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Aviation Générale

Pipistrel ouvre la voie à la certification des batteries

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Gilles Rosenberger

La Fédération française aéronautique (FFA) a réceptionné un Pipistrel Velis Electro (20 octobre 2020). Il s’agit du premier avion électrique certifié au monde. Une certification qui offre des garanties, notamment en ce qui concerne le sujet sensible des batteries.


Le Velis Electro est présenté comme la version certifiée de l’Alpha Electro avec lequel la FFA a lancé son expérimentation. Mais cette certification vaut bien plus que la vision administrative que l’on peut en avoir. Il va permettre, en effet, la mise en place progressive d’un nouveau syllabus du brevet de pilote privé d’avion, un nouveau cursus de formation progressivement décarbonée.

Les esprits chagrins auront peut-être raison de mettre en avant les limites de son autonomie : 50 minutes avec des batteries neuves et probablement 35 à 40 minutes en fin de vie des batteries, c’est-à-dire 500 heures (et quelques) plus tard. Mais on oubliera vite ces premières limites, appelées à croitre avec les progrès techniques des cellules de batteries.

Et ce qu’il faudra retenir c’est que l’équipe de Pipistrel aura réussi à démontrer aux équipes de l’EASA la sureté de l’avion et quand on parle de sureté (de fonctionnement) de l’avion, on inclut bien sûr son talon d’Achille : le pack batterie.
Cette étape est clé pour le futur d’une aviation décarbonée qui sera probablement plus souvent hybride que purement électrique.

Mais dans toute solution hybride existe un pack batterie pour lequel Pipistrel ouvre ici la voie.

Hors certification, nombreux sont ceux qui se sont essayé au développement de batteries en achetant sur eBay (ou plutôt Ali-Express son « équivalent » Chinois), des cellules de batteries à l’origine mal identifiée (mais elles portent la mention Lithium-ion et viennent de Chine). Ils y ont adjoint un BMS (Battery Management System, le cœur électronique de la batterie) acheté sur un autre site. Certains ont développé leur propre BMS avec un kit de développement électronique de type Arduino, avec un bricolage « maison » plus ou moins ingénieux.

Mais c’est clairement plus compliqué que ça.

Les cellules de batteries Lithium-Ion actuelles portent « une certaine instabilité » qu’il faut bien connaitre et bien comprendre pour imaginer les mettre sous surveillance électronique. On raconte même qu’il y a quelques années, un constructeur Français d’avions légers aurait failli mettre le feu à l’un de ses hangars avec une installation mal maitrisée !

La certification est une démarche puissante et complexe qui débute dès le démarrage de la conception de l’appareil et donc de la batterie.

Avec, chaque fois, dans le projet des concepteurs, les performances opérationnelles visées et « en même temps » les performances attendues en termes de sureté de fonctionnement. La profondeur de cette démarche n’est pas la même pour un avion léger mono/ biplace ou un avion de ligne. Avec littéralement un rapport 1.000 entre les deux niveaux d’exigence.

Pour faire court, on a l’habitude de résumer ce niveau d’exigence par « l’occurrence de l’événement catastrophique » (en Français « courant » : la fréquence socialement acceptable de l’accident mortel). C’est bien sûr plus complexe que cela, mais c’est un moyen simple de présenter ici la chose.

L’échelle s’étend entre : 1 accident « toléré » pour 1 million d’heures de vol (critère dit : « 10 puissance [-6] ») pour le plus petit aéronef et 1 accident « toléré » pour 1 milliard d’heures de vol (critère dit : « 10 puissance [-9] ») pour le plus gros.

Pipistrel a certifié son Velis Electro en catégorie LSA (Light Sport Aircraft) et donc selon le premier critère ; cela constitue la première étape qui permettra un jour de proposer des batteries certifiables pour les avions de ligne, mais aussi des taxi-volants évoluant en zone urbaine.

Gilles Rosenberger

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Gilles Rosenberger

Gilles Rosenberger se définit comme ingénieur, pilote (aile delta, planeur et avion monomoteur) et entrepreneur. Expert de la Nouvelle Aviation, il est un observateur avisé et bien informé des développements des nouvelles technologies et usages qui devront nous permettre de “voler moins carboné”. Il a construit son expérience et son expertise dans des sociétés telles que Socata, Aircelle, Safran, GECI-Skylander, Thales, Airbus-Voltair, Faraday Aerospace et Time To Fly.

View Comments

  • A Gilles Rosenberger
    Il serait interessant que vous fassiez un article sur le potentiel hydrogène dans un avion léger : réservoir à H2 700bars,pile à combustible,batterie tampon,moteur électrique.
    A savoir : Théorie de faisabilité pour l'aviation légère (poids/puissance/autonomie/charge en H2) et quels constructeurs sont sur le sujet.
    Bon courage

  • 50 min d autonomie. En schant que , de memoire (j ai pas revise le monomoteur depuis longtemps), la reglementation impose de se poser si on a plus que 20 ou 30 min d autonomie de vol. Ca va pas faire beaucoup de tours de piste.
    Et arriver au parking il faut recharger les batteries ou les changer. Non vraiment ca m echappe l electrification pure des avions. L hybride je comprends mais le full elec je n y arrive pas.

    • @ Philippe :
      Pipistrel nous annonce 50 minutes d'autonomies sur batteries neuves; la réserve légale exigée par l'EASA n'est pas comptée dans ces 50 minutes.

      Par ailleurs, vous avez raison, l'aviation décarbonée sera probablement majoritairement hybride. Donc contenant une batterie sur laquelle, les industrielles qui sont aujourd'hui présents sur le marché, engrangent de l'expérience.
      Mais la propulsion hybride est une propulsion bien plus complexe.
      Pour laquelle, "l'électrique pur" peut constituer une première étape technologique.

      De plus, le moteur électrique (et son électronique) pèse beaucoup moins lourd que son équivalent thermique. Ce gain de masse est rapidement compensé par la masse des batteries. Mais pour des missions de vol nécessitant peu d'énergie, le bilan masse reste favorable à l'électrique, voir neutre.
      C'est le cas des avions de l'école de base.
      Et pour certains constructeurs, c'est aussi le cas pour les commuters légers exploités sur des vols très courts. On observera leurs réalisations mais sur le papier ça peut avoir du sens.
      Le cas du projet Alice de l'Israélien eVIATION avec 3.5 t de batteries pour 9 pax et un range de 600 NM, est moins évident ...

      Il faut aussi prendre en considération les progrès attendus sur les batteries. Probablement pas si importants que le grand public l'attend mais pas négligeable non plus. Un doublement de la capacité nominale en 10 ans et surtout des gains significatifs sur la sécurité avec une incidence sur la structure du pack (hors cellules) et donc de sa masse, peuvent permettre de projeter une autonomie de 2 heures pour un biplace.
      Et là, les statistiques FFA et FAA convergent : 60% des vols hors instruction sont réalisés sur des durées de moins de 2 heures avec 2 personnes ou moins à bord. La question se posera alors sur la polyvalence des flottes des écoles/clubs.
      La réponse du marché n'est pas évidente (dans un sens comme dans l'autre) si on met dans l'équation : le bruit des avions, la conscience environnementale, le prix de la 100LL (hors taxe), les taxes carbone, l'électricité verte (ou pas), ...

      • @ Gerard Weber.
        Quelques compléments issus du POH :
        Pipistrel recommande un TBO de 500 heures pour la batterie et donc une révision majeure (en usine) avec très probablement un changement des cellules .
        La valeur de 500 heures devraient croitre avec le progrès des cellules.
        La plage d'utilisation de la batterie s'étend de 0°C à 45°C.

      • Ils marquent autonomie. Sur un fpl l autonomie x est quand le moteur se coupe faute de carburant. Donc 50 min c est 50 min pas 50+20 sinon faut dire 70.
        Et une fois qu on a fait ses 4 tdp en 30 min on reutilise l avion que le lendemain le temps que les batteries soiznt rechargees. Car les xharges ultrarapides nuisent à la duree de vie des batteries.

      • Bonjour, vous avez raison, l'hybride sera plutôt la tendance du futur .
        En effet les batteries ne laissent pas assez d'autonomie, d'autant plus que si normalement elles permettent pour pipistrel 50mn, il me semble qu'il ne faut pas les utiliser à fond sous peine de perdre sur leur durée de vie qui n'est pas ėnorme (500h).
        D'autre part , on en parle jamais mais il y a une limite haute en temperature d'utilisation (30Degres me semble t il) et une limite basse qui est je crois de 10 degrés.
        L'utilisation opérationnelle est concrètement limitée mais il faut en passer par là et donner des signes positifs de volonté d'amélioration des nuisances aux khmers verts qui nous menacent des pires foudres......

  • @ Charles
    Ca va être difficile de rentrer sur ces points sur le blog d'Aerobuzz. Si vous le souhaitez, Gil Roy vous fournira mes coordonnées pour poursuivre cet échange en privé.
    Je vous invite à reprendre la FAA AC-23.1309 qui constitue encore la base de l'analyse safety d'un avion léger. Et pour illustrer son intégration dans le monde EASA : sa déclinaison dans la SC-VTOL-01.
    Bien cordialement.

  • Je ne comprends pas pourquoi est-ce que l'article parle de sûreté de fonctionnement. Cela n'a pas de sens pour un avion léger pour lequel il n'existe à ma connaissance aucune exigence d'1 accident "toléré" par million d'heures de vol. Je serais intéressé de savoir d'où vient cette information de l'auteur ? Peut-être que les ASTM le mentionnent ?
    De même je ne connais pas dans le règlement CS-23 non commuter d'une exigence d'une FHA avion. Par ailleurs il n'est pas nécessaire d'être un génie de la sûreté de fonctionnement pour calculer qu'il est impossible d'avoir une probabilité de 1.10-6/FH d'un évènement CAT comme l'arrêt de l'ensemble des moteurs avec un pack de batterie donc la durée de vie n'est que de 500h, et avec un ensemble propulsif dont le MTBF n'excède probablement pas les quelques centaines d'heures !
    Sinon il par est ailleurs évident (et regrettable) que le taux d'accident d'un avion léger est bien supérieur à 1 par million d'heure de vol.

    Pour ce qui est de la CS-25 l'affirmation est erronée car, s'il est entendu que chaque évènement CAT ne doit pas avoir un taux d'occurrence supérieur à 10-9/FH, il est considéré qu'en moyenne 100 évènements CAT existent dans l'avion ce qui revient à un objectif d'1 accident par 10 millions d'heures de vol, ce qui est donc 100 fois plus que ce qui est indiqué dans le papier (CS-25 Book 2, AMC 25.1309, 6.a.).

    • Bonjour,
      Le niveau d'exigence mentionné concerne la batterie et non l'avion. L'arbre de défaillance de l'ensemble batterie menant à l'événement redouté doit démonter la tenue de cette exigence a 10-6. Pour l'avion la demarche est la même. Il doit être démontré que la probabilité d'occurence de l'événement redoutée est supérieure à une valeur X. Pour cela un arbre de défaillance doit être élaboré qui prend en compte les différents éléments constitutifs de l'avion pour chacun desquels cette probabilité a été calculée. Concrètement si l'avion est constitué de 100 éléments qui chacun ont une probabilité de 10-6, cela donnera au niveau avion une probabilité d'occurence de l'événement redouté de 10-4 (les chiffres cités ne sont pas représentatifs).

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