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Transport Aérien

Des quotas de bruit aéroportuaire

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Martin R.

Eurocontrol démarre l’étude de faisabilité d’un projet de marché du bruit entre compagnies aériennes.


Eurocontrol est sur le point d’ouvrir un nouveau chantier qui pourrait déboucher, à long terme, sur la mise en place d’un marché de bruit entre compagnies aériennes. L’idée de cette bourse d’échange s’inspire de celle des quotas d’émission de CO2 qui permet aux entreprises de vendre ou d’acheter des permis de polluer en fonction des quotas qui leur a été initialement alloués ; les mauvais élèves achetant aux bons, peuvent continuer à produire librement.

 » Nous sommes partis du fait que nous avons à notre disposition un outil qui nous permet de modéliser le bruit d’après les données de radar « , explique Peter Hullah, chef de projet au centre expérimental d’Eurocontrol. Cet outil baptisé ENHANCE (EuropeaN Harmonised Aircraft Noise Contour modelling Environment) permet de calculer les profils réels du bruit émis par un avion à partir des données radar. Ces profils sont ensuite calculés à l’aide d’INM (Integrated Noise Model) de la FAA.

 » Dès lors que nous sommes en mesure de calculer le bruit pour chaque avion, nous pouvons le faire pour chaque compagnie « . Cette réflexion est le point de départ du projet MIME, un acronyme en forme de clin d’œil qui signifie Market-based Impact Mitigation for the Environment. La différence avec le marché des quotas d’émission de CO2 est qu’ici le résonnement s’applique, non pas globalement, mais localement, au niveau d’un aéroport.

Plafonner le bruit –

Eurocontrol entend évaluer si MIME pourrait être un moyen de corréler les stratégies de développement des aéroports avec l’opposition grandissante des populations riveraines qui condamnent toute croissance de trafic fatalement associée à un surcroît de nuisances. L’intérêt de ce marché résiderait dans le fait qu’il offre la possibilité de plafonner le bruit sans bloquer pour autant les mouvements.  » Les aéroports présentant une forte croissance et une capacité limitée pourraient y retrouver leur compte « , affirme Peter Hullah.  » Pour l’instant nous avons simplement évalué la faisabilité technique de ce projet « , précise-t-il.  » Nous allons maintenant entrer dans la phase d’étude pour savoir s’il est ou non réalisable, sous quelle forme et dans quelle mesure. De nombreuses questions se posent évidemment « .

Parmi celles-ci : comment calculer le bruit, quelle base de trafic retenir, comment intégrer le nombre de riverains affectés par les nuisances, comment mesurer l’utilisation des permis, comment allouer les permis de bruit de manière équitable en début de chaque période, comment organiser le marché, les aéroports ayant déjà mis en place des restrictions opérationnelles pour limiter les nuisances sonores ne risquent-ils pas d’être pénalisés, etc.  » L’un des objectifs de notre étude est aussi d’établir des moyens d’évaluation pour permettre à un aéroport de savoir s’il a intérêt ou non à mettre en place un tel marché ? En effet, tous les aéroports n’ont pas besoin d’un tel système. Dans le même temps, nous allons proposer un projet de réglementation à la Commission européenne afin que le système soit le même sur tous les aéroports en Europe « .

Réticences –

Le porteur du projet ne cache pas que les acteurs du transport aérien concernés auxquels il a fait part de sa démarche ont émis un certain nombre de réserves.  » Les compagnies aériennes sont sur le point de mettre en place un marché des émissions de C02. Elles ne veulent pas avoir à travailler simultanément sur un marché de bruit. D’autres viennent de négocier des codes de bonne conduite sur leur aéroport principal et ne veulent pas avoir à tout recommencer « . Et puis, la plupart ne veulent surtout pas vendre leur capacité.  » Il apparaît que les compagnies aériennes ne souhaitent pas donner plus de capacité à leurs concurrents ; tout le système pourrait être mis en échec à cause de cette réalité économique « . D’autant que les marchés de bruit seraient spécifiques à chaque aéroport.

De leur côté, les riverains craignent que ce système ne débouche sur une gestion différenciée des pistes qui entraîne des reports de trafic d’une piste sur l’autre et donc d’une zone de population vers l’autre. Peter Hullal n’exclut pas l’éventualité d’envisager un marché fermé, non seulement au niveau d’un aéroport, mais en fonction des spécificités locales, d’aller jusqu’à prendre en compte une piste. Il ne ferme pas non plus la porte à la prise en compte de différentes périodes dans l’année. Au-delà du bruit mesurable avec une batterie de sonomètres, il faudra sans doute prendre en compte la gêne sonore qui fait entrer en ligne de compte des paramètres plus complexes encore à évaluer. MIME n’en est qu’aux balbutiements.

Gil Roy. Air & Cosmos N°2075 – 27 avril 2007

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Martin R.

Martin R. est le développeur et webmaster d’Aerobuzz depuis sa création en 2009. Développeur de formation, il a fait ses classes chez France Telecom. Il lui arrive d’oublier ses codes le temps de rédiger un article sur un nouveau produit multimedia ou sur un jeu.

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