Accueil » Industrie » L’industrie aéronautique française et ses défis

L’industrie aéronautique française et ses défis

Le chiffre d’affaires de la filière aéronautique s’est établi à 70,2 Md€ (+9%) en 2023, dont 45,7 Md€ (+9,7%) à l’export. Les activités Défense reculent de -7%. © Alex Marc / SIAE 2023

Bien que la crise COVID appartienne désormais au passé, ses conséquences sont encore lourdement sensibles d'autant que d'autres menaces sont venues alourdir le contexte alors que les carnets de commande sont pleins. Les défis restent donc nombreux, pour assurer les approvisionnements et les recrutements, mais pas seulement.

Avec des carnets de commandes pleins pour dix ans chez Airbus, la filière aéronautique aurait de quoi pavoiser le sourire au lèvres. Le secteur affiche de beaux résultats dont un cinglant 70 milliards d’Euros de chiffre d’affaires en hausse de +9% dont 45,7 Md€ (+9,7%) à l’exportation. L’aérospatiale demeure le meilleur atout de la banlance commerciale française.

« Le secteur civil représente 75% du chiffre d’affaires, retrouvant ses valeurs traditionnelles, et a enregistré une nette progression de 15,9% à 52,3 Md€. En parallèle, ces résultats de la filière mettent en valeur un recul relatif des activités Défense, avec un chiffre d’affaires de 17,9 Md€ (-7% à périmètre constant), du fait d’une forte baisse des livraisons à l’exportation (-25,5%) par rapport à une année 2022 marquée par les contrats Rafale export. », précise le GIFAS (Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales). 

Il n’en demeure pas moins que la situation de l’industrie aéronautique et spatiale reste tendue évidement sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Des mesures doivent également être prises pour assurer les productions de titane, d’aluminium et d’acier dont l’aéronautique a besoin. La crise ukrainienne et l’inflation galopante ont un impact certain sur l’ensemble du système d’autant plus que la filière s’appuie sur des contrats au temps long établis sur une situation économique donnée : « Il nous faut une compétitivité à 360°, matières premières, énergie, compétences » déclare donc Guillaume Faury, PDG d’Airbus et Président du GIFAS.

De même les difficultés actuelles de Boeing ne font rire personne : « Il y a un énorme écart entre l’offre et la demande pour les avions de ligne et il y a un équilibre à trouver pour les montées en cadence, un défi énorme avec de lourds enjeux. » La menace sur le duopole des avions de ligne pourrait faire des heureux : « les pays émergeant sur les marchés aéronautiques ont un créneau à saisir pour placer leurs produits » ajoute-t-il en substance car la pénurie d’avions, mais aussi de moteurs, se compte en centaines d’unités.

Les conséquences de la crise Covid se font également sentir sur le marché de l’emploi. Alors que l’industrie aéronautique est présente sur tous les territoires, elle peine encore à recruter. Avec quelques 210.000 salariés en 2023 (195.000 en 2022), dont 30% de femmes et une très forte proportion d’ingénieurs, une croissance annuelle de 14.000 emplois et une implication sans faille dans la formation professionnelle avec quelques 11.000 alternants elle ne parvient pas à armer tous ses postes. Outre un désengagement de l’État pour les filières alternantes, la crise Covid a modifié certaines structures sociétales comme l’incarne le télétravail. La filière aéronautique, comme toutes les filières industrielles n’échappe donc pas à une nécessaire adaptation.

Les enjeux de décarbonation ont, eux aussi, été accélérés. L’aérien dispose d’un outil efficace, le CORAC (Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile) dont Guillaume Faury a loué les mérites. Alors que certains secteurs semblent prêts à revenir sur leurs engagements, l’aérien, lui, continue de suivre la trajectoire 2050 : « je suis optimiste sur les produits mais je vois plus de difficultés sur la croissance de l’utilisation des carburants d’aviation durable (SAF) ; mais pas de changement de la feuille de route néanmoins, l’accélération est en cours. »

Le PDG d’Airbus n’a toutefois pas manqué de signaler :  » il faut observer les leviers US où on va inciter les opérateurs à opter pour des solutions innovantes et à moindre impact ce qui a pour corolaire de rendre les prix des SAF compétitifs par le jeu de la fiscalité et des subventions ! » ajoutant aussi que les technologies de décarbonation devraient « privilégier celles qui ne reposent pas sur les matériaux critiques »

Loin de tout triomphalisme, le GIFAS a dressé un constat factuel.



Frédéric Marsaly

Frédéric Marsaly, passionné par l'aviation et son histoire, a collaboré à de nombreux média, presse écrite, en ligne et même télévision. Il a également publié une douzaine d'ouvrages portant autant sur l'aviation militaire que civile. Frédéric Marsaly est aussi le cofondateur et le rédacteur en chef-adjoint du site L'Aérobibliothèque.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Les commentaires sont reservés aux Abonnés premium

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.