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Hélicoptère

SMUH : les assistants de vol remis en question à Dijon

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Gil Roy

L’hôpital de Dijon souhaite remplacer les assistants de vol qui accompagnent les pilotes à bord de l’hélicoptère du SAMU par ses propres ambulanciers. Si ce projet abouti en Bourgogne, il pourrait faire tâche d’huile sur le territoire français. C’est ce que redoutent les pilotes désormais prêts à se mobiliser pour défendre leurs assistants qu’ils ont pourtant vu embarquer, en janvier 2016, d’un mauvais œil. Depuis cette nouvelle catégorie de personnel navigant (TCM) passionné a démontré son utilité en tant que membre d’équipage à part entière.

Ce n’est un secret pour personne : les hôpitaux publics sont au bord du burn out financier. Beaucoup sont déjà sous tutelle et ceux qui ne le sont pas encore multiplient les coupes sombres dans leurs budgets de fonctionnement, sans toujours mesurer les conséquences. L’urgence est aux économies. Il sera toujours temps après de rafistoler l’édifice qui se lézarde un peu partout.

TCM, membre d’équipage technique

Dans cette logique, à Dijon, la directrice du CHU envisage de réduire la facture de la société Babcock MCS France qui assure le SMUH en imposant ses ambulanciers à la place des assistants de vol. Ces assistants qui ont pris place à bord des hélicoptères du SAMU le 1er janvier 2016 sont directement menacés. Les pilotes sont remontés.

C’est dans la précipitation que le concept de membre d’équipage technique ou TCM – la dénomination officielle de l’assistant de vol – a vu le jour à l’automne 2015. Il est la réponse franco-française bricolée entre le SNEH (Syndicat national des exploitants d’hélicoptère) et les syndicats de pilotes SNPL et SNPNAC sous l’égide de la DGAC, en réponse à l’injonction de la Commission européenne exigeant, à partir du 1er janvier 2016, la présence systématique d’un second membre d’équipage technique. Comme souvent, face à l’Europe, la France avait épuisé son droit à un délai supplémentaire.

Une « masse forfaitaire de 98 kg »

Le TCM n’a pas été le bienvenu à bord où les pilotes l’ont d’abord vu comme un paramètre supplémentaire à gérer, une « masse forfaitaire de 98 kg » et surtout 20 minutes d’autonomie en moins. Ils réclamaient un pilote.

Après plus d’un an de travail en équipage à deux, ces mêmes pilotes ont revu leur position : « Au début les pilotes n’étaient pas convaincus », reconnaît avec euphémisme Jean Bec, responsable du dossier au SNPNAC. « Avec le recul d’un an, 90% des pilotes ne feraient pas le retour en arrière ». D’où la menace de bloquer le système si, comme à Dijon, les hôpitaux ont la tentation de vouloir remplacer les actuels assistants par des ambulanciers.

Des navigants à part entière

En quelques mois seulement, les assistants de vol ont fait la démonstration de leur utilité et surtout de leur professionnalisme. « Ce sont de vrais navigants », déclare Jean Bec. Ils sont un peu plus de 150 en France. Ils ont été recrutés, fin 2015, spécifiquement par les quatre sociétés (Babcock MSC France, SAF, MBH et NHV) qui se partagent le marché du SAMU héliporté en France.

Le statut de personnel navigant leur a été octroyé en novembre 2015 par la DGAC ce qui implique une formation d’une semaine de membre d’équipage dispensée en interne par les entreprises qui les emploient, un contrôle continu et une visite médicale de classe 2.

Au sol, ils aident le pilote dans le travail administratif et à préparer l’hélicoptère… « Ils sont capables de lire des check lits en cas de problèmes. Ils deviennent de vrais compléments au pilote. Ils sont aussi capables d’assister au niveau médical. Ils aident à brancarder, à accompagner l’équipe médicale dans l’hôpital. Ils reconditionnent l’hélicoptère ».

Des passionnés d’aéronautique

Les entreprises qui opèrent la cinquantaine de SAMU héliportés ont recruté, fin 2015, des personnes ayant un passé aéronautique pour occuper la fonction d’assistant de vol. Dans les faits, ce sont d’anciens treuillistes, d’anciens mécaniciens militaires voire des pilotes privés. Mais il y a aussi d’anciens pompiers et secouristes.

Le salaire des « TCM » avoisine le SMIC. Déduction faite des cotisations sociales, certains de ces professionnels gagnent moins de 1.000 euros net par mois, ce qui n’empêche pas une implication totale dans leur mission. Ils vivent leur nouveau métier avec passion. Les pilotes craignent de perdre au change si les hôpitaux leur imposent de voler avec leurs ambulanciers qui n’ont pas cette fibre aéronautique et qui seront des assistants de vol occasionnels.

La haute autorité de l’aviation civile a été saisie. Sa réponse est attendue dans le courant du mois de février.

Gil Roy

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Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

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  • Pilote hélicoptère ATPL, CPL/IR, MCC, ME, FCL 055, CRM, HUET, BOSUET,QT AS 365 avec une experience Off-Shore, la plupart du temps par météo dégradé. De plus ancien pompier militaire à Marseille pendant 17 ans avec des milliers d'interventions sanitaires en tant que chef d'engin, moniteur de secourisme, sauveteur en milieu périlleux au GRIMP de Marseille . Ne trouvant pas de travail en tant que pilote hélico, j'ai postulé pour un poste de TCM. Les sociétés Hélico ont pour la plupart répondue qu'elles ne voulait pas de pilote en TCM alors que j'acceptais de travailler au SMIG.
    Alors je pose une simple question, il n'y aurai pas comme un problème ?

  • Un super débat des plus intéressant . Il est certain que suivant la position de chacun , un ambulancier SMUR (je précise pour DURAN avec DEA et FAE SMUR ) n'apportera pas plus de sécurité qu'un TCM actuelle (à formation équivalente 4 jours...). L'ambulancier en poste pourra simplement , apporter deux mains expertes en relevage, aide au conditionnement des victimes et surtout habitué à travailler avec son équipe (La on peut parler d'une plus value pour le patient). Effectivement la tendance est aux économies ,une ligne de TCM H24 coute chère , mais est à l'heure actuelle financée par les ARS (cela ne durera certainement pas ),on pourrait également s'interroger si les sociétés prestataires ne font pas un petit bénéfice en passant sur le dos de nos amis TCM . Les CHU possédant des équipages complets et normalisés pourrait effectivement utiliser à 100% leur personnel sans surcout étant donné que l'ambulancier est en attente dès que son équipe est en vol SMUH (rapport de l'IGAS). Bien entendu chacun défends ces intérets .

    • Bonjour Monsieur Laurent,
      Vous avez complètement raison; un ambulancier en poste pourra simplement , apporter deux mains expertes en relevage, aide au conditionnement des victimes et surtout habitué à travailler avec son équipe, MAIS une petite précision ; le TCM fait déjà cela dans la plupart des SAMU lors d'opération SMUH. En ce qui concerne le rapport de l'IGAS et le montant farfelu de 9 millions d'euro annoncé pour la mise en place de cette nouvelle profession, ce dernier sera actualisé à la baisse dans les prochaines semaines et pour conclure, je vous rejoins au sujet des sociétés qui font un joli bénéfice sur le dos de la bête. Cordialement

  • Dans toute cette affaire, on commente sans fin en oubliant un peu vite les causes initiales du problème, alors même que c'est bien là que réside la seule solution logique. Tout tentative de solutionner les problèmes incidents ne serait qu'un bricolage de plus.

    Problème n° 1 : décision complètement aberrante de l'EASA d'imposer un membre d'équipage, alors même que l'aviation commerciale a plutôt eu tendance à suivre le chemin inverse grâce aux évolutions technologiques : quels cockpit de liner comporte trois personnes actuellement ? On est passé de trois à deux il y a bien longtemps ... Pourquoi pas imposer un deuxième ambulancier dans les véhicule SMUR ? Et pourquoi pas un second chauffeur dans les taxis ? Bref, la c ... nerie n'a pas de limite, ses partisans n'en ont pas non plus, et c'est à ça qu'on les reconnait.

    Problème n°2 : en admettant (hypothèse de travail seulement) que la décision de l'EASA est justifiée, une excellent solution, en tout cas la moins mauvaise, eût été de confier cette fonction d'anti-abordage/anti-collision (car là était la raison initiale, et la seule), lors des posers en primaire sur zone non connue ou reconnue, à quelqu'un déjà présent à bord. A moins de considérer qu'un infirmier ou un médecin n'avait pas la capacité, pendant le court moment (environ trois minutes) de regarder dehors et de signaler la ligne où l'arbre potentiellement dangereux, ce qu'ils faisaient tous naturellement avant ... On aurait largement pu acter une brève formation spécifique, voire organiser des vols démonstratifs. mais personne n'a eu le courage de décider.
    Certains syndicats PN en mal d'effectifs y ont peut-être vu un moyen de grossir le vivier dans lequel piocher des adhérents (environ 200 TCM en France ?!), ce qui pourrait expliquer leur opposition à la solution C décrite plus haut ... Quant au refus d'un syndicat urgentiste minoritaire mais à la figure de prou médiatique, no more comment.

    Bref, je trouve cette affaire et son traitement assez indignes de notre pays.

    • Mon cher Truffe, on ne fait pas du liner en samu mais du VFR jour ou nuit,
      Donc la sécurité c'est plutot 2 paires d'yeux en cabine. Quand à la personne d'avant elle était devant parce que mignonne ou en dormant parce trop fatiguée par ses heures supplémentaires
      Ensuite comment surveiller un posé en zone non reconnue (primaire) de l'arrière par un petit hublot ?

      • D'accord.
        Le propre d'une comparaison, c'est de mettre en évidence certains points communs de deux situations non identiques. C'est ainsi qu'on peut comparer deux voitures de marques, de taille, de puissance etc différentes. Si c'est les mêmes, on ne les compare pas ...
        Avant, la personne en place avant gauche pouvait être mignonne. Pour ma part, ce n'est pas ce qui m’intéressait. Cette personne, "Membre d’Équipage Médical", formé à un certain nombre de préceptes formellement listés dans le MANEX de la compagnie, était également sensibilisée à son apport utile en terme d'anti-abordage. De toute façon, il est naturel qu'un humain placé dans un environnement moins rassurant qu'au sol, soit attentif à son environnement dans les phases où il peut penser que le danger est potentiellement plus important. Quel passager d'un véhicule n'a pas le réflexe de regarder à sa droite à un Stop ? Osez prétendre que vous ne le faites pas ?! CQFD.
        Enfin, j'ai été peu clair : dans mon raisonnement, il s'agit de l'option dans laquelle l'équipage ne comporte pas de TCM. Le siège avant gauche est donc occupé par un membre de l'équipe médical. Il n'observe donc pas l'extérieur "par un petit hublot".
        Sinon, vous êtes en mesure de produire des statistiques d'accidents qui auraient été causés, dans ce type d'exploitation, par le manque "d'une paire d'yeux en cabine", sachant que ladite paire existait précédement, mais n'appartenait pas à un TCM ?

  • Lorsque le législateur a imposé le multimoteur pour le survol des villes et autres "zones hostiles" il a lourdement pénalisé les exploitants étatiques et parapubliques.

    • Philippe, les premiers a en souffrir ont ete les boites du prive. Les etatiques ont continue a voler longtemps avec leur alouettes 3 en plein Paris.
      En tuant le monomoteur , ils ont aussi tue l helitransport commercial dans l oeuf.
      Il n y a qu a comparer une photo de l heliport de Paris dans les annees 80 avec une prise aujourd hui. Et ce n est pas la faute de la crise du petrole, en France..
      Eurocopter s est tire une balle dans le pied commercialement, en misant tout sur le super puma (et successeurs) qu ils ont bien du mal a vendre aujourd hui, depuis que leurs BTP lachent plus souvent et surtout plus dramatiquement que leurs moteurs..
      J ai fait des milliers d heures en milieux hostiles en monomoteur, et les deux fois ou je me suis pose d urgence suite a arret/feu ou probleme moteur, c etait en bimoteur.
      A noter que la grande majorite des arrets moteurs sont dus avant tout a des problemes d alimentation ou de contamination carburant. Donc un ou deux moteurs, l issue sera la meme qu en mono, mais avec en plus un manque de sensibilisation et d entrainement specifique a l autorotation (car bimoteur), un peu comme le 135 qui a fini sur le toit d un Pub Ecossais cruellement sans tours rotors par exemple..
      Comme disaient les anciens, deux moteurs, certe, mais toujours qu une seule boite..
      Parlez en aux Norvegiens.. Enfin, on s ecarte du sujet la.

  • Dans son communiqué de presse daté du 13 février 2017, le SNPNAC rappelle qu'en 2015, trois options avaient été étudiées concernant les futurs assistants de vol des hélicoptères du SAMU française :
    -Option A : 2 pilotes
    -Option B : 1 pilote + 1 TCM de l’entreprise hélico
    -Option C : 1 pilote + 1 membre de l'équipe médicale de l’hôpital
    "L’option C a été refusée par la majorité de ce groupe de travail (dont le SNPNAC et les syndicats de médecins urgentistes). L'option A défendue par le SNPL, trop couteuse, n’a pas été retenue. L'option B s’est imposée, tenant compte, de la menace d’une interruption du service médical héliporté au 1er janvier 2016".

  • Non les pilotes ne voient pas çà d'un mauvais œil puisque l'on parle de remplacer un bonhomme par un autre dont la connotation n'est ni définie ni exigée !
    En conséquence que l’assistant de vol soit tel ou tel personnel ne change rien à sa fonction basique en vol.
    En revanche, l'idée de cette demande est, je pense, de pouvoir bénéficier d'un personnel assistant de vol formé médicalement et donc utilisable dans le domaine par l’hôpital public.
    Bref faire d'une pierre deux coups, on ne peut pas dire que cela soit contre productif...

    • Les ambulanciers exerçant dans la fonction publique hospitalière font partie du corps des conducteurs ambulanciers régi par le décret n° 91-45 du 14 janvier 1991 modifié, portant statuts particuliers des personnels ouvriers, des conducteurs ambulanciers et des personnels d'entretien et de salubrité de la fonction publique hospitalière. Leur statut particulier prévoit que les conducteurs ambulancier ont pour mission « d'assurer le transport des malades et blessés et la conduite des véhicules affectés à cet usage », de participer, « le cas échéant, à l'activité des services mobiles d'urgence et de réanimation » ; quant à ceux qui sont dans un grade d'avancement, « ils peuvent être chargés de fonctions de coordination ». Leur mission principale est donc de conduire les véhicules affectés au transport de blessés et de malades. Il n'est pas prévu de les rattacher à la filière des personnels paramédicaux. Donc mon cher monsieur, l'ambulancier n'est formé actuellement qu'à la conduite d'une ambulance et ne possède pas une formation médicale comme vous le mentionné dans votre post .

      • Ne jouez pas sur les mots DURAN ! En SMUR les A.D.E. ont une action bien différente de l'ADE "lambda". Donc les former n'est pas un problème, puisque bien avant déjà, ils assuraient la fonction d'assistant de vol sans qu'elle existe ! Ils sont plus utiles AVEC leur équipe, plutôt qu'attendre au sol le retour de cette dernière ! Un équipage SMUR est un BLOC uni, qui a l'habitude de travailler ensemble, et l' hélico depuis 2016 sépare ce savoir faire, par la présence de l'assistant. Former des assistants au diplôme d'ambulancier serait une hérésie. Donc logiquement, laissez l'ambulancier rester avec son équipe et qu'il soit formé a être assistant.

      • Soyons précis il ne s'agit là d'un mauvais procès, que ce soit un personnel X ou Y en place avant gauche les missions seront exécutées de la même manière il n'y a aucune raison.
        Il est donc parfaitement faux de dire que les pilotes sont arque-boutés contre, ce n'est pas un problème pour eux car çà ne change absolument rien à ce qui se passe actuellement.
        Donc encore un article orienté toujours dans le même sens, sans concertation évidement car quelle est donc le problème que l'assistant de vol soit d'ici ou de là ? on se le demande bien...

  • Le profit financier est l enemi jure de la securite des vols.
    Un "groupe" Europeen est en train de prendre le monopole de cette activite en France.
    Apres avoir casser les prix, en plafonant entre autre les salaires des pilotes, quoi de plus normal de supprimer un salaire "inutile", meme si ce n est qu un assistant smicard..
    Les jeunes ont vraiment du soucis a se faire.. Honte a ces banquiers de l air..

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