50′ de latitude sud et 123°20′ de longitude ouest : « il désigne le pôle maritime d’inaccessibilité, l’endroit des océans le plus éloigné de toute terre émergée » explique François Suchel. avec nostalgie…

Il n’est évidemment pas un pilote de ligne ordinaire et c’est sans doute ce qui fait de son livre un témoignage remarquable sur le métier de pilote de ligne, tel qu’il est pratiqué aujourd’hui. A travers des moments choisis, il raconte le huis clos du cockpit, les relations entre collègues, les poussées d’adrénaline, le bonheur d’une trajectoire parfaite. Il revient aussi longuement sur le crash du Rio-Paris (juillet 2009) : « si j’avais été à bord, je ne sais absolument pas comment j’aurais réagi ». Suchet explique aussi comment Eric Schramm, nommé en mars 2010 directeur des opérations aériennes, a dû se battre pour réformer la sécurité des vols « dont Air France avait tant besoin ».

Adoptant un ton léger quand il évoque sa formation pratique de Phoenix à Saint-Yan « connu que des amateurs de viande bovine et des passionnés d’avion », il devient tranchant quand il explique que « la morgue de certains chefs pilotes, instructeurs, membres de l’encadrement, ou même simples pilotes, tenait en une phrase répétée à l’envie « A Air France, nous apprenons à voler aux oiseaux ». C’était au début des années 90. S’en suit une énumération d’incidents et de crashs. Jusqu’au décrochage d’un A330 au-dessus de l’Atlantique Sud. Son analyse de l’accident ne sera sans doute pas partagée par Airbus.

Le lecteur sortira de cette lecture convaincu qu’il y a décidément des gens bien à Air France. Il y en a même parmi eux qui ont un sacré talent. « 6 minutes 23… » est plus que les confidences d’un pilote, c’est le livre d’un écrivain-aviateur.

Gil Roy

Acheter en ligne : 6 minutes 23 secondes séparent l’enfer du paradis

Publicité
Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

View Comments

  • J'ai dévoré ce livre. Un seul défaut: il n'est pas assez long. J'aurais pu lire encore 200 pages. Très humain et bien écrit. Sans être pilote moi-même (je suis journaliste et écrivaine), j'ai adoré les récits liés à un métier fascinant. Les commentaires d'un idiot puant la jalousie n'enlèvent rien à la valeur de cet ouvrage qui est très instructif, à part le fait d'être passionnant.

  • En toute simplicité ? vraiment ? Livre pénible - comme l'a relevé quelqu'un d'autre, c'est moi, moi, moi, et meilleur que mes CDB du moment..... Moi aussi un jour j'écrirai peut-être un livre à ma gloire !

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    Ce livre est Excellent... mais malheureusement trop court.
    "Ce qu'il y a de bien dans notre métier, c'est qu'on se remet sans cesse en question"

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    En toute simplicité? moi moi moi le meilleur même plus que mes CdB à l'époque...style empoulé qui plus est et absolument narcissique j'ai paumé 20€.

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    Est-il possible d'accéder à ce livre en format électronique?
    Sans toit fixe, je n'achète pas de livre en papier... Trop lourd à transporter dans mes bagages
    Merci

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    Un livre qui se lit avec avidité ! Sans longueurs, vivant, technique et humain à la fois .
    J'ai moi-même raté le concours de l'ENAC il y a 46 ans pour un problème de physique bêtement non révisé, ai bifurqué vers la médecine, et ressent encore un petit pincement au coeur chaque fois que je me retrouve en siège économique au lieu d'être "tout devant" ... Certain jugement péremptoire ci-dessus émane soit d'un idiot soit d'une grande gueule, en tous cas de quelqu'un qui ne semble pas connaître grand-chose au pilotage et à l'aviation ...
    Bouquin chaudement recommandé, aux pilotes et non pilotes !

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    "Si j’avais été à bord [ndlr : d’AF447], je ne sais absolument pas comment j’aurais réagi".
    Le commentaire d'un homme honnête et qui sait de quoi il parle.

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    « si j’avais été à bord [ndlr: d'AF447], je ne sais absolument pas comment j’aurais réagi ».

    C'est plutôt inquiétant !

    • Un pilote d’Air France en toute simplicité
      Vous êtes très sévère avec François SUCHEL !
      Quand on est le premier à se trouver dans une situation extrème et inexplicable avec des alarmes visuelles et sonores ce n'est pas aisé d'abord de comprendre .....
      N'oubliez pas qu'ils étaient trois pilotes dans le poste .
      Maintenant c'est facile de dire ce qu'il fallait faire :
      "Maquette zéro de l'horizon de secours et manettes de poussée aux 3/4 avant ."
      Il faut dire que maintenir un palier au FL 350 cela se joue au 1/8 de degré de l'horizon artificiel et que c'est le PA qui le fait le mieux , a moins de rendre les passagers malades

    • Un pilote d’Air France en toute simplicité
      Quand on n'a pas confiance dans les lois élémentaires de l'aérodynamique et de la mécanique du vol on va aussi au tas.

    • Un pilote d’Air France en toute simplicité
      Au contraire pour moi. Ca veut dire qu'il ne préjuge pas de ses capacités futures de par les évènements passés.
      La sur confiance en soi se finit généralement au tas...

  • Un pilote d’Air France en toute simplicité
    En rupture de stock en ce moment.
    On peut lire également "Le plus beau bureau du monde" et "Lignes aériennes", tous deux de Jacques Darolles.

    • Un pilote d’Air France en toute simplicité
      On peut le trouver en dématérialisé sur les plateforme que nous connaissons tous, A....et aussi la F

Share
Published by
Gil Roy

Recent Posts

A la guerre comme à la guerre !

© Vincent / Aerobuzz.fr Ainsi il semblerait que l’Ukraine ait transformé des ULM Aeroprakt A-22… Read More

28 avril 2024

SkyVibration intègre 4 turbines électriques sur une wingsuit

La société SkyVibration, basée à Chambéry, développe un système de wingsuit équipée de 4 turbines… Read More

27 avril 2024

Avec l’uchronique A60 Junkers Aircraft réinvente le passé !

En plus de ses répliques d'avions anciens, Junkers F13 et autres E50, Junkers Aircraft a… Read More

27 avril 2024

Margrit Waltz, la pilote aux 960 convoyages !

Margrit Waltz est une légende parmi les pilotes. Cela fait presque 50 ans qu'elle traverse… Read More

27 avril 2024

Un autogire Revo-lutionnaire !

Contrairement aux hélicoptères, les autogires ne peuvent pas décoller à la verticale. Du moins, c’était… Read More

26 avril 2024

Biblio – Cent pour sang

Un livre à lire avant de regarder la série Masters of the Air. Ou même… Read More

26 avril 2024
Publicité