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Réinventer le 3ème Niveau

© Vincent / Aerobuzz.fr

Et si la solution passait par le P2012 Traveller de Tecnam. Un avion basique. Moderne. Disponible sur catalogue. Facile à remplir avec seulement 9 passagers. Capable de relier la plupart des villes françaises entre elles, à moindre coût. En d’autres termes, le commuter de nouvelle génération qui a fait ses preuves. En attendant les hypothétiques avions régionaux électriques…

Il y a trois semaines, les cinquante Chambres de commerce et d’industrie regroupées au sein de France CCI sont entrées au capital de Sealar, cette structure créée, à la fin des années 2010, à l’origine par deux chambres de commerce pour gérer les aéroports bretons et qui depuis, s’est également vu confier, le développement de l’activité des aéroports normands. Sealar ne s’en sortant pas trop mal, pourquoi ne pas tenter l’expérience ailleurs ? Aide-toi et le ciel t’aidera !

Il y a urgence et les CCI françaises sont bien placées pour le savoir. En 2024, le trafic aérien domestique est revenu à son niveau de la fin des années 80. Ce n’est pas un accident de parcours, mais une interminable descente. Chaque année qui passe, le voit se rétracter. Dans les territoires, la déconnection qui s’aggrave est une réalité que vivent les entreprises au quotidien. De la déconnection à la délocalisation…

En évoquant le bimoteur italien, il ne s’agit pas d’encourager les CCI à se lancer dans l’aventure de la création d’une compagnie. Ce serait remuer le couteau dans la plaie en rappelant des expériences douloureuses. Certaines encore très présentes… A chacun son métier.

La vocation des CCI étant d’accompagner les entrepreneurs, elles peuvent se mettre au service d’une compagnie aérienne existante ou en devenir, en l’aidant en particulier à évaluer le marché potentiel et en faisant la promotion des nouvelles lignes. C’est ce que font les grands aéroports internationaux, à une autre échelle, pour séduire et fidéliser les majors et les low cost. L’erreur serait de croire qu’il est plus facile de remplir un avion de 9 places, qu’un de 300… L’exercice exige du doigté.

Là où le CRJ1000 avec ses 100 sièges, l’ATR 42 avec ses 42 sièges, et même le Beech 1900D avec ses 19 places se sont révélés trop gros, les compagnies régionales ont jeté l’éponge, faute de pouvoir atteindre un taux de remplissage économiquement viable. Avec un Tecnam 2012 de 9 sièges, c’est aussi un nouveau type d’exploitation qu’il faut repenser pour aller rechercher la rentabilité : le 3ème niveau du XXIème siècle.

Cet avion a été développé sur le cahier des charges d’une compagnie aérienne américaine qui ne trouvait pas sur le marché, le module adapté à ses lignes à faible volume. Cape Air avait besoin d’un avion moderne, beaucoup plus économique et fiable que ses vieux Cessna C402. Tecnam lui a offert l’avion dont elle avait besoin. Le module adapté à son type d’exploitation : 600 vols par jour entre 17 aéroports secondaires au moment de la signature du contrat.  Elle en a commandé un peu plus de 100.

Depuis l’été 2019, Cape Air a déjà mis en ligne une trentaine de Traveller. Et le nouvel avion est entré dans la flotte de nombreuses autres compagnies aériennes à travers la planète, dont trois en Europe. En 2026, Tecnam va livrer le centième P2012 Traveller. A défaut d’un autre avion équivalent, et en attendant les hypothétique avions régionaux hybrides, le P2012 peut faire partie de la solution pour désenclaver les territoires français. Il faut le prendre pour ce qu’il est : un outil dont il faut apprendre à tirer le meilleur parti.

Les chambres de commerce et d’industrie ont compris le potentiel que représentent leurs aéroports. C’est une excellente nouvelle. Un grand pas dans la bonne direction. Faut-il encore qu’elles réussissent à trouver les investisseurs pour connecter ces aéroports entre eux, et à faire appel aux professionnels du transport aérien capables de mettre sur pied un maillage et le régler au millimètre près. C’est une exploitation à l’échelle de l’hexagone qu’il faut repenser, avec non pas un avion, mais une flotte importante pour atteindre une économie d’échelle. Il faudra plus que des intentions et une volonté… Reste enfin, à savoir, si les pouvoirs publics sont prêts à accompagner le mouvement. La France, n’est pas la Floride. Et pas seulement du point de vue météo…

Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

2 commentaires

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  • Je me souviens qu’au début des années 80 il y avait une ligne régulière Paris-Orly – Aubenas, assurée par une compagnie dont j’ai oublié le nom, à l’aide de Partenavia P68 Victor. Si cette liaison a bien évidemment duré moins longtemps que les impôts, une éventuelle liaison aérienne assurée en Tecnam P2012, visuellement et techniquement proche du P68, ferait immédiatement penser à cette ancienne relation.
    DC

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  • Je trouve un peu rapide de juste qualifier le P2012 de « moderne », du fait qu’il a été développé récemment.
    Certes son avionique Garmin est très moderne, mais la grande majorité des avions et hélicoptères légers et moyens ont aujourd’hui de l’avionique Garmin, y compris ceux qui ont été conçus dans les années 50 et 60.
    La principale particularité du P2012 est qu’il a des moteurs à pistons, et on ne peut pas dire que ce soit moderne, ni par la technique, ni par l’économie, ni par les émissions.
    Ces moteurs tournent à l’AVGAS qui coûte 2 à 5 fois plus cher que le kérosène dans tous les pays du monde, SAUF aux USA comme par hasard, où les deux sont quasiment au même prix. De plus, et c’est très surprenant, leur consommation spécifique est plus élevée que celle d’une turbine moderne, sans parler de leur poids deux fois plus élevé. Leur bruit est plus élevé, du fait notamment de l’absence de réducteur et de la grande hélice qui va avec les décollages courts, et leur pollution est bien pire, au moins tant que l’AVGAS sera plombée.
    De plus, ces moteurs sont très mal adaptés aux avions pressurisés du fait de leur refroidissement difficile – le refroidissement des cylindres ET l’intercooler. Sans être spécialiste, je ne parierais pas sur une ligne Lyon-Périgueux ou Chambéry-Nice en avion non pressurisé. Notamment pas en tant que passager qui peut être malalde.
    Last but not least, comment amortir le coût de deux pilotes de ligne en France pour transporter une dizaine de passagers ? et qui serait prêt à voler en monopilote en hiver, en France, dans les basses couches, avec deux moteurs à pistons et un PA sans aucun rapport avec celui d’un Airbus ? Pas moi, même si c’était certifié.
    Comme l’écrit Gil, il y a beaucoup de différences avec la Floride.

    Dernier commentaire : le P2012 est léger et particulièrement élégant (italien, quoi :-)), deux qualités qui ne doivent rien à la modernité, mais plutôt au talent de son concepteur.

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