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Transport Aérien

La France a encore besoin de l’avion

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Gil Roy

En réponse aux écologistes qui réclament l’interdiction des lignes aériennes domestiques, et surtout face à la réorganisation du réseau d’Air France Hop, les sénateurs proposent de développer le recours à l’avion pour favoriser le « désenclavement et à la cohésion des territoires » à condition toutefois de repenser le cadre réglementaire et l’organisation opérationnelle des lignes subventionnées. D’où une série de propositions.

La déception suscitée par les Assises nationales du transport aérien a été si grande, que les déclarations de la ministre des Transports de l’époque, en faveur du développement des « LAT », autrement dit des « Lignes d’aménagement du territoires », ont été inaudibles. La création, dans la foulée, de l’eco-taxe n’a pas arrangé la situation. Cette annonce a eu l’effet d’un épandage massif de glyphosate sur les dernières traces d’espoir qui subsistaient chez les professionnels qui voulaient encore y croire.

En l’absence d’alternative l’avion est la solution

Toutefois, les sénateurs qui ces dernières années ont fait preuve d’indépendance et de pragmatisme, ont entrevu dans les conclusions des Assises, une opportunité. Confrontés, à longueur d’année, pour une partie d’entre eux, à la complexité de rejoindre la capitale depuis leurs circonscriptions, ces élus locaux qui ont la réputation d’être les représentants de la France profonde, ont repris la balle au bond. N’en déplaisent aux détracteurs des lignes aériennes régionales, pour les exclus du TGV, l’avion apparaît comme la solution jusqu’à ce qu’une alternative soit proposée.

Dans le rapport de la mission d’information sur les transports aériens et l’aménagement des territoires Mission d’information conduite par Vincent Capo-Canellas (UC – Seine-Saint-Denis), président, et Josiane Costes (RDSE – Cantal), rapporteure,, il est précisé, exemples à l’appui, que l’arrêt d’une ligne subventionnée est du le plus souvent au développement des moyens alternatifs de transport : « La ligne en partance de Saint-Etienne s’est arrêtée avec l’arrivée du TGV, celle de Strasbourg lorsque la desserte de la ville par d’autres moyens a été considérée comme satisfaisante. Les années 2000 ont vu disparaître de nombreuses lignes : Saint-Brieuc (2000), Roanne (2002), Bergerac (2005), Epinal (2006), Cherbourg (2009). Plus récemment, l’ouverture de la LGV Le Mans – Rennes a été suivie de l’arrêt de la liaison Lannion-Orly. »

Une qualité de service dégradée

L’arrêt d’une ligne d’aménagement du territoire n’est pas systématiquement dû à la sélection naturelle. Il est aussi lié à la désaffection de la clientèle lassée, à la longue, par « une dégradation de la qualité de service au cours de l’exploitation d’une délégation de service » notent les sénateurs. « Le fonctionnement quotidien des lignes est ainsi fréquemment considéré comme insatisfaisant, du fait de retards fréquents, de déroutements, voire d’annulations de vols. En outre, les compagnies aériennes opérant sur les lignes d’aménagement du territoire sont parfois critiquées pour opérer ces lignes avec des avions anciens, par conséquent moins confortables en termes de nuisances sonores et de confort physique des passagers par rapport à des appareils plus récents. »

Pour remédier à ce problème intrinsèque, les sénateurs font quatre propositions spécifiques

La première porte logiquement sur le renforcement du contrôle des opérateurs de DSP (Délégation de service public) et de leurs sous-traitants en matière de transparence des comptes d’exploitation et de respect des obligations de service public. Ils souhaitent de plus que la qualité du service aérien et l’accueil des passagers soient inscrites au titre des indicateurs de performance des lignes d’aménagement du territoire et du futur contrat de régulation économique (CRE) d’Aéroports de Paris.

Les « laissés-pour-compte » du transport aérien

A ce propos, les sénateurs qui se font les porte-paroles des usagers qu’ils sont auditionnés, déplorent la piètre qualité de l’accueil des passagers de ces lignes à Paris. « En effet, les passagers des LAT sont souvent accueillis au large, et doivent parcourir un long trajet avant de pouvoir sortir de l’aéroport. La durée de ce parcours est parfois supérieure à celle du vol. » Ces conditions d’accueil déplorables associées à la qualité du service opéré par les compagnies, les passagers ont le « sentiment d’être des laissés-pour-compte ou des passagers de second rang. Cela n’est pas acceptable. Un passager a le droit aux mêmes égards, qu’il vienne de Brive ou de Shanghai. »

Un des moyens d’assurer une meilleure qualité passe, selon les sénateurs, par la mise en place d’un suivi dans le temps et le fait d’offrir la possibilité aux collectivités de remettre en question un contrat si la compagnie ne remplit pas ses engagements. Mais une des solutions est aussi d’introduire plus de souplesse aux compagnies pour leur permettre de s’adapter aux fluctuations de la ligne et à son évolution. « Les obligations de service public étant fixées dans les termes du marché, sans véritable souplesse d’exploitation, les dysfonctionnements techniques peuvent obérer le modèle économique de l’ensemble de la ligne tant pour la personne publique qui assume une charge financière importante pour un service rendu déficient, que pour la compagnie qui opère à perte une ligne de service public. » Il s’en passe des événements en quatre ans que dure un contrat de DSP. En l’état actuel du cadre réglementaire, il n’est pas possible de les prendre en compte.

L’avion comme moyen de re-connexion

Et enfin, si ces lignes sont en premier lieu mise en place pour faciliter les déplacements des professionnels, les sénateurs proposent « la mise en place d’une politique tarifaire plus favorable à la clientèle VFR (Voyage, famille, relations) et de tourisme, en complément de la clientèle d’affaires. »

En 2019, 12 liaisons métropolitaines sont opérées dans le cadre de l’Obligation de service public. 10 le sont sous délégation de service public subventionnées par les collectivités territoriales et l’Etat (Aurillac, Brive, Le Puy, Rodez, Limoges, Agen, Castres et Tarbes pour des liaisons vers Paris, d’autre part La Rochelle-Poitiers-Lyon et Limoges-Lyon pour les transversales). Une subventionnée uniquement par les collectivités territoriales (Brest-Ouessant). Une nouvelle liaison entre Quimper et Paris devrait ouvrir à compter du 27 octobre 2019 dans le cadre d’une DSP, en remplacement de la ligne commerciale Air France HOP close le 2 septembre 2019.

A l’issue des Assises, le gouvernement a accordé une rallonge de 15 millions d’euros aux lignes d’aménagement du territoire. C’est un début. Les propositions de la mission sénatoriale d’information conduite par Vincent Capo-Canellas (UC – Seine-Saint-Denis), président, et Josiane Costes (RDSE – Cantal), rapporteure, donne des pistes pour utiliser judicieusement les budgets alloués aux lignes d’aménagement du territoire. Il propose aussi une plus grande autonomie des collectivités locales et en particulier des départements qui sont devenus gestionnaires d’aéroports depuis 2005 et la loi de décentralisation.

Si toutes les propositions des sénateurs étaient reprises par le gouvernement, il n’en demeurerait pas moins que la gestion d’une ligne d’aménagement du territoire est un exercice comptable périlleux compte tenu des faibles flux de trafic et de l’impossibilité pour les compagnies de mettre en œuvre des avions économiques. On notera qu’easyJet, Ryanair, Vueling ou encore Volotea qui multiplient les ouvertures de bases sur les aéroports régionaux français ne se bousculent pas pour répondre aux appels d’offres des collectivités locales. Cela devrait mettre la puce à l’oreille des plus extrémistes écologistes et les encourager à ne pas mettre toutes les lignes dans le même sac.

Gil Roy

 

Le rapport de la mission d’information sur les transports aériens et l’aménagement des territoires 

 

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Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

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    • C'est le genre de comparaison qui n'a aucune valeur scientifique pour une raison simple c'est que le paramètre utilisé 1 personne / km parcouru est stupide lorsque par ailleurs les moyens de transport ne circulent pas à la même vitesse. Refaites les calculs en considérant l'énergie dépensée sur une distance donnée et en un temps toujours le même. En d'autres termes calculez l'énergie que va consommer votre cycliste s'il roule à 300 km/h comme le TGV et faites rouler le TGV à 850 km/h comme un avion de ligne. Circuler vite coûte énormément plus d'énergie que de circuler lentement et cela sur un même parcours de la même longueur.

  • Il ne faut pas se faire d'illusion l'avion et l'auto thermique c'est terminé.
    le dernier été tres chaud a sonne la fin de ces moyens de transport.
    Je crois que tous les arguments mis en avants pour résister seront inutiles.
    nous ne pouvons plus continuer a griller autant de carburant c' est tous simplement
    dément . J'adore l'aviation et l'automobile mais c'est surement la fin des 2 sous cette forme .

    • Nous prenons note de cette décision en ce qui vous concerne, mais au niveau de la planète, il va vous falloir crier plus fort.

  • Je m'attendais à des réactions du style des 7 précédentes mais enfin peut être pas à de telles bêtises.
    Tout d'abord, le début de l'article : on nous parle "des écologistes" contre "les sénateurs"...Hum peut on vraiment regrouper ces deux catégories comme un tout unique et cohérent ?
    Ensuite quoi de neuf dans cette proposition ? Il existe en France depuis des décennies des lignes aériennes subventionnées pour lutter contre l'exode rural. Cela semble facile à défendre.
    Enfin, juste pour remettre les pendules à l'heure : oui un km parcouru en avion a un impact environnemental plus élevé qu'un km parcouru en train (même en TGV...), et oui il y a des riverains un peu partout, pas seulement autour des ligne TGV. La pollution atmosphérique est par définition mobile, et cela même si elle ne se voit, ni s'entend...
    Au final, rien de bien nouveau dans ce débat.

    • "Je m’attendais à des réactions du style des 7 précédentes mais enfin peut être pas à de telles bêtises" : permettez moi de m'incliner devant la haute sommité ultra intelligente que vous représentez par vos propos brillants et exceptionnels :)

  • Dans la résolution d'un problème société, il ne faut pas laisser de place à l'excès qui est toujours nuisible car il ne peut répondre à tous les points : TGV contre avion, energies renouvables contre nucleaire......
    Il doit y avoir un ėquilibre et surtout des solutions en dehors des grands axes desservis per toutes les solutions aujourd'hui qui se tirent la bourrent inutilement au départ de Paris noeud du problème : Marseille-Toulouse-Bordeaux-Brest--Lille-Stasbourg.
    Par contre sur les transversales ou sur les liaisons avec des villes de taille moyenne ou petite Rien!
    Le désert.
    Nous avons en France un maillage d'aéroports moyens très dense et dont l'utilisation après une éventuelle mise à niveau coûterait bien moins cher q'une seule ligne TGV (on pourrait d'ailleurs développer sur l'absence de pollutions train! Demandez aux riverains des grandes lignes ce qu'ils en pensent....)
    Le véritable service public est celui du dėsenclavement et avec 1 km de piste on accès au monde entier, alors qu' où va t on avec 1km d'autoroute ou de voie ferrée?

    • Et cerise sur le gâteau : des commuters propulsés par une motorisation hydogène - électrique.
      Car ce mode d'accumulation d'énergie s'adaptera - quand la filière se sera structurée - à la fois aux générateurs aléatoires telle que l'éolien ou sera la variable d'ajustement des pics de production nucléaire.
      Il me semble avoir entendu une mobilisation de la recherche sur le sujet de la restitution électrique via une pile H2, qui comme par hasard, utilise le mêmes effecteurs que les batteries...
      Oui les lignes aéro régionales ont de l'avenir, préservons les plateformes car d'ici là l'eau a encore le temps de couler sous les ponts

  • On a tous le droit de se déplacer. Mais les écologiste sont également très portés sur le train pour demander l'interdiction d'installation de nouvelles lignes TGV... Voir les dossiers concernant ces lignes devant traverser les vallées alpines, ou des zones de cultures ou de marais ou de foret... Je sens bien le gag venir si une ligne TGV devait passer par Notre Dame des Landes...
    La construction d'une ligne TGV est quelque chose de très lourd, de très long, et tout aussi complexe que d'installer un aéroport. Malgré c'est un moyen de transport superbe pour aller de ville à ville grâce à la prise en charge du passager en plein centre ville et non à 1 heure de route de là (genre Beauvais, Vatry...).
    En attendant qu'il y ait le TGV partout ou c'est utile, l'avion a toute sa place et son importance, grâce à sa flexibilité. Un avion tel l'ATR 42-600 Stol est l'arme magique pour ça en s'ouvrant la possibilité de dizaines d'aérodrome déjà existants !

  • Je suis bien daccord avec vous sur le fait que chacun a le droit de se déplacer.
    Dans le cas des lignes qui concernent des trajets non assurés par le rail, l'avion se justifie comme vous le citez pour un Lille-Rodez ou bien pour se rendre en Corse.
    Pourquoi pas Brest Nancy, Rennes Grenoble, ect. Une compagnie Espagnole exploite bien ce filon en France : Volotéa.
    Concernant les DOM TOM, ce sont des vols trans-océaniques, la question ne se pose pas.
    Concernant Paris-Marseille un TGV entre 39 et 150 Euros porte à porte en 3h13 fait l'affaire.
    J'ai plutot cru comprendre que la réflexion s'applique au réseau domestique ?
    Je pense qu'il faudrait efficacement développer le TGV sur tout le territoire.
    L'avion c'est bien, parfois, mais je prefere voyager en train quand c'est possible.
    En train j'ai aussi le droit de voyager :)

    • Multiplier encore les lignes TGV sur des dessertes peu fréquentées est une aberration économique et écologique. Et je ne parle pas de l'exploitation des lignes de trains électriques qui restent bloqués de nombreuses heures en cas de panne et pire empêchant un train supplétif de circuler. Evidemment en temps de guerre on immobilise un pays en quelques opérations simples.
      La desserte locale en avion est un vieux problème qui fut abordé lorsque Bréguet avait fait des essais entre Issy Les Moulineaux et Orly avec son 941. Aujourd'hui, le problème semble mieux traité car sur les sites de radar virtuel, je ne vois plus les avions faire des "hippodromes" en attente de la clairance pour atterrir. Il était fréquent au moins par le passé que des pilotes privés volant en IFR attendaient d'être partis en VFR avant de déposer leur plan de vol et ils le clôturaient pour terminer aussi en VFR leur vol, tout cela pour raccourcir le temps de vol. Aujourd'hui la chienlit à l'aérodrome pour les passagers en desserte domestique c'est d'être obligés de passer des contrôles contraignant qui n'existent pas sur les trains. Je me demande pourquoi.

  • Bien évidemment, on a encore besoin de l'avion ! Faire Paris-Marseille, ou pire, Lille-Rodez en Zoé electrique, ça va prendre du temps....
    Et je ne parle ni de la Corse, ni des Outre-mer. Tous les Français ont pourtant le droit de se déplacer, non ?

    • Lille-Rodez est un exemple assez mal choisi...car dans l'état actuel, ça doit se faire en aviation privée, dont le bilan carbone est désastreux! J'aurais tendance à dire que le faire en avion de ligne impose de passer par Orly (je ne trouve plus les Lyon-Rodez), assez peu commode d'accès depuis Lille, justement.
      Donc LIL-TLS puis...Zoé?

    • Et Paris Marseille en TGV, temps d'accès au point de départ et d'arrivée du moyen de transport, temps d'attente et d'embarquement compris, c'est pas nettement plus performant que l'avion?

      Chaque moyen de transport a son créneau d'utilité, l'avion n'est pas à sa place partout et représente dans certains cas une incongruité économique et ...... écologique.
      Une Zoé aussi et le voilier de Greta tout pareil.....

      Chacun à sa place et arrêtons les affirmations péremptoires!

      • Je plussois
        Quand à Greta, que dire à part que c'est pitoyable d'instrumentaliser une gamine pour manipuler les gens en la mettant, sans qu'elle s'en rende compte, au service des intérêts financiers gigantesques qui se sont mis en mouvement sur le marché du CO2, de ses taxes, droits à polluer, etc ... et dont le point de départ a été Al Gore et son film "An Inconvenient Truth"

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