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Transport Aérien

Médical de classe 1 : peut mieux faire sur le côté psycho

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Fabrice Morlon

Dans la foulée des mesures de l’après-Germanwings, l’EASA a fait en août 2016 une proposition de modification du Part-MED, qui regroupe les différentes règles relatives à l’aptitude médicale des pilotes professionnels et de loisirs. La nouvelle mesure qui insiste sur le profil psychologique, rentrera en vigueur avant la fin de l’année pour la classe 1 (professionnels) comme pour la classe 2 (privés).
En août 2016, et dans la droite file de son « Plan d’actions après l’accident du vol 9525 de la Germanwings » l’EASA publiait une suite de propositions visant à mettre à jour et surtout à renforcer l’accession au certificat médical de classe 1 et son renouvellement, nécessaire à la fois pour passer un CPL (Commercial Pilot License) ou un ATPL (Air Transport Pilot License) mais également pour avoir accès à un emploi de pilote navigant technique en compagnie. Le Part-MED, qui regroupe les différentes règles dédiées à la condition physique et médicale des pilotes en Europe, se trouverait alors modifiée à la fois pour la classe 1 mais également, dans une moindre mesure, pour la classe 2 qui concerne les pilotes de loisir.

Tests psychologiques à portée limitée

Pour qui a passé un jour le médical de classe 1, les tests psychologiques sont encore à l’heure actuelle proche du zéro : on vous pose quelques questions, on s’enquiert si vous n’avez pas de tendance suicidaire ou d’état dépressif chronique. Voilà tout. Mais, comme certains points du dossier médical établi par le Centres d’Expertise Médicale du Personnel Naviguant (CEMPN) sont déclaratifs et donc soumis à une déclaration sur l’honneur, ils peuvent dès lors être remis en question.

On obtient le médical de classe 1 après quelques heures de tests : ophtalmologiques, oto-rhino-laryngologiques et cliniques. Une prise de sang permet de vérifier notamment l’absence d’alcool et de drogues. Cette première visite est appelée « initiale ».

Suivi médical de la Classe 1

Le titulaire de la classe 1 devra ensuite faire contrôler son état de santé par un médecin habilité, en l’occurrence le CEMPN ou l’un des centres européens habilités, tous les ans si le pilote est âgé de moins de 40 ans ou tous les six mois s’il est âgé de plus de 40 ans et en situation d’effectuer « des vols en exploitation monopilote » ou s’il est âgé de 60 ans dans les autres casLe texte de loi sur le Site de Legifrance . Mais pour ces « renouvellements », on ne subit pas tout le cortège des examens initiaux qui sont alors échelonnés sur plusieurs années.

On a coutume de dire que le plus dur est d’obtenir la classe 1 et que le renouvellement est plus aisé et moins coûteux. Ainsi, si on passe un examen médical tous les ans, la prise de sang est pratiquée tous les cinq ans, l’audiogramme tous les trois ans et l’électro-cardiogramme tous les deux ans.

Imaginez-vous maintenant dans la situation d’un pilote dont le salaire dépend de ce médical de classe 1, qui doit rembourser un emprunt qui lui a sans doute servi à payer sa qualification de type (QT), qui lui permet d’être aux commandes de l’avion que sa compagnie lui a confié… La perte du certificat médical est alors synonyme d’arrêt de vol.

Des évolutions à court terme

En août dernier, l’EASA rendait ainsi publique l’Opinion 09/2016, accessible sur son site, qui fait la somme des propositions visant à renforcer les exigences du médical de classe 1, pour la visite initiale et pour son renouvellement, mais également pour l’accession au médical de classe 2. L’Opinion de l’EASA devrait être mise en application avant la fin 2016.

Cette Opinion reprend en grande partie les suggestions émises par le BEA (Bureau d’Enquêtes et d’Analyses) qui, dans son rapport définitif sur le crash de la Germanwings rendu public le 13 mars dernier, faisait état de 11 recommandations pour renforcer les contrôles médicaux des pilotes (page 109 du document). En particulier lorsque des troubles d’ordre psychiques/psychiatriques ont été détectés chez le candidat au médical de classe 1. Toutefois, le BEA insistait sur le fait « que les exploitants européens incluent dans leurs systèmes de gestion des mesures destinées à atténuer les risques socio-économiques pour leur pilotes liés à une perte de licence pour raisons médicales. »

Mais le BEA a aussi émis la recommandation d’un « équilibre entre secret médical et sécurité publique« , invitant à la réflexion sur l’opportunité, voire la nécessité du levé du secret médical dans certains cas.

Dans le respect du secret médical

Dans son Opinion 09/2016, si l’EASA élude l’épineux problème du levé du secret médical, elle propose de rechercher de manière systématique la présence d’alcool ou de produits stupéfiants dans le sang. Elle préconise également une analyse mentale plus fine des candidats et un meilleur suivi dans le cas d’un passé psychiatrique.

Les centres médicaux et les médecins seront tenus d’informer les autorités compétentes des évaluations médicales incomplètes, de manière à prévenir les tentatives de fraudes. Les médecins aéronautiques devront être en mesure de maintenir et renforcer leurs compétences de manière à améliorer les qualités des visites, par le biais de formations, et leur supervision et leur surveillance devrait être accrue. Enfin, l’EASA demande aux détenteurs de certificats médicaux de les retourner aux autorités en charge des licences dans le cas de suspension ou révocation de ces certificats.

Dans la pratique, l’Union Syndicale des Personnels Navigants Technique (USPNT) n’est pas contre le renforcement des tests psychologiques, qui devraient incomber, selon elle, de préférence aux CEMPN. Les compagnies « majors » pratiquent déjà, et depuis longtemps, ce genre de tests car elles ont des besoin identifiés en fonction des missions définies. Mais un pilote en début de carrière peut-il être en mesure de savoir s’il va bien supporter les décalages horaires ou la cadence des demi-toursUne compagnie fait un trajet de A à B. Arrivé à B on débarque les passagers, on fait le plein, on prépare son dossier de vol, on fait la prévol, on embarque d’autres passagers et on part vers une nouvelle destination. D’après l’USPNT, certaines compagnies mettent 45 minutes et d’autres… 25 minutes pour réaliser toutes les étapes citées plus haut! Et ce quatre à cinq fois en une journée.?

Outre les modifications à l’accession à la classe 1, l’EASA souhaite également modifier les règles de délivrance du médical de classe 2, réservé aux pilotes privés. Ainsi, un électrocardiogramme sera systématiquement pratiqué pour une visite initiale, puis à la première visite après 40 ans et après 50 ans, puis tous les deux ans. Par ailleurs, le texte de l’EASA invite les médecins à pratiquer des évaluations complémentaires du patient en cas de diagnostic de migraine ou de déficiences vasculaires.

Fabrice Morlon

 

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Fabrice Morlon

Pilote professionnel, Fabrice Morlon a rejoint la rédaction d’Aerobuzz, début 2013. Passionné d'aviation sous toutes ses formes, il a collaboré à plusieurs médias aéronautiques et publié une dizaine d'ouvrages, notamment sur l'aviation militaire.

View Comments

  • Dans le CEMPN où je me rends tous les 6 mois, j'ai droit à un électrocardiogramme tous les 6 mois et ce, depuis le passage de mes 40 ans.
    Quant à la prise de sang, elle fait partie d'une "prise en charge personnelle" en relation avec son médecin traitant tout comme les dépistages préventifs (colorectal et PSA).

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