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Aviation Générale

Les aéro-clubs s’ouvrent au coavionnage

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Gil Roy

La Fédération Française Aéronautique et la plate-forme de coavionnage Wingly annoncent « la mise en place d’un partenariat privilégié pour promouvoir le partage de frais élargi dans les aéro-clubs affiliés à la FFA ». Wingly est prête à accepter les conditions posées par la FFA.

Les créateurs des plates-formes françaises de coavionnage ont choisi de s’exiler en Allemagne et au Royaume-Uni pour laisser le temps aux mentalités d’évoluer en France. Le pari était loin d’être gagné d’avance. L’accueil réservé par les pilotes privés allemands et britanniques, ainsi que celui des autorités nationales, leur ont non seulement permis de survivre économiquement, mais il leur a aussi fourni des arguments de poids.

Evolution des mentalités

La décision du Conseil d’Etat (22 juin 2017) d’annuler le dispositif, jugé par la partisans du coavionnage comme coercitif, mis en place, un an plus tôt (22 août 2016) par la DGAC pour encadrer le coavionnage en France, a évidemment été un facteur déclenchant. Toutefois, entre temps, au sein même de l’administration, les mentalités avaient évolué, et la DGAC et la FFA ont continué à réfléchir au sujet.

C’est la raison pour laquelle, la DGAC s’est contentée de prendre acte de l’annulation du Conseil d’État et s’est rangée à la position de l’EASA. Autrement dit, la France s’en remet à la charte de bonne conduite éditée par l’Agence et fait confiance à la FFA. Au final, c’est un peu comme si la DGAC avait voulu donner le temps aux acteurs de mettre en place leur propre mode opératoire. Même si cela n’a pas été déclaré publiquement, la volonté au plus haut niveau de la DGAC était de « permettre une pratique en conformité, avec des normes de sécurité optimales ».

Un dispositif adapté aux aéro-clubs

Il reste encore quelques points de détail à régler, mais pour l’essentiel la DGAC, la FFA et une première plate-forme ont trouvé un terrain d’entente comme le démontre l’annonce conjointe de la Fédération et de Wingly, datée du 11 juillet 2017. Il s’agit de « mettre à disposition des aéroclubs un dispositif adapté à leurs particularités associatives ».

Axé autour de deux piliers, ce dispositif devrait permettre d’éclaircir les zones d’ombre identifiées par la FFA dès l’émergence des plateformes internet de partage des vols :

Une validation des pilotes éligibles aux vols à partage de frais élargi par le président et le chef pilote de l’aéroclub. Cette validation ou « lâcher emport de passager élargi », prendra en compte de critères basés essentiellement sur des facteurs humains. Elle permettra aux dirigeants des aéroclubs de valider les pilotes pouvant proposer des vols à frais partagés élargis.

Une licence « passionné » pour les passagers réservant des vols sur Wingly sur des avions des aéroclubs fédéraux. Cette licence permettra d’être en conformité des exigences imposées par le statut associatif de l’aéroclub.

Le partage de frais élargi

Les lecteurs attentifs auront noté qu’au terme « coavionnage » est préférée l’expression «  partage de frais élargi ». Pour Jean-Luc Charron, le président de la FFA, il ne s’agit pas de jouer sur les mots, mais de rappeler que le partage de frais existe depuis toujours en aviation de loisir. Le coavionnage n’est qu’une évolution. « Nous voulons insister sur une dimension essentielle au niveau des aéro-clubs qui est le partage à parts égales entre tous les occupants de l’avion, y compris le pilote », souligne-t-il.

Une licence spéciale coavionnage

C’est une première concession faite par Wingly à la FFA. Une deuxième est l’obligation faite aux passagers d’adhérer à la FFA via une licence. Son montant est en cours de négociation. Wingly le souhaite pas trop élevé pour éviter qu’il soit dissuasif. Il pourrait se situer entre 5 et 15 euros, pour couvrir la responsabilité du président de l’aéro-club et être en règle avec le principe associatif (fiscalité). Une licence comparable existe déjà dans les statuts de la Fédération, avec le « passeport découverte ». Il s’agit d’une licence temporaire orientée pilotage. Reste à extrapoler une licence « découverte du vol » qui pourrait avoir une durée de validité de 45 jours, elle aussi.

La balle est dans le camp de la FFA. Wingly espère que les derniers points en suspend trouveront une solution dans les semaines à venir afin de pouvoir lancer à nouveau le coavionnage en France. La FFA espère être prête, au plus tard, pour l’ouverture de la campagne des licences de pilotes 2018 qui démarre le 1er octobre 2017.

Le dernier mots aux présidents des aéro-clubs

Jean-Luc Charron insiste sur le fait, qu’en définitive, ce sont les présidents des aéro-clubs qui auront le dernier mot. Ils seront en effet libres d’interdire la pratique du coavionnage ou au contraire de s’inscrire dans la logique libérale de l’EASA et de sa charte de bonne conduite. Ils pourront enfin s’inscrire dans le cadre fédéral et ainsi bénéficier d’un accompagnement.

Jean-Luc Charron ne cache pas que le coavionnage – ou pour reprendre la terminologie fédérale « le partage de frais élargi » – peut devenir une opportunité de fidéliser les passagers Wingly et de les transformer en pilotes. Pour ce faire, la FFA réfléchit au moyen de garder le contact. La licence est un moyen d’y parvenir.

En attendant, sur les 3.000 passagers qui ont eu recours à Wingly depuis l’ouverture de la plate-forme le 7 juillet 2015, 400 seulement (dont 100 le premier mois) sont français. Les 2.600 autres sont allemands ou britanniques. Actuellement, le site compte une centaine de propositions de vol en France, contre 25.000 en Allemagne. Le rapprochement avec la FFA signe le retour de Wingly dans l’hexagone.

Gil Roy

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Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

View Comments

  • Non mais les mecs, arrêtez de faire des ronds dans le ciel.
    Il n'y a que les propriétaires (club, privé) qui décide si oui ou non ils l'autorisent le coavionnage sur leurs machines.
    Pour le reste, la pratique est tout à fait légal depuis l'obtention du PPL. Point.
    Et maintenant il va falloir faire payer des licences à madame/aux voisins/aux potes pour les emmener en balade... ? Du délire !

  • Du co-avionnage au partage de frais élargi ...
    Même si pour l'instant il y a peu de vols proposés (en France) et que ceux ci sont des navigations plus ou moins longues, ou des petits vols circulaires, et même si cela permet d’augmenter sensiblement les heures de vol, ce que j'y vois aussi c’est une captation des recettes des Vols Découverte par les sites de co-avionnage et par ... la FFA !
    En effet pourquoi payer plus cher pour le même service :
    - le vol sera moins cher qu'un baptême "normal", les gens savent compter et sont de plus en plus familiers avec les sites en ligne …
    - une partie du coût du vol sera pris par le site de co avionnage, il faut bien vivre …
    - et dans le cas de la nouvelle licence envisagée dite "licence fédérale pour les passagers contactés via des plateformes de partage des vols", ce sera la FFA qui récupèrera une partie du cout du vol ! Bien sur l’argument massue est la conformité avec le système associatif propre à la France.
    Enfin, je vois peut-être le mal partout !

    • @fildru
      intéressant la voiture volante, mais pour partager les frais faut il faire un deal sur Uber ou sur Wingly ? un régal pour les juristes :-)

  • Comme il est difficile de se remettre en question. Le partage des frais est légal depuis très longtemps et toutes les administrations le savent et en tiennent compte. Même le fisc. Le coavionage est une nouvelle excellente façon de pousser les pilotes au voyage, et pour certains passagers de prendre la mesure d'une activité à laquelle ils rêvaient sans pouvoir s'en approcher. Mais pourquoi à-tu on l'impression que ça dérange autant de membres de la communauté, autant que toutes´ les tentatives de créer un IFR "privé" ?

  • La FFA rejette -à juste titre- le transport public déguisé que représente le co-avionnage, dont la seule justification est l'enrichissement des sites intermédiaires, mais entrouvre la porte pour récupérer quelques cotisations au passage. On bricole, comme souvent. Une élucubration de plus que cette licence passager.

    • Ne vous inquiétez pas, ce blablacar aéro reste et restera une activité saisonnière.
      95% des pilotes en club volent en VFR, et parmi eux 75% dans du beau temps pour ne pas dire CAVOK.
      J'imagine mal un pilote raisonnable répondre oui à un pax qui s'est inscrit pour un trajet de 150 NM alors que les conditions du jour sont : plafond 700 ft, visi 4 km. Et ce sont des conditions régulières en région parisienne en automne/ hivers.
      Les gens sont de moins en moins patient, les pax finiront par jeter l'éponge à force de reports récurrents.
      Les compagnies aériennes n'ont pas trop de soucis à se faire, Wingly ne leur piquera pas leur boulot ...

  • Il eu été dommage de passer à côté, en dépit du changement culturel "violent" et de toutes les adaptations à opérer... Soulignons une fois de plus le travail de fond réalisé par une fédération visionnaire.

    • Il est sans doute plaisant de faire passer les détracteurs du coavionnage "ancienne mouture" pour les rétrogrades d'un pays perdu à qui il fallait laisser le temps - les pauvres - de changer de mentalité...

      Mais à lire le dispositif proposé, on constate que ce sont bien plutôt les promoteurs du coavionnage qui ont dû venir à Canossa. Leurs "clients" vont devoir adhérer à une démarche associative. On peut mettre le petit lait au frais !

      Tous ceux qui se sont battus pour ne pas si facilement baisser la garde, DGAC la première et FFA la seconde, ont finalement eu bien raison.

      Henri Payre

  • donc d'un côté, on a la DGAC dont le ticket d'entrée pour un dossier de CTA (transport public) s'élève à 100.000 Euros minimum, la nécessité d'avoir des machines éligibles (avion récent, bimoteur, ou turbine), un entretien obligatoire en PART145 suivant le programme constructeur et de l'autre on aura des "frais partagés" , sur des avions antiques, dont le programme d'entretien aura été bidonné aux bons vouloirs des dirigeants du club, et la maintenance parfois sous-traitée aux membres apprenti-mécanos par le mécano du club....ça promet!

    • Oui, effectivement les clubs vont faire deux type de recours à wingly :

      - Les vols circulaires, qui sont souvent vendu plutôt X2 au dessus du coup horaire, dont le pilote va devoir payer 1/4, soit par exemple 90 par heure pour le DR400 classique et le baptême classique.. il y a fort à parier que le pilote concerné préférera trés vite payer pour une heure de jodel. Ou faire de classiques vols de découverte bénévole hors cadre wingly.
      Bien sur il y aura les petits arrangements, les frais de déplacements, les remboursements de participation horaire ..etc avec un énorme risque alors pour le président du club au niveau fiscal, mais aussi en requalification sociale -> salariat -> tpp illégal, la boucle infernale.
      Sans compter la commission wingly, la licence.. etc et la possibilité d'infraction à la régle publicitaire ( régle des 4P ) dés lors que le prix proposé sera celui d'un baptême et pas le prix de base de l'heure de vol..

      -Et puis les vols de voyage partagés, dont le pilote payera 1/4 évidemment, intéressant pour celui qui veux réduire ses couts, compliqué pour celui qui recevra des demandes de clients : " moi je veux aller là, tel jour" " pas de soucis, on vous cré le vol sur wingly " et un petit mail aux membres du club.
      Qu'est ce que ça rapporte au club ? des heures de vol oui... mais les clubs vont alors découvrir que le TPP c'est un métier, loin de la passion du vol, et que ceux qui tenteront de s'organiser comme un transporteur aérien en "massifiant" leur offres sortiront trés vite, à la foi de leurs statuts, et de la loi 1901 avec un risque fiscal lourd.

      Trouver la frontière de ce qui est vraiment le blablacar du ciel fort louable, et de ce qui est du faux tpp, du baptême sans CTA.. etc, sera probablement assez simple comme ce fut le cas pour les taxis, les uber les hitch qui au bout de quelques années d'euphorie se sont retrouvé lourdement condamnés pénalement.
      Ce n'est pas dans l'outil que se situe la limite mais dans l'usage avisé ou non qu'en feront les aéroclubs. Ailleurs en Europe pas de loi 1901, il n'y a que des pros, ou que des privés, comme sur le parc auto français, donc le blablacar du ciel y trouve du sens.
      Chez nous c'est particulier avec les clubs et la loi 1901 et c'est faire prendre à ces clubs beaucoup de risque juridiques. Ce n'est pas pour rien d'ailleurs que c'est un privé qui est allé au conseil d'état.. ça porte du sens pour lui.

      Il y a fort à parier, que malgré l'amitié qui unie le monde de l'aérien les tenants de payants de CTA ne s'amuseront pas bien longtemps d'un usage détourné du coavionnage. Pour rappel blablacar ne doit pas non plus rapporter des sommes trop importants, il y a une définition fiscale des couts que l'ont peux recevoir par blablacar. Le fisc se penchera aussi sur wingly en son temps c'est probable. Il y a fort à parier que si le vol a été entrepris par une demande "spécifique" du passager et non sur un trajet déjà programmé sur pilote tout celà sera requalifié fiscalement, puis socialement, puis aéronautiquement. Aux présidents de clubs de faire preuve de clairvoyance et à la FFA de les aider à déjouer ces piéges.

  • Sauf erreur de ma part, la Fédération, dans sa démarche, ne parle pas de la dimension fiscale appliquable aux aéroclubs. Or, c'est là le plus grand risque pour les clubs, je m'étonne que çe point soit passé sous silence.

    • Effectivement... et le volet travail dissimulé dont se délecteront les administrations telles les IIMPOTS, l'URSAFF, la DIRECTTE qui eux, n'auront que faire de ce que peut dire l'EASA sur ce point... ! Bon courage à ceux qui s'y frotteront.

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