Un accident qui met en lumière sur une spécificité peu commune propre à l'avitaillement du Cessna C210K. © BEA
Le 25 juillet 2024, vers 17h45, un Cessna 210 K à destination de Colmar réalise un atterrissage en campagne suite à une panne d’essence. L’équipage était pourtant sûr de son calcul. C'était sans compter sur une spécificité de ce type d'avion mise en avant par le BEA dans son récent rapport final.
Ce jour là, le commandant de bord accompagné d’un passager (également qualifié pilote-instructeur), décolle de l’aérodrome d’Aalborg au Danemark à 13 h 28 à destination de l’aérodrome de Colmar-Houssen (LFGA). Durant la phase de préparation au sol, il est convenu d’une altitude de croisière de 4 400 ft et d’une vitesse de 130kt (240 Km/h). Fait surprenant pour un avion à train rentrant : celui-ci ne peut se rétracter suite à un problème technique.
Consultés trois mois plus tôt, les mécaniciens d’un centre de maintenance n’avaient pas réussi à diagnostiquer le problème. Depuis ce moment, l’avion vole donc systématiquement train sorti. La consommation est naturellement plus importante qu’à l’accoutumée, pour une vitesse similaire, suite à la traînée engendrée. La consommation de carburant train rentré en croisière est d’environ 18 gallons US/h (68 litres), à une vitesse d’environ 160 kt (296 Km/h).
Le pilote a remarqué qu’avec le train sorti, la consommation était identique avec une vitesse de croisière d’environ 135 kt (250 Km/h). C’est cela qui a motivé le choix de cette vitesse pour le vol.
Au sol, le pilote a estimé avoir avitaillé l’avion au plein complet, soit 90 gal US (340 litres), avec 89 gal US (336 litres) utilisables, parmi lesquels 9 gal US (34 litres) de réserve finale. Pour le vol, le pilote a calculé rigoureusement avoir besoin de 77 gallons (291 litres), ce qui lui laisse une marge de sécurité.
Pourtant, à 17h40, « le pilote demande au contrôleur de Colmar une priorité à l’atterrissage » explique le rapport des enquêteurs du Bureau d’Enquêtes et d’Analyses. A 17h43, le pilote annonce au contrôleur que « le moteur est en train de caler ». A 17 h 45 min, alors que l’avion est à faible hauteur, le train d’atterrissage entre en contact avec la terre d’un champ choisi comme point de posé. L’avion rebondit, se retourne sur le dos et s’immobilise à 6 kilomètres de l’aérodrome de destination. Le pilote et le passager en sortent grièvement blessés.
Lorsque les enquêteurs arrivent sur les lieux de l’accident, il ne reste que 900 ml de carburant dans les réservoirs. Pour trouver les raisons de cette panne sèche inattendue, le BEA doit déterminer une corrélation de faits pour expliquer la situation. Une éventuelle fuite d’AVGAS est rapidement écartée.
Le BEA se penche ainsi sur une directive de navigabilité émise par la FAA et relayée par la Cessna Pilots Association. Celle-ci explique « qu’il peut être difficile d’ajouter les derniers gallons de carburant dans chaque réservoir des avions Cessna Centurion. » . L’article précise que le réservoir peut sembler plein alors qu’il manque en réalité entre 5 (18l) et 10 gal US (37l). Il est également mentionné que « plusieurs atterrissages en campagne ont été causés par manque de carburant, alors que les avitaillements avaient été considérés comme complets par les pilotes. »
En l’occurrence et afin de palier à ce problème, elle explique la nécessité vérifier que l’avion n’est pas incliné au moment de l’avitaillement et de contrôler visuellement le niveau de carburant de chaque réservoir.
A ce sujet, les enquêteurs ne peuvent que constater que l’aire de ravitaillement de l’aérodrome d’Aalborg, où le plein a été réalisé, n’est pas plane. Il a donc été estimé par les enquêteurs « qu’avant le vol, la quantité de carburant à bord de l’avion était ainsi inférieure de 7 gal US (26 litres) à celle considérée par le pilote. »
En croisière, le réglage de puissance par le pilote a aussi conduit à une consommation moyenne supérieure de 1 gal US/h (3,7l) aux prévisions du pilote. Cette différence a entraîné une surconsommation d’environ 5,5 gal US lors du vol (20,80l). En se retrouvant avec sensiblement 13 gallons (49l) en moins que ce que l’équipage pensé suite à ces deux raisons, le commandant de bord ne disposait que de 76 gallons (287,6 litres) dans ses réservoirs. Une quantité juste inférieure aux 77 gallons (291 litres) nécessaires pour atteindre tout juste la destination.
2 commentaires
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Ah oui, 13 US gallons en moins que ce que pensait l’équipage, ça fait beaucoup. Pour palier le problème, il vaut mieux toujours prendre de grosses marges puisqu’il est connu. Fly safe !
Ne peut on pas AUSSI compter un peu sur les jauges à carburant ?